Paris: Trois suspects d’un attentat identifiés 32 ans après

 

Cette décision du juge d’instruction français Marc Trévidic, moins de deux mois après une attaque contre un magasin casher de Paris (quatre morts), a été saluée comme «un message fort lancé à tous les terroristes» par la Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme (Licra). Elle sera cependant difficile à mettre en œuvre, deux des trois suspects de l’attentat se trouvant au Proche-Orient.

Le 9 août 1982 à la mi-journée, une grenade avait été jetée dans un célèbre restaurant de la rue des Rosiers, Jo Goldenberg, explosant au milieu d’une cinquantaine de clients. Deux tueurs étaient ensuite entrés, ouvrant le feu.

Composé de trois à cinq hommes armés, selon une source proche du dossier, le commando avait ensuite remonté la rue très fréquentée par les Juifs de la capitale française, vidant en direction des passants les chargeurs de leurs pistolets-mitrailleurs.

Bilan de cette attaque qui aura duré trois minutes: six morts et 22 blessés. Il s’agit encore à ce jour de l’attentat antisémite le plus meurtrier en France depuis la fin de la 2e guerre mondiale.

Enquête de longue haleine

L’opération est attribuée à un groupe palestinien dissident de l’OLP, le Fatah-Conseil révolutionnaire (Fatah-CR) d’«Abou Nidal», décédé en 2002 dans des circonstances mystérieuses.

Dans cette enquête très ancienne, ce sont des témoignages anonymes qui ont permis l’identification des trois suspects, des anciens du groupe d’Abou Nidal, après un travail de longue haleine d’un enquêteur de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), a indiqué mercredi une source judiciaire.

Deux des trois hommes sont soupçonnés d’avoir fait partie du commando, a précisé la source. Il s’agit de Mahmoud Khader Abed Adra alias «Hicham Harb», 59 ans, qui vit aujourd’hui à Ramallah, en Cisjordanie, et de Walid Abdulrahman Abou Zayed, alias «Souhail Othman», 56 ans, qui vit en Norvège.

Le troisième est Souhair Mouhamad Hassan Khalid al-Abassi, alias «Amjar Atta», 62 ans. Cet homme installé en Jordanie est soupçonné d’avoir supervisé l’attaque. Il était le numéro 3 du «comité des opérations spéciales» du Fatah-CR, un comité dirigé par «Abou Nizar», le bras droit d’«Abou Nidal».

Le 20 février, le juge antiterroriste Marc Trévidic, qui avait récupéré cette enquête instruite auparavant par un autre juge, Jean-Louis Bruguière, a délivré trois mandats d’arrêt à diffusion internationale contre ces hommes.

Un message aux terroristes

«Il s’agit d’un message extrêmement fort lancé à tous les terroristes, à tous ces assassins, qui montre que plus de trente ans après, on fera tout pour les arrêter, on fera tout pour les juger», a déclaré Me Alain Jakubowicz, président de la Licra, partie civile dans le dossier.

«On dit aux victimes qu’on ne les a pas oubliées et qu’on fera tout pour que justice soit rendue», a-t-il ajouté, en précisant que le juge réunirait lundi les parties civiles dans cette affaire.

«La question de l’exécution de ces mandats d’arrêt est très délicate», a cependant relevé l’avocat.

L’enquête avait longtemps piétiné sans connaître d’avancée notable, hormis la découverte d’une des armes de l’attentat dans un bosquet du bois de Boulogne, à Paris.

En 1982, la France résonnait déjà des soubresauts du conflit au Proche-orient, des luttes opposant Israéliens et Arabes, ou Arabes contre Arabes. Deux ans plus tôt, quatre personnes avaient trouvé la mort dans un attentat devant une synagogue rue Copernic. L’auteur présumé de cet attentat, le Libano-Canadien Hassan Diab, a finalement été mis en examen et écroué en novembre après son extradition du Canada.

Le dernier attentat antisémite en France remonte au 9 janvier, quand un djihadiste, français a tué quatre personnes dans un magasin casher de Paris. Cette attaque, précédée deux jours plus tôt par celle contre le journal satirique Charlie Hebdo (12 morts), a conduit le gouvernement à prendre d’importantes mesures de sécurité dont le déploiement de plus de 10’000 militaires.

(afp/Newsnet)