VIOLENCES: Boko Haram intensifie ses attaques au Nigeria

Au moins 80 personnes ont été tuées mercredi à Kaduna, une ville du nord du Nigeria, dans deux attentats successifs visant un dignitaire musulman très critique de Boko Haram et un ancien chef de l’Etat, déjà menacé plusieurs fois par le groupe islamiste, et qui sont sortis indemnes des deux explosions.

Boko Haram a encore intensifié ces dernières semaines le rythme effréné de ses attaques au Nigeria, multipliant les massacres de civils, les attentats sanglants et les enlèvements dans son fief du Nord-Est mais aussi dans le reste du pays.

Les attentats visaient des critiques de Boko Haram

Deux attentats à la bombe ont fait 82 morts mercredi à Kaduna (nord du Nigeria), apprend-on auprès des secours. Le premier a visé les fidèles d’un imam modéré, Sheikh Dahiru Bauchi, venus l’écouter dans la rue: 32 personnes sont mortes. Une deuxième explosion sur un marché de la ville a fait 50 morts.

Le kamikaze a actionné ses explosifs en pleine rue alors que des milliers de croyants étaient rassemblés sur une place autour du convoi de Dahiru Bauchi, imam modéré et populaire et très critique du groupe islamiste Boko Haram dont il condamnait publiquement la violence. Les fidèles étaient rassemblés pour la cérémonie de clôture d’une fête musulmane autour du dignitaire, qui a été épargné.

Un second attentat contre un opposant

Environ deux heures plus tard, un deuxième attentat a tué au moins 50 personnes dans le quartier animé de Kawo, en périphérie de Kaduna, un endroit abritant plusieurs marchés et de nombreux arrêts de bus, proche d’une caserne militaire.

Selon Ahmed Maiyaki, le porte-parole du gouverneur de l’Etat de Kano, l’attentat de Kawo visait Muhammadu Buhari, dirigeant militaire du Nigeria entre 1983 et 1985 et actuel chef de l’opposition, au sein du Congrès progressiste (APC), qui en est sorti sain et sauf.

Les critiques menacés

Ces deux attentats n’ont pas été revendiqués par Boko Haram dans l’immédiat. Mais le groupe islamiste, qui revendique la création d’un Etat islamique dans le nord du pays – majoritairement musulman – a déjà tenté d’assassiner plusieurs dignitaires religieux dans cette région, accusés de se soumettre à l’autorité du gouvernement fédéral, actuellement dirigé par le président Goodluck Jonathan, un chrétien du Sud.

Aussi, Sheikh Dahiru Buhari a été menacé à plusieurs reprises par Abubakar Shekau, le chef de Boko Haram, dans des vidéos publiées par le groupe islamiste.

Couvre-feu immédiat

Le gouverneur de l’Etat de Kaduna a imposé mercredi, en fin de journée, un couvre-feu immédiat de 24 heures dans la ville, dans le but «d’empêcher des troubles de l’ordre public».

Kaduna – qui a été la capitale politique du nord du Nigeria – a été relativement épargnée par Boko Haram depuis un an. Mais des attentats suicide contre des églises, attribués au groupe islamiste en 2012, avaient marqué le début de violents affrontements intercommunautaires dans la ville, qui avaient fait des centaines de morts.

Des civils massacrés

En dépit du lancement d’une vaste offensive militaire en mai 2013 et de l’instauration de l’état d’urgence dans trois Etats dans le nord-est du pays, pour tenter de mettre fin à cinq ans d’insurrection islamiste qui ont déjà couté la vie à plus de 10’000 personnes, les attaques de Boko Haram ont encore gagné en intensité ces dernières semaines.

Le groupe extrémiste a détruit des villages entiers dans le nord-est, massacrant des civils sans défense, et a également mené des attaques contre de grandes villes.

Abuja, la capitale du Nigeria – premier pays producteur de pétrole en Afrique – a été la cible de trois attentats sanglants en trois mois, et un double attentat a fait 118 morts à Jos, la capitale de l’Etat de Plateau, dans le centre du pays, en mai.

2053 victimes civiles en 2014

Selon un récent rapport de Human Rights Watch, il y a déjà eu 95 attaques qui ont fait au moins 2053 victimes civiles en 2014 — d’autres organisations évoquant même des bilans plus importants.

Le président Goodluck Jonathan a demandé la semaine dernière l’approbation du parlement pour solliciter un prêt à l’étranger allant jusqu’à un milliard de dollars (730 millions d’euros) afin de combattre les islamistes.

Les élections approchant, Goodluck Jonathan, déjà très critiqué pour n’avoir pas su juguler l’insurrection islamiste et pour avoir tardé à réagir suite à l’enlèvement, mi-avril, de plus de 200 lycéennes à Chibok, dont on est toujours sans nouvelles plus de trois mois plus tard, est de plus en plus sous pression.

(afp/Newsnet)