PAROLES DE REBELLES: «C’est compliqué de repousser les ados qui veulent prendre les armes»

La Syrienne Ghalya Naamat, le Philippin Von Al Haq et le Birman Saw Aung Win Shwe ont participé la semaine dernière à la conférence de groupes rebelles mises sur pied par l’Appel de Genève. Ils témoignent des défis qui attendent les mouvements cherchant à protéger les populations civiles, et en particulier les mineurs.

Ghalya Naamat, porte-parole de la branche féminine de la milice kurde de Syrie (YPJ), dont elle est également ministre adjointe de la Défense:

«C’est après une attaque du front Al-Nosra (ndlr: branche d’Al-Qaida en Syrie) que nous nous sommes organisées en brigades féminines pour se défendre. Au début, nous n’étions pas très fortes, mais on s’est vite rendu compte que les djihadistes de Nosra et de Daech (ndlr: le groupe Etat islamique) nous fuyaient pour ne pas être tués par des femmes. Ils croient que ça les mènera en enfer! Franchement, j’aimerais retourner au front. On m’a nommée porte-parole, mais je trouve ça frustrant. Nous voulons toutes défendre nos gens. C’est pour ça que c’est difficile de faire comprendre aux adolescents pourquoi nous refusons qu’ils s’enrôlent. Et pourquoi il ne faut pas qu’ils aillent proposer leurs bras à d’autres milices!»

Von Al Haq, porte-parole des forces armées du Front islamique de libération Moro (aux Philippines):

«La religion nous oblige à respecter nos engagements. D’ailleurs, tout ce que nous avons signé est parfaitement en accord avec le Coran, qui impose de respecter les enfants et les femmes. Voilà pourquoi nos combattants n’ont eu aucun mal à l’accepter. Par contre, les guérilleros combattant dans des régions reculées n’ont pas toujours reçu une formation. Moi-même, j’ai pris les armes quand j’avais 16 ans. Enfants et femmes se joignaient à la révolution. Ce n’est que plus tard que des lignes de conduite ont été édictées. Je vous assure que notre chaîne de commandement les fait respecter.»

Saw Aung Win Shwe, ministre des Affaires étrangères de l’Union nationale Karen (minorité de Birmanie):

«Je viens d’un village très reculé. J’ai grandi sans mon père, qui était à la guerre. Nous devions nous déplacer tout le temps, je n’ai pas pu aller à l’école. J’ai vu beaucoup d’atrocités commises par les soldats birmans sur des enfants et des vieillards. On nous accuse souvent d’utiliser des enfants soldats, mais ce n’est pas vrai. Comme nos camps sont proches des villages, nous recueillons beaucoup d’orphelins venus réclamer de l’aide. Nous les mettons à l’école. C’est important que des gens de l’Appel de Genève viennent vérifier par eux-mêmes. Et puis c’est vrai qu’il y a des cas d’adolescents qui rejoignent nos forces… C’est vraiment compliqué.»

(24 heures)