[ENTRETIEN] Plus loin avec… Hamidou Diallo, cadre et responsable de l’APR à Bakel

Bakel, un département aux nombreux défis. Le vaste territoire de l’Est du Sénégal semble être oublié et laissé à lui-même par les différents régimes qui se sont succédé à la tête du pays. Aucun investissement en infrastructures économiques dignes de ce nom. Les seules réalisations qui comptent, infrastructures sanitaires et scolaires notamment, sont pour la plupart l’œuvre des populations. Sur ce mal profond qui ronge Bakel, Hamidou Diallo, le coordonnateur de la Convergence des cadres républicains (Ccr) du département de Bakel, le parti au pouvoir, met le doigt sur les maux. Il évoque aussi la volonté et les efforts du régime en place pour apporter des solutions. Sur la question de la réduction du mandat du Président Macky Sall à 5 ans, Monsieur Diallo se dit favorable. Toutefois, il demeure convaincu que le Sénégal gagnerait plus en légiférant, dans le futur, pour un mandat présidentiel de 7 ans. Dans cette interview accordée à soninké.tv, Hamidou Diallo se prononce aussi sur l’emploi des jeunes et ses activités personnelles, en dehors de la politique.

Entretien…

Monsieur Diallo, vous êtes présent sur la scène publique. On vous entend sur les questions politiques et vous êtes présent dans les activités en rapport avec le département de Bakel. Qui est Hamidou Diallo ?

Avant de répondre à votre question, permettez-moi de profiter de cette opportunité qui m’est offerte, pour d’abord présenter mes condoléances à toute la Umma. Le Monde musulman dans sa globalité et dans sa diversité vient d’être fortement endeuillé par cette tragédie qui vient de le frapper de plein fouet lors du Hajj dernier. Aux familles sénégalaises qui ont été touchées, et Dieu sait, elles sont nombreuses, je leur présente mes condoléances. Ces morts, on ne les pleure pas, ils sont au Paradis, car le drame est survenu à la fin du Hajj. Ainsi soit-il. Amin.

Je tiens également à féliciter très chaleureusement toutes les femmes et les hommes qui ont contribué activement ou passivement à la création de Soninké.tv. Comme j’ai eu à le dire, après l’avoir visité pour la première fois, à travers ce portail, vous donnez enfin une voix aux Soninkés, à cette brave communauté qui a toujours choisi de vivre ses joies et ses peines dans la discrétion totale. Je le visite chaque matin. C’est ainsi que j’ai pu constater que Soninké.tv est véritablement un canal performant de communication et d’information.

Maintenant, pour répondre à votre question, je m’identifie comme étant un Sénégalais soucieux, globalement, de l’avenir de son pays, et spécifiquement de celui de son terroir, le département de Bakel. Pour cette raison, je m’investis en permanence, soit seul, soit aux côtés de toutes les femmes et tous les hommes qui nourrissent sincèrement la même préoccupation que moi, à mener toutes les actions qui contribuent au développement du Sénégal de façon générale.

Parlez-nous du secteur d’activité dans lequel vous évoluez?

En ma qualité d’Expert-comptable, Je suis principalement dans le secteur de l’audit et du conseil au profit des entreprises. Je suis également dans l’enseignement et la formation professionnelle, à travers l’institut dénommé ISPM que j’ai ouvert à Keur Massar depuis septembre 2005. A ce niveau, j’ai la chance, chaque année, de contribuer activement à la formation et à l’insertion de plusieurs jeunes de cette banlieue.

Comment êtes-vous arrivé à la profession de comptable?

L’amour, la passion d’un métier. La profession de comptable m’avait passionné depuis ma tendre jeunesse. Alors je me suis lancé dans la formation, diplôme après diplôme jusqu’à l’expertise comptable. Après 3 années de stage validé, j’ai ouvert mon cabinet. Dieu merci, je vis bien de ma profession.

De plus en plus de jeunes sortent des écoles de formation mais, une fois leur diplôme en poche, ils peinent souvent à trouver un emploi. En tant que formateur, quel conseil leur donneriez-vous ?

Malheureusement, c’est une réalité et elle est regrettable. Les pouvoirs publics sont entrain de faire des efforts à travers divers programmes. Mais, dans aucun pays au monde l’Etat n’est créateur principal d’emplois. C’est pourquoi, des dispositions sont prises, par les autorités, pour favoriser l’auto-emploi et la création d’entreprises, à travers, notamment, l’Agence pour la Promotion des Investissements et des Grands travaux (Apix) et d’autres structures, en général des Agences dédiées, sous la tutelle de différents ministères. Les structures de formation doivent aussi prendre en compte cette réalité, en faisant en sorte qu’au-delà d’une formation de qualité, que les étudiants soient bien armés pour affronter le marché de la production et de la créativité, au lieu d’être attentistes une fois le diplôme décroché.

Monsieur Diallo, vous êtes aussi un homme politique. Qu’est ce qui a motivé votre engagement ?

C’est le développement de Golmy qui a motivé mon engagement politique. C’est le développement du département de Bakel qui est à la base de mon engagement politique. Vous avez remarqué et même déploré si je ne m’abuse, l’ignorance, je dirais le mépris que le département de Bakel n’a cessé de subir de la part des régimes qui se sont succédé à la tête du Sénégal, depuis l’indépendance. Cette situation nous interpelle tous en tant que fils de ce département. En réalité, nous sommes tous des hommes politiques.

En effet, la politique peut se définir comme étant l’art de gérer, de développer la cité. Cette cité peut être réduite à la dimension d’une maison, comme elle peut également s’élargir au rang d’une commune, d’un département voire d’une nation. Le développement de la cité incombe à toutes les âmes qui y vivent, chacune à la limite de ses compétences et de ses moyens, vu sous cet angle, vous voyez bien que nous sommes tous des hommes politiques, même si on peut distinguer deux types d’hommes politiques:
Il y a d’une part, Les hommes politiques qu’on peut qualifier de passifs. Il s’agit de citoyens non engagés, qui se contentent de s’acquitter consciencieusement de la bonne marche de la station qu’ils occupent dans la gestion de la vie de la nation, généralement pour leur bien-être personnel ainsi que celui de leur famille. Exemple : un instituteur dans sa classe, un fonctionnaire dans son service, un agriculteur dans sa parcelle, un avocat dans son étude ou un expert-comptable dans son cabinet.
D’autre part, il y a les hommes politiques engagés. Ce sont ceux-là qui ont fait le choix, de s’investir pour l’intérêt général, pour le développement de la communauté à laquelle ils appartiennent, tout en étant, par ailleurs, des hommes politiques passifs au sens de ma précédente définition.

Vous êtes responsable de l’Alliance pour la République (APR), le parti au pouvoir, au niveau de Bakel. Pouvez-vous nous dire ce que l’Etat a fait concrètement pour ce département depuis l’arrivée du Président Macky Sall au pouvoir en 2012 ?

Je suis responsable en raison des activités que j’ai eu à mener pour que l’APR accède au pouvoir à travers son Président, Monsieur Macky Sall. N’étant pas aux affaires, je ne peux répondre à cette question que sur la base de constats, donc d’existants.

Sans aucune démagogie de ma part, je trouve très sincèrement que Macky est un homme de parole. Depuis son accession à la magistrature, il a changé la face du Sénégal tout entier.

J’ai soutenu le candidat Macky parce que, comme tous les sénégalais, j’avais fondé un espoir sur lui. Spécifiquement, dans le cadre des tournées qu’il faisait à travers le Sénégal avant d’être Président de la République, Il avait consacré une journée entière de visite à laquelle j’avais pris part dans la communauté rurale de Ballou d’alors. D’Amaji à Kounghany, village après village, partout où il est passé, il a écouté les doléances des populations. Ces doléances tournaient essentiellement autour des problèmes d’enclavement, de santé, d’éclairage domestique et public et d’accès à l’eau potable. Il a pris des engagements fermes de faire de ces préoccupations ses priorités s’il accédait à la tète de l’Etat. Et quand j’ai reçu quelques temps après le programme yonnu yokute, j’ai constaté que ces préoccupations en constituaient les premiers piliers, à savoir :
 mettre fin aux injustices sociales ;
 assurer des fondements solides du développement. économique

Après un peu plus de 3 ans à la tète de l’Etat, j’ai constaté que le Président Macky n’a pas varié dans ses choix stratégiques pour développer le Sénégal. Il est resté conforme à son programme, quelque soit, par ailleurs, l’appellation que ce programme puisse prendre. Dés son arrivée, il semble avoir fait le pari de mettre un terme à la précarité. Aujourd’hui, partout au Sénégal, la Bourse familiale permet d’améliorer les conditions de vie de milliers de familles. La Couverture Maladie universelle facilite, pour sa part, l’accès aux soins de santé. Ce programme permettant à tous les Sénégalais d’avoir accès à des soins de qualité, est en train de se renforcer avec la création des mutuelles de Santé dans toutes les localités du pays. Sur le plan macro économique, les réalisations les plus visibles sont : l’accès à l’eau potable. Des forages ont été dressés partout pour alimentr les villages en eau potable. A Golmy, par exemple, chaque maison possède son robinet dans un coin, mettant ainsi un terme aux longues files matinales des femmes vers le fleuve. Par contre, des efforts restent à faire pour le désenclavement du département de Bakel. Par rapport aux attentes des populations et des difficultés qu’elles rencontrent pour se déplacer ou pour se soigner, il n’est pas exagéré de dire que rien n’est encore fait. D’ailleurs, le Chef de l’Etat en est très conscient, et des projets sont en cours. Le PUDC qui est un programme d’urgence pour combler les inégalités territoriales est en train d’être mis en œuvre. Et nous sommes persuadés que Bakel ne sera pas oublié.

Bakel est parmi les départements les plus mal lotis du pays en termes d’infrastructures et de création d’emplois pour les jeunes notamment. Est-ce qu’il y a des projets en cours ou envisagés pour répondre à ces attentes ?

Bakel est resté oublié pendant très longtemps. C’est pourquoi le fossé est énorme entre lui et le reste du pays en termes d’infrastructures. Heureusement, les populations ne sont pas restées les bras croisés et à attendre pendant tout ce temps. Grace aux émigrés, chaque village a pu construire son poste de santé, son bureau de poste, ses établissements scolaires, ses mosquées, entre autres. Des sommes énormes ont été mobilisées pour ces travaux.
Maintenant, les choses ont changé. Bakel n’a pas encore son université mais Bakel sort petit à petit de l’oubli. Toutefois, des efforts restent à faire de la part du gouvernement, pour ce qui est, notamment, des infrastructures routières et les pistes de production, le relèvement du plateau technique du centre de santé de Bakel qui accueille en dehors des patients sénégalais d’autres en provenance des pays limitrophes, le Mali et la Mauritanie. L’emploi des jeunes et l’appui aux femmes dans les activités génératrices de revenus sont aussi des attentes fortes.. Le gouvernement est vraiment attendu sur ces volets. Des efforts additionnels doivent être consentis.

J’ai eu à le dire en d’autres circonstances, je vais me permettre de le dire à nouveau car j’y attache du prix. J’invite solennellement le Président à plus d’attention pour les chefs religieux du département de Bakel. En raison de leur statut, ils ont besoin de se déplacer, de voyager au Sénégal, en Afrique voire en Europe et à travers le Monde. Pour cela, ils rencontrent beaucoup de difficultés. A l’instar de leurs homologues d’autres départements, l’appui du Gouvernement leur est nécessaire.

Le débat au sein de votre parti et de la classe politique de façon générale, c’est la réduction ou non de la durée du mandat du président Macky Sall de 7 à 5 ans comme il l’avait promis. Quelle est votre position personnelle sur cette question ?

Sur la question de la réduction de son mandat, je sais que le Président Macky Sall n’en parle pas souvent publiquement. Mais, les rares fois qu’il a eu à se prononcer sur le sujet, il est resté constant par rapport à son engagement de campagne, c’est-à-dire réduire son mandat à 5 ans. Je sais qu’il subit beaucoup de pressions, mais il est resté intransigeant.

Toutefois, personnellement, je ne suis pas sûr que le Sénégal soit prêt, économiquement, pour passer à un mandat présidentiel à 5 ans. Actuellement, notre pays est en train de retrouver son équilibre macro- économique grâce à la pertinence des choix stratégiques du régime en place. Avec le Plan Sénégal émergent (PSE) et le PUDC, l’espoir est permis de voir le Sénégal résorber considérablement certaines inégalités territoriales à l’horizon 2017-2018. Vous vous imaginez, ramener le mandat présidentiel à 5ans équivaudrait à organiser, tous les 5 ans, des législatives, une présidentielle à un ou deux tours, et des locales. Même si le couplage est envisageable, cela reviendrait, en fin de compte, à placer le pays en campagnes électorales permanentes et plomber, en conséquence, toutes les initiatives de développement qui sont entrain d’être mises en œuvre. Ce qui n’est pas une bonne chose pour un pays comme le Sénégal pour lequel, malgré les nombreuses réalisations que j’ai évoquées tantôt, les défis sont encore nombreux. C’est pourquoi, je suis d’accord pour que le Président Macky Sall réduise son mandat en cours à 5 ans, pour respecter son engagement. Mais, impérativement, il faudrait, à mon avis, que le Sénégal adopte, pour le futur, le mandat présidentiel à 7 ans pour sortir de la campagne électorale permanente et permettre à notre pays de s’engager résolument sur l’atteinte des objectifs pour le développement véritable.

Soninke.tv