A Hong Kong, les manifestants font monter la pression

 

Un face-à-face tendu opposait, jeudi 1er octobre, la foule des manifestants prodémocratie à la police devant les bureaux du chef de l’exécutif de Hong Kong, cible d’un nombre sans cesse croissant d’appels à la démission.

Aux premières heures de la journée, ils étaient environ 200 policiers casqués, un masque à gaz sur le visage et un bouclier à la main à être alignés derrière des barrières métalliques. De l’autre côté, plus de 3000 contestataires s’étaient massés, certains disant vouloir pénétrer dans le bâtiment de l’administration de Leung Chun-ying, le numéro un de cette ex-colonie britannique.

Ceux-ci ont hurlé en direction des forces de l’ordre et scandé des slogans en faveur du départ du chef de l’exécutif local qu’ils accusent d’être à la solde de Pékin.

«Nous voulons lui parler face-à-face»

«Nous essayons d’encercler tout le complexe abritant le gouvernement et nous attendons qu’il (Leung Chun-ying) revienne au travail vendredi», jeudi étant un jour férié, a expliqué à l’AFP Thomas Choi, un des manifestants, avant de lancer : «Nous voulons lui parler face-à-face».

«Nous envisagerons plusieurs actions différentes dans les prochains jours, comme occuper d’autres endroits, tels des bureaux du gouvernement», a pour sa part déclaré un des dirigeants du mouvement estudiantin, Agnes Chow.

La veille, des dizaines de milliers de contestataires avaient fait une démonstration de force en occupant de nouveau le cœur même de Hong Kong à l’occasion du jour de la fête nationale chinoise.

Plus nombreux que jamais

Ayant ainsi marqué à leur manière le 65e anniversaire de la République populaire de Chine, ces manifestants, plus nombreux que jamais mercredi, même si aucune évaluation fiable n’a été fournie, exigent l’instauration du suffrage universel plein et entier en 2017.

Un des responsables de la principale coalition des contestataires, Occupy Central, a à cette occasion fermé la porte à toute négociation avec Leung Chun-ying.

«Nous pouvons parler avec n’importe quel membre du gouvernement, sauf avec lui», a ainsi martelé Chan-Kin-man.

La plus grave crise politique depuis 1997

La campagne de désobéissance civile qui couvait depuis plusieurs semaines à Hong Kong s’est brusquement intensifiée ces derniers jours, provoquant la plus grave crise politique depuis la rétrocession par Londres de ce territoire à la Chine en 1997.

Les meneurs des manifestations cherchent toutefois à éviter une répétition des violences de dimanche lorsque la police antiémeute avait tenté de déloger les manifestants en faisant usage de gaz lacrymogène et de gaz au poivre.

Les jeunes en première ligne

Mais ce sont les étudiants et les lycéens qui battent inlassablement le pavé et occupent les quartiers vitaux de la ville et ils répondent en premier lieu aux mots d’ordre de leurs leaders.

D’après le Wall Street Journal, le gouvernement entend jouer la montre en espérant que les contestataires se lasseront. Pékin, affirme le journal, a expressément interdit à Leung Chun-ying de recourir à la force.

«Pékin a été clair avec C.Y (Leung). Vous ne pouvez ouvrir le feu», a indiqué le quotidien. «Vous devez y mettre fin pacifiquement».

Fort retentissement à l’étranger

Il faut dire que «la révolution des parapluies» (une allusion aux parapluies multicolores déployés dimanche contre le gaz utilisé par la police) connaît un fort retentissement à l’étranger où la presse ose parfois la comparaison avec la répression du mouvement démocratique de Tiananmen en 1989, et Pékin marche sur des œufs.

Quelque 1000 personnes se sont à cet égard réunies à Taipei, 300 à Auckland, en Nouvelle-Zélande, et d’autres meetings ont eu lieu à Paris, Londres et Washington notamment.

Leung Chun-ying n’a pas fait explicitement allusion au mouvement prodémocratie dans le discours qu’il a prononcé pour la fête nationale chinoise, se bornant à appeler à la coopération avec la Chine.

«Le développement de Hong Kong et celui du continent (la Chine, NDLR) sont étroitement liés. Nous devons travailler main dans la main pour que le rêve chinois devienne réalité», a clamé M. Leung.

«Bien sûr que le peuple de Hong Kong doit travailler avec Pékin», a rétorqué Edward Chun, un leader d’Occupy Central. «Mais ils (les dirigeants chinois) ne peuvent pas contraindre Hong Kong à une démocratie fallacieuse. On n’est pas au Tibet ni au Xinjiang», régions chinoises en proie à des troubles, a-t-il jugé.

Sans mentionner Hong Kong, le président chinois Xi Jinping a juré mardi d’éradiquer «toutes les tumeurs qui se développeraient sur le corps sain» du Parti communiste chinois (PCC).

Selon des associations de défense des droits de l’Homme, les autorités chinoises ont arrêté une dizaine de dissidents et ont interrogé une soixantaine de personnes qui avaient exprimé leur soutien aux manifestants.

«La répression dont sont la cible des militants en Chine éclaire les raisons pour lesquelles tant d’habitants de Hong Kong craignent le contrôle grandissant de Pékin sur les affaires de la ville», a écrit Amnesty International, tandis que Chris Patten, le dernier gouverneur de la colonie britannique de Hong Kong, a appelé à «un vrai dialogue» en vue de répondre aux «aspirations légitimes» des contestataires.

«Le gouvernement chinois a très fermement et très clairement fait connaître sa position : les affaires de Hong Kong sont les affaires intérieures de la Chine», a répliqué à Washington Wang Yi, le chef de la diplomatie chinoise, avant ses entretiens avec son homologue américain John Kerry.

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(afp/Newsnet)