NÉGOCIATIONS: Moment de vérité pour le nucléaire Iranien

Il y a un an, les négociateurs avaient convenu à Genève d’un accord temporaire, première étape vers la résolution d’un conflit qui dure depuis une décennie. Alors que cette fenêtre doit se refermer, des diplomates français, britanniques, russes, chinois, allemands, mais surtout iraniens et américains sont à nouveau réunis à Vienne pour tenter d’arracher un compromis définitif: un programme nucléaire iranien limité à une utilisation civile contre la levée des sanctions économiques internationales contre Téhéran.

Ce vendredi, à deux jours de la date butoir, les indicateurs se sont agités. Après une discussion avec son homologue américain John Kerry et la cheffe de la diplomatie européenne Catherine Ashton, le ministre des Affaires étrangères iranien Javad Zarif a laissé entendre en fin de matinée qu’il rentrerait à Téhéran le soir même, suivi de près dans sa décision de quitter Vienne par John Kerry.

Mais aux environs de quinze heures, nouveau coup de théâtre, Javad Zarif déclare finalement rester à Vienne. Alors qu’il rencontre successivement les ministres français et britannique Laurent Fabius et Philip Hammond, des bruits courent dans les antichambres: John Kerry a-t-il quitté le Palais Coburg, où se tiennent les négociations? Certains diplomates iraniens ne sont-ils pas en route pour Téhéran? Pourquoi la réservation du billet d’avion de Javad Zarif n’a-t-elle pas encore été annulée? Vienne devient la scène d’un vaudeville international.

«Ce serait plutôt un bon signe si Javad Zarif s’envolait pour Téhéran», explique Gudrun Harrer, chargée de cours à l’Académie diplomatique de Vienne, «il est évident qu’en cas d’avancée décisive, le ministre des Affaires étrangères devra consulter de vive voix le pouvoir à Téhéran». L’hypothèse inverse d’une rupture des négociations semble très improbable.

Cependant, le compromis pourrait se faire attendre encore un peu. Après tout, l’arrangement temporaire de Genève a déjà été prolongé au mois de juillet dernier, il pourrait l’être à nouveau. Demain ou dans une quinzaine de jours, le dénouement pourrait quoi qu’il en soit arriver assez rapidement. Gudrun Harrer explique: «Les conditions sont meilleures aujourd’hui qu’elles ne le seront à partir de janvier, lorsque Barack Obama devra compter avec un congrès dominé par l’opposition.» Lors de son élection, le président américain s’était engagé à mener son pays sur la voie de la réconciliation avec l’Iran. Un objectif qui lui tient aujourd’hui d’autant plus à cœur que Téhéran serait un allié précieux dans la lutte contre les terroristes du groupe Etat islamique en Syrie et en Irak.

Du côté iranien, c’était l’élection du plus modéré Hassan Rohani à l’été 2013 qui avait suscité l’espoir d’une détente. «En Iran, la population croit aujourd’hui à cent pour cent qu’un accord définitif va venir», selon Gudrun Harrer, «les espoirs sur ce que pourrait changer une réconciliation avec l’Occident sont grands, mais il ne faut pas se leurrer: Rohani devra donner des contreparties aux mollahs».

À Vienne, alors que les politiques multiplient les coups de poker, c’est plutôt à un mikado technique que se livrent les diplomates. Car, pour permettre à l’Iran de poursuivre un programme nucléaire civil tout en fournissant des garanties de son pacifisme à l’Occident, il faudra inventer un système de contrôle très créatif.

(24 heures)