Bakel : La politique à la bakéloise, « Abada jin ga xurungon ta »

«  La politique m’apparaît comme une sinistre rigolade ». Je m’en vais encore emprunter cette citation à Simone  Weil pour décortiquer les plaies de la politique bakéloise. Depuis des années, la politique à la bakéloise est comparable à cet adage Soninké «  Abada jin ga xurungon ta. » ( Littéralement :  Une eau qui ne dépasse jamais les genoux. ». Les hommes passent mais les mauvaises pratiques perdurent. Elles ont pour nom : Copinage, promotion familiale, trahison, transhumance, alliance contre nature, mauvaise gestion… La liste est longue.

Oui ! Simone a raison. La politique est belle et bien une sinistre rigolade. Laissez moi vous conter cette simple anecdote pour apporter de l’eau à son moulin. «  Un jour de l’année 2004, mes amis d’enfance et moi avions été approchés par un responsable politique pour prêter main forte à sa délégation lors de sa rentrée politique. Nous étions chargés de dresser les tentes, de faire de la propagande et surtout de rallier d’autres jeunes à la cause de cette personnalité politique. Nous investîmes corps et âmes pour la réussite de l’évènement. Nous devînmes des « apprentis sorciers » pendant ce laps de temps.

Malgré les mises en garde du cercle familial, nous foncions têtes baissées. Le réveil fût dur et brutal à la tombée des prébendes. Les têtes de gondole qui avaient reçu les liasses d’argent avaient tout simplement roulé dans la farine les autres camarades sous prétexte que leur degré d’investissement n’était pas à la hauteur de l’évènement. Avec la bénédiction d’un roublard politique du quartier, nos amis d’enfance avec qui nous partagions tout, du caleçon au pantalon, ont piétiné la fibre amicale et fraternelle vieille de plus d’une décennie pour de l’argent. Incroyable mais vrai ! «  No sentiment en politique » fût notre slogan pour tourner en dérision nos camarades apprentis sorciers politiques. Une belle leçon qui ouvrit très tôt nos yeux pour prendre nos distances avec ce milieu « bizarre » où la moralité et la lucidité s’évaporent au gré des intérêts des uns et des autres. » Nous en rigolons aujourd’hui à chaque fois que nous parlons politique. Une manière de se dire «  La politique est une farce de mauvais goût où jouer de sordides tours semble être la règle ».

Après cette parenthèse, permettez-moi de faire une bifurcation pour analyser de manière « ramassée » la politique à la bakéloise. «  Sapé CPC ! », «  Mouniané -Mouniané »…résonnent encore dans ma tête comme si c’était hier. Ce sont de célèbres tubes de Demba DIARRA, préposé à l’animation des meetings de M. Cheikh Cissokho durant «  les 10 malheureuses » ( Années 90 – 00 ).  Des meetings politiques de haute facture qui faisaient courir une bonne partie de la population Bakéloise. Le Ps était un sacré parti politique qui avait fini de tisser ses relations dans toutes les couches de la société bakéloise.

Bakel avait le PS dans la peau. Bakel était « possédée » par le PS telle une femme avec son «  Djin amoureux ». Je revois encore les rutilantes 4X4 de M. Cheikh CISSOKHO et M. Ousmane N’DIAYE garer devant des maisons « maraboutiques », des maisons de notables et des leaders d’opinion de l’époque où des cadeaux de toute sorte se « bousculer ». C’était l’âge d’or du PS à Bakel où tout le monde était acquis à la cause socialiste. De manière directe ou indirecte, nous profitions tous de la « politique alimentaire » ( Militants de première heure, Militants de circonstance, Notables de quartier, Marabouts, leaders d’opinion, Jeunes…). Les populations leur rendaient bien la monnaie. La paire Cheikh-Ousmane a eu tous les honneurs à Bakel. Seulement, ils n’ont jamais honoré Bakel à la hauteur de la confiance aveugle qui leur fût accordée. Ils n’ont jamais pu extirper  Bakel de sa pauvreté. Quand le peuple s’est réveillé, ce fût une raclée. Pendant des années, ils cristallisèrent tous les rancoeurs bakéloises. De « politiciens adulés » , ils devinrent têtes de turcs. Des « punching ball » de toute une génération. Une perte de crédibilité qui précipitera le divorce entre Bakel et le régime socialiste.

La route fût balisée. De jeunes loups aux dents longues, longtemps restés dans l’ombre de ces mastodontes  politiques sortirent de la tanière pour redonner un nouveau souffle à la politique Bakéloise. Implantés localement ou retranchés à la capitale, ils se disputaient l’héritage politique, ragaillardis par d’anciens ténors politiques. L’avènement de l’alternance mit en orbite d’autres nouvelles têtes plus ou moins connues du public Bakélois.

Ouf !  Un renouveau ! Nous voilà enfin débarrassés de la bande de «  Diambas » ( Charognards en Soninké ) que l’on accusait de tous les péchés d’Israël. Finie la « politique alimentaire » ! Nous nous attendions à de nouveaux types de politiciens Bakélois. Des hommes politiques sereins capable de mettre les préoccupations des populations avant leurs intérêts crypto-personnels. Des hommes politiques fédérateurs capable de séparer le bon grain de l’ivraie. Des hommes politiques capable de mettre de l’ordre dans les rangs pour le progrès de cette «  maudite commune » qui semble être fâchée avec le progrès. Des hommes politiques capable de jouer «  Collectif » sans distinction de « classe sociale », de «  lieu de naissance », de « gueule »…

Hélas, plus d’une décennie plus tard, on s’aperçoit que la politique à la bakéloise n’a pas changé d’un iota. C’est un sempiternel  recommencement. « On prend les mêmes et on recommence. On change juste la couleur des maillots » résumerons-nous. Une nouvelle gangrène, jadis « pandémique»
, devenue « endémique ». Cette « gangrène » ronge le « patient Bakel ». Des unions contre nature qui donnent le tournis au « citoyen bakélois » que les politiciens s’efforcent à rendre corvéable à merveille, corruptible et immoral. Comme le dit ce proverbe : « Les fins justifient les moyens ».

L’autre axe du mal de la politique bakéloise est l’enchevêtrement entre Politique, Amitié et Famille. A Bakel, la politique  obéit à des logiques « absurdes ». Elle est devenue une affaire de « famille »  et d’amitié. Une telle relation tripartite ne fait jamais bon ménage. En politique, il faut le primat de la compétence sur les liens du sang ou de l’amitié. La conviction doit primer sur la sensibilité. Malheureusement, à Bakel, les « gueules » importent plus que les «  compétences » et les programmes. Plusieurs hommes qui prétendent aujourd’hui nous diriger seraient mis au placard depuis belle lurette n’eussent été le « laisser-aller » et l’amnésie «  Bakélois ».

Bakélois, bientôt les élections locales, de grâce ” Jin na dan gui xurungon” ! ” Béra Fayi Domi Fayi ” !

Samba KOITA dit EYO / bakelinfo.com/