Une pub choc contre les préjugés en Allemagne Asile

 

 

«Lutz Bachmann vous dira que tous les réfugiés sont des criminels. Moi, je n’ai jamais violé la loi. Mais lui, oui. Le boss de Pegida (ndlr: mouvement islamophobe allemand) a été condamné pour vol, cambriolage, agression et trafic de drogue. L’un et l’autre, nous avons fui notre pays. Je suis venu en Allemagne pour fuir la guerre. Il est parti en Afrique du Sud pour fuir la justice allemande. Cliquez ici pour en savoir davantage sur nous plutôt que d’écouter des préjugés!»

 

Ce message filmé d’Arif, Syrien de 31 ans, s’affiche d’office en Allemagne à chaque fois qu’un internaute veut visionner sur YouTube une vidéo du leader de Pegida. Normal: il s’agit en fait d’un espace publicitaire ciblé. Impossible de sauter ces 30 secondes de réclame. Depuis quelques jours, neuf de ces messages chocs apparaissent sur le site de partage de vidéos en ligne à chaque fois que l’utilisateur fait une recherche utilisant des termes associés avec l’extrême droite ou des groupes anti-immigration.

Répondre à la peur

«La vidéo qui suit prétend que les réfugiés sont ici juste pour l’argent. Ma maison a été détruite par les bombes. Trois de mes cousins ont été tués. Vous croyez vraiment que je suis là pour l’argent?» interroge ainsi Najlaa, 23 ans, qui a fui Damas. Il suffit d’un clic pour voir une interview de trois minutes au cours de laquelle raconte comment chaque famille syrienne a perdu des proches, mais aussi ce qu’elle fait pour s’intégrer en Allemagne ainsi que ses rêves d’avenir…

Firas Alshater, 26 ans, est de la partie. Son clip à lui se rit gentiment du préjugé selon lequel Allemands et réfugiés ne sauraient vivre ensemble. Mieux: il livre son message dans la langue de Goethe. Ce comédien syrien au sourire contagieux est bien connu outre-Rhin. Il est l’auteur d’une vidéo comique qui a fait sensation il y a deux mois sur Internet. Dans «Qui sont ces Allemands?» on le voyait notamment se tenir debout, les yeux bandés et les bras écartés, sur la célèbre Alexanderplatz de Berlin, à côté d’une pancarte annonçant: «Je suis un réfugié syrien. Je vous fais confiance. Me ferez-vous confiance? Venez dans mes bras!» Cela a donné naissance à une série de mini-vidéos intitulée «Zukar» (Sucre).

Briser le nouveau “mur de Berlin”

Pour son ami et producteur Jan Heilig, la société est tellement polarisée sur la question des réfugiés qu’il est devenu difficile de ne pas être traité de «gauchiste» si l’on soutient l’asile ou de «néonazi» si l’on est défavorable ou même seulement sceptique. C’est ce «mur de Berlin» que Firas tente de briser par l’humour. Pour dialoguer.

(TDG.CH)