[Portrait Tamba Diaspora]: Rencontre avec Mahamadou Diakhaby «Investissons ensemble dans les domaines stratégiques pour créer de l’emploi qui stimulera la consommation et la croissance à Tambacounda»

Au fil de ses pérégrinations dans la diaspora Tambacoundoise, www.tambacounda.info ambitionne de présenter à travers des interviews le profil de jeunes cadres dont le cœur et l’esprit restent fortement attachés à leur région natale. C’est au tour de Mahamadou Diakhaby, écrivain, titulaire d’un master2 Conseil en entreprise et fondateur de l’Association pour l’Initiative Privée en Afrique (AIPA).

www.tambacounda.info : Mahamadou Diakhaby, pouvez-vous vous présenter aux lecteurs de Tambacounda.info ?

Bonjour, merci pour votre invitation à m’exprimer dans votre journal Tambacounda info. Pour répondre à votre question, je suis né dans la région de Tambacounda, à Larédji notamment. J’ai fait mes études primaires, collégiales et secondaires dans la région de Tambacounda, puis mes études supérieures à Dakar, notamment à l’UCAD et à ETSHOS, avant d’aller les poursuivre à Paris, à l’ICD d’abord, puis à l’université d’Evry pour une maîtrise en AES, option gestion des entreprises et à l’Université Paris13 pour un master2 en Innovation, Économie et Finance d’Entreprise option Conseil en Entreprise.

www.tambacounda.info : Quels souvenirs marquants gardez-vous de votre vie d’élève à Tambacounda ?

À l’école primaire ce qui m’a le plus marqué, c’était cette alternance de la vie scolaire pendant la saison sèche et de l’activité agricole pendant la saison des pluies. C’était très intéressant, car tout en étant élève, je participais à l’activité productive. De plus, elle contribuait à donner des habilités professionnelles qu’on n’acquiert pas sur les bancs de l’école.

Au collège et au secondaire, c’était la période où, je faisais en même temps de l’athlétisme. J’étais fier d’avoir participé et représenté Tambacounda dans la compétition nationale d’athlétisme pour la coupe de madame Elisabeth Diouf, à Ziguinchor en 1992 au stade Aline Sitoé Diatta. À l’époque, l’athlétisme n’était pas bien encadré à Tambacounda. Les dirigeants sportifs attendaient 2 à 3 mois de la compétition pour se rendre au stade et procédaient au recrutement des meilleurs athlètes. Un jour, je m’entraînais au stade avec un caporal, quand un monsieur vint me parler, disant vouloir me recruter dans leur équipe d’athlètes pour représenter Tambacounda à une compétition nationale. Ce qui fut une grande surprise pour moi. En même temps, j’étais très content croyant que ma carrière d’athlète allait être lancée. Par la suite on était laissé à nous mêmes pour nous préparer à cette compétition. Bon, moi j’ai eu la chance de faire connaissance de ce caporal, qui m’a encadré lors de mes préparations à cette compétition.

www.tambacounda.info : Quels sont, selon vous, les problèmes les plus urgents à régler dans le domaine de l’éducation dans la région de Tambacounda ?

Je pense que les problèmes de l’éducation dans la région de Tambacounda sont multiples. D’abord pour l’école qui forme les élites de demain, il faut doter celle-ci des moyens de former le plus grand nombre de personnes et de manière qualitative. Pour se faire, il faut que les autorités municipales développent des infrastructures scolaires, notamment en construisant plus de bibliothèques dans les quartiers et dans les villages pour donner goût à la lecture et à la recherche aux élèves. Il faut donner les moyens matériels aux associations qui s’impliquent dans la lutte contre l’analphabétisme. Il faut développer la scolarisation des jeunes filles qui sont victimes de mariage précoce. Aujourd’hui encore, le poids traditionnel du mariage est présent dans les cultures. On pense que le mariage est la chose la plus importante de la vie. Mais avant que le couple trouve une vie paisible, il faut qu’il vive dans un environnement adéquat, où les moyens de subsistance et d’éducation sont suffisants pour un meilleur vivre ensemble. Pour cela, tous les composants de la société doivent participer à la construction de cet environnement propice au vivre ensemble. Et on doit mettre les femmes à contribution, elles ne peuvent pas être ignorées dans le processus de développement de la communauté. Donc, il faut que les autorités donnent la priorité à l’éducation des filles. Il y a beaucoup de jeunes filles très intelligentes qui abandonnent subitement l’école sous la pression de la famille, parce qu’on leur a trouvé un mari. Il faut que les autorités donnent des instructions aux chefs d’établissements afin qu’elles suivent à la trace une jeune fille qui est toujours première de la classe et qui, du jour au lendemain n’assiste plus aux cours. Il faut la chercher et la faire venir poursuivre ses études, en menant un travail d’éducation auprès des parents.

www.tambacounda.info : Quelles circonstances vous ont amené à faire des études de commerce et marketing à l’ICD de Paris et une maîtrise en gestion des entreprises à l’université d’Evry?

Après un diplôme de technicien supérieur en commerce international à ETSHOS Dakar, j’ai fais mon premier stage chez Trade Point en marketing. À partir de cette expérience, j’ai eu goût à continuer mes études dans ce domaine. J’ai commencé mes recherches d’écoles et d’universités. Comme par hasard, ICD a envoyé des recruteurs au Sénégal et j’ai participé à leur test et j’étais admis à m’inscrire dans leur école. Mais, je n’ai pas été satisfait du stage que j’ai effectué après mes études à l’ICD. Ainsi, j’ai décidé de m’inscrire à l’Université d’Evry pour avoir la chance de faire un meilleur stage à la fin de cette étude. Après ma maîtrise, il y’a eu le système LMD. Et j’ai décidé de faire un master2.

www.tambacounda.info : Aujourd’hui vous vivez au Québec. Quelles circonstances vous ont amené au Canada?

À la fin de mes études en France, j’ai voulu travailler. Mais c’était très difficile de changer de statut sans trouver un travail dans son domaine d’études à l’époque. Ainsi, j’ai décidé d’aller tenter ma chance de trouver un emploi ailleurs. Et le Canada offrait cette possibilité. Par conséquent, j’ai saisi cette opportunité, ce qui fait que je vis actuellement au Canada, notamment au Québec.

www.tambacounda.info : Vous venez de publier un roman intitulé « UN DESTIN » aux éditions Le Net. Qu’est-ce qui vous a motivé à le faire ?

Le goût de l’écriture m’a toujours habité à travers mes lectures. Mais avoir le temps d’écrire est un problème en soi, surtout quand on est à l’aventure. Toutefois, j’ai toujours su que je publierai ce qui m’inspire dans la vie dès que le temps me le permet. Et c’est ce que j’ai fait.

www.tambacounda.info : Pourquoi le titre « UN DESTIN » ?

Le titre un Destin, c’est ce que j’ai trouvé de mieux pour correspondre au contenu du roman. Car les événements arrivent parfois sans explication. Et les personnages principaux, notamment Mabo qui a été la seule survivante de la famine, s’est retrouvée immédiatement face à l’inconnu et Fodé qui a eu deux folies, ne savait pas qu’il retrouverait Mabo et sa raison une seconde fois.

www.tambacounda.info : Ce roman sera t-il à disposition des tambacoundois qui souhaitent le lire ?

Effectivement, ce roman est disponible sur commande sur le site de l’éditeur www.leseditionsdunet.com, en version papier ou par téléchargement pdf. Par ailleurs, on peut le commander auprès des librairies au Sénégal qui feront la commande par la suite auprès de l’éditeur.

www.tambacounda.info : Vous êtes titulaire d’un master2 Conseil en entreprise. Comptez-vous mettre vos compétences au service du développement de votre région et de quelle manière?

Oui, je le faisais déjà, quand j’étais étudiant à Paris où j’ai créé une association intitulée, Association pour l’Initiative Privée en Afrique (AIPA) enregistrée à la préfecture de l’Essonne sous le numéro 0912014653 en 2007. J’avais émis l’idée, que les investisseurs doivent investir massivement dans l’agriculture, vu le potentiel de terre agricole disponible, et les multiples cours d’eau existants partout en Afrique et en particulier au Sénégal. Je suis convaincu, que le développement de l’agriculture au Sénégal, déclenchera son développement économique. Pour la région de Tambacounda, un investissement massif dans la rétention d’eau dans les bassins et la mise en valeur du fleuve Gouloumbou, peut aider les populations à travailler pour toutes les saisons. Ce qui impliquera une récolte en toute saison. Donc le travail en toute saison, c’est des revenus en toute saison et qui stimulera la consommation et favorisera encore de l’investissement et la création d’emploi, base même de la croissance économique. C’est dans ce sens que je compte participer au développement de ma région, en investissant dans l’agriculture.

www.tambacounda.info : Quels sont vos rapports avec les ressortissants tambacoundois de la diaspora ?

J’ai de très bons rapports avec mes anciens camarades de classes de Tambacounda, même si ces rapports restent des communications à distance via internet notamment. J’ai des nouvelles de Dr Idrissa Mbow via facebook, de Dr Seydou Kanté, qui était mon voisin quand j’étais élève à Tambacounda au quartier dépôt, je communique avec lui via Facebook, j’ai aussi les nouvelles de Talibo Sylla qui a écrit un bon roman paru aux éditions L’Harmattan, je communique aussi via Facebook, avec Baba Sow qui est ingénieur en informatique à Dakar. Certes nous n’avons pas encore initié de projet en commun pour la région, ce que je souhaite vivement un jour, mais on reste quand même en contact.

www.tambacounda.info : Quel rôle peuvent-ils/elles jouer en faveur de Tambacounda et quelles sont à vos yeux les limites de l’action menée depuis l’étranger pour votre région ?

Je pense que nous devons nous impliquer d’avantage dans le développement de la région. Notamment en identifiant les domaines d’investissement, et chercher des partenariats pour investir dans ces domaines et favoriser la création d’emploi pour les jeunes. L’heure des critiques pour critiquer est dépassée. Il faut passer à l’action. Il faut travailler pour le développement d’actions et non au développement d’idées sans actions.

Ce n’est pas souvent facile, vu les difficultés auxquelles l’on doit faire face dans certains pays d’accueil, notamment les discriminations à l’emploi et la peur de l’étranger par apport à sa culture d’origine ou à sa religion. Par ailleurs, il y’a le manque de temps dû à la routine du quotidien, mais aussi le manque de coordination des actions entre les ressortissants de la diaspora. Individuellement, ce n’est pas possible de mener des projets d’envergure. Aussi, dans nos pays d’origine, il manque de la fiabilité, pour ceux qui peuvent défendre de manière fiable et intelligente les projets initiés. Souvent, les gens n’ont pas cette vision à long terme des choses, ils pensent gagner toute de suite et dépenser de manière anarchique toute de suite, ce qui met en mal un projet en quelque sorte.

www.tambacounda.info : Quelles sont vos ambitions professionnelles et politiques ?

Mon souhait, c’est de voir toutes ces compétences de la diaspora se rassembler afin d’initier un projet commun qui nous permettra d’investir dans un domaine stratégique à Tambacounda, pour créer de l’emploi, pour qu’il y ait du travail, de la consommation et de l’investissement. Car le seul fait d’envoyer de l’argent uniquement et individuellement pour la consommation, ne stimulera que l’inflation avec son corollaire, la cherté de la vie. Donc, investissons ensemble dans les domaines stratégiques pour créer de l’emploi qui stimulera la consommation et la croissance.

Pour l’instant, je n’ai pas d’ambition politique, bien que j’ai milité à AJ-PADS avec les camarades Alassane Guissé que vous connaissez certainement à Tambacounda alors que j’étais secrétaire adjoint à la communication avec le camarade Moulay Aidara au bureau des étudiants AJ à Paris. Mais depuis les élections de 2007, j’ai pris mes distances par rapport au champ politique. Pour l’instant, je n’ai pas de projet en vue pour un éventuel retour.

www.tambacounda.info : Votre dernier mot ?

Merci, pour votre interview, et votre brillant travail à travers Tambacounda.info et de participer activement à la promotion de la région.