Sommet sur la corruption: Londres joue l’ambiguïté vis-à-vis de l’argent sale

Le premier ministre britannique, David Cameron, est transformé. A l’occasion du sommet international contre la corruption organisé jeudi à Londres, il a assuré que «si nous voulons nous occuper des gens qui ne paient pas leurs impôts et du blanchiment d’argent, nous devons nous occuper de la corruption». Dans la foulée, six participants (le Royaume-Uni, la France, les Pays-Bas, le Nigeria, le Kenya et l’Afghanistan) se sont engagés à produire un registre accessible au public des bénéficiaires des sociétés enregistrées sur leur territoire.

A l’entendre, on pourrait oublier que ce même David Cameron a voulu cacher, après la publication des Panama Papers, qu’il avait détenu jusqu’à son élection en 2010 des parts d’un fonds offshore. Et qu’en 2012, il avait voulu discrètement limiter les actions européennes visant à rendre les trusts plus transparents. Mais surtout, le chef du gouvernement britannique n’a pas poussé, comme il le pourrait, ces paradis fiscaux à suivre les pas du Royau

me-Uni. Ainsi, les îles Vierges britanniques, l’une des plaques tournantes de l’évasion fiscale, ont refusé de signer son registre, tandis que Jersey, Guernesey, les îles Caïmans et l’île de Man l’adopteront prochainement mais ne le rendront pas publique. La transparence sera donc toute relative.

Cette ambiguïté londonienne n’est pas surprenante. John Harris, le directeur général de la Commission des services financiers de Jersey, nous avait ainsi expliqué il y a quelques années qu’«environ 500 milliards d’euros venus de l’étranger transitent chaque année par les filiales des institutions financières installées à Jersey pour rejoindre la City de Londres. En termes d’emplois et de liquidité, nous leur sommes donc bien utiles.» En effet, nombre d’avocats, banquiers et agents immobiliers basés au Royaume-Uni profitent de cette manne financière considérable en offrant notamment à leurs détenteurs les moyens de blanchir leur argent. David Cameron a ainsi avoué jeudi que les sociétés étrangères détiennent 100 000 propriétés immobilières dans le pays, dont 44 000 à Londres.

(TDG)