Irak: Obama affirme étudier «toutes les options»

Les combattants jihadistes avançaient jeudi vers la capitale Bagdad après s’être emparés de larges territoires du nord-ouest de l’Irak face à une armée en déroute, les Etats-Unis n’excluant aucune option pour enrayer l’offensive.

Craignant un assaut contre Kirkouk, les forces kurdes en ont profité pour prendre le contrôle total de cette ville pétrolière que se disputent depuis des années la région autonome du Kurdistan et le gouvernement central.

Face à la tourmente dans laquelle est plongé le pays depuis la prise mardi de la deuxième ville d’Irak, Mossoul, de sa province Ninive, et de régions des provinces voisines de Kirkouk et Salaheddine, le président américain Barack Obama a affirmé que son équipe de sécurité nationale étudiait «toutes les options».

Ci-dessous, les images de la conférence de presse:

«Je n’exclus rien»

«Nous travaillons sans relâche pour identifier comment (…) fournir l’aide la plus efficace (aux autorités irakiennes). Je n’exclus rien», a-t-il ajouté, sans autres précisions. Les Etats-Unis, qui ont retiré fin 2011 leurs troupes d’Irak après huit ans d’engagement, pourraient envisager des frappes menées par des drones, avait indiqué plus tôt un responsable américain.

Le Conseil de sécurité de l’ONU tenait lui à huis clos des discussions sur cette offensive fulgurante de l’Etat islamique en Irak et au Levant (EIIL), un groupe également présent en force en Syrie qui ambitionne d’installer un Etat islamique dans la zone frontalière.

«Marcher sur Bagdad»

A Londres, le ministre irakien des Affaires étrangères Hoshyar Zebari a admis que les forces de sécurité s’étaient «effondrées» à Mossoul. Mais maintenant, «nous essayons (…) de bouter ces terroristes hors de nos villes principales», a-t-il indiqué. L’armée a d’ailleurs lancé des raids aériens sur Tikrit, le chef-lieu de Salaheddine tombé mercredi entre les mains des jihadistes, selon des témoins.

Dans un enregistrement sonore mercredi, l’un des dirigeants de l’EIIL, Abou Mohammed al-Adnani, avait appelé les insurgés à «marcher sur Bagdad».Jeudi, ils étaient à 90 km au nord de la capitale, après s’être emparés de Dhoulouiya, selon un policier et des habitants.

La population dans la peur et l’attente

A Bagdad, l’appréhension régnait. «La population se sent livrée à elle-même, sans protection», s’est inquiété Abou Alaa, un verrier de 54 ans. L’EIIL a d’ailleurs revendiqué sur Twitter les attentats anti-chiites qui ont fait mercredi plus de 30 morts à Bagdad et annoncé une nouvelle vague d’attaques.

Face à la débandade de l’armée, qui n’est pas parvenue à se reconstruire après la dissolution de celle de Saddam Hussein en 2003, le Premier ministre Nouri al-Maliki a appelé «toutes les tribus à former des unités de volontaires» pour combattre avec ses forces les insurgés.

Illustrant la crise politique qui paralyse le pays depuis des mois, la session du Parlement qui devait se réunir pour décréter l’état d’urgence a été annulée, faute de quorum.

L’EIIL, un des groupes «les plus dangereux du monde»

Outre des territoires du nord, l’EIIL, considéré comme l’un des groupes «les plus dangereux au monde» par Washington, contrôle déjà des régions de la province occidentale d’Al-Anbar depuis janvier.

A Mossoul, les jihadistes continuaient de détenir une cinquantaine de citoyens turcs pris en otages au consulat, de même que 31 chauffeurs turcs.Environ un demi-million d’habitants de Mossoul ont fui leurs foyers, craignant pour leur vie.

A Kirkouk, c’est la première fois que les forces kurdes contrôlent totalement cette ville pluriethnique où la sécurité est habituellement assurée par une force de police conjointe formée d’éléments arabes, kurdes et turcomans. En plus de Kirkouk, elles ont pris le contrôle des autres territoires disputés avec Bagdad, selon un responsable des Peshmergas.

La Russie y voit un «échec total» américain

Le ministre kurde chargé des Peshmergas, Jaafar Moustafa, a cependant échappé à un attentat dans la province de Kirkouk qui a fait un mort, selon un autre responsable.Et un photographe est mort dans des combats entre Peshmergas et jihadistes près de Kirkouk, selon un médecin.

Pour la Russie, les derniers développements illustrent «l’échec total» de l’intervention américaine et britannique en Irak en 2003. L’Iran chiite, allié de M. Maliki, a lui promis de «lutter contre le terrorisme» en Irak, sans dire comment il comptait faire.

L’EIIL tient de larges secteurs syriens

Le ministre français des Affaires étrangères Laurent Fabius a estimé pour sa part que l’avancée jihadiste mettait «gravement en danger l’unité» de l’Irak, appelant les responsables irakiens à apporter une «réponse politique» à cette situation. L’EIIL, qui compte de nombreux combattants étrangers selon des analystes, reçoit l’appui de tribus anti-gouvernementales et jouit d’un certain soutien parmi la minorité sunnite qui s’estime marginalisée et persécutée par le pouvoir chiite.

Selon Riad Kahwaji, directeur de l’Institute for Near East and Gulf Military Analysis, au moins 10’000 à 15’0000 jihadistes sont présents dans le nord de l’Irak. L’EIIL s’est infiltré, via la frontière très poreuse, en Syrie où il tient de larges secteurs de la province de Deir Ezzor (nord-est). Il y combat aujourd’hui d’autres groupes rebelles qui l’accusent de multiples exactions

(afp/Newsnet)