Referendum: Le Venezuela au bord du chaos, Maduro sur le fil

«(Nicolas) Maduro ne va pas quitter le pouvoir suite au référendum parce qu’il n’y aura pas de référendum (…) Ils (les responsables de l’opposition) savent qu’il ne va pas y avoir de référendum parce qu’ils s’y sont pris trop tard, trop mal et en commettant des fraudes», a déclaré le vice-président Aristobulo Isturiz. Il s’exprimait lors d’un rassemblement de soutien à la présidente brésilienne Dilma Rousseff.

Le gouvernement chaviste (du nom du président défunt Hugo Chavez, au pouvoir de 1999 à 2013 et mentor de Nicolas Maduro) fait le parallèle entre le Venezuela et le Brésil. Dans ce dernier, la présidente de gauche a été écartée du pouvoir par le parlement, qu’elle accuse de coup d’Etat. Les autorités électorales doivent toutefois encore se prononcer officiellement sur la recevabilité d’un référendum.

«Menaces extérieures»… non identifiées

Ces derniers jours, le président Maduro et ses proches ont multiplié les mesures répressives et les déclarations incendiaires. Dans la nuit de vendredi à samedi, le chef de l’Etat a décrété l’état d’exception, faisant état de «menaces extérieures». Il ne les a néanmoins pas identifiées.

Samedi, il a ordonné la saisie des usines «paralysées par la bourgeoisie» et l’emprisonnement des entrepreneurs accusés de «saboter le pays». Quatre usines du groupe Polar, la plus importante société dans le secteur alimentaire au Venezuela, pourraient être concernées. Elles ont arrêté la production le 30 avril dernier.

D’autres sites pourraient être visés, sachant que les entreprises du pays ne travaillent qu’à 43,8% de leurs capacités. Les entrepreneurs vénézuéliens invoquent le manque de devises étrangères (contrôlées par l’Etat) pour payer leurs fournisseurs internationaux. «Nous courrons au désastre», a affirmé dimanche le député d’opposition et économiste José Guerra.

Exercices militaires

Nicolas Maduro a également ordonné pour le 21 mai «des exercices militaires nationaux des Forces armées, du peuple et de la milice pour nous préparer à n’importe quel scénario» envisageable.

A l’instar de l’opposition, les experts pointent le risque «d’explosion» du Venezuela. Sept Vénézuéliens sur dix réprouvent la gestion de leur président, selon un sondage de Venebarómetro.

«Le gouvernement semble mettre en place un cadre légal pour libérer les mains des militaires qui pourront réprimer» les manifestations qui réclament le référendum, estime l’analyste Benigno Alarcon. Selon lui, les mesures annoncées par le chef de l’Etat pourraient limiter le droit de manifester et autoriser les détentions préventives sans décision d’un juge.

Référendum qu’exige justement l’opposition qui souhaite révoquer le président. Et «elle sait que les manifestations sont le seul mécanisme pour faire monter la pression et le gouvernement doit arrêter cela», a résumé l’analyste Benigno Alarcon.

Nombreuses restrictions

Depuis la fin 2015 et la victoire d’une coalition d’opposition aux élections législatives, ce pays pétrolier est confronté à une crise politique, économique et sociale qui attise les tensions. Le bras de fer s’est accentué depuis que l’opposition a rassemblé 1,8 million de signatures pour lancer le processus du référendum, qu’elle espère organiser d’ici fin 2016.

Coupures d’électricité quotidiennes, services publics opérationnels uniquement deux jours par semaine, pillages de commerces, protestations, lynchages : la situation devient chaque jour un peu plus chaotique.

Le Venezuela était autrefois un riche producteur pétrolier grâce à ses réserves, les plus importantes au monde. Le pays est aujourd’hui plongé dans une grave crise provoquée par la chute des cours du brut, qui apporte 96% de ses devises. Le pays a subi en 2015 une inflation de 180,9%, une des plus élevées au monde. Son PIB a reculé de 5,7%, pour la deuxième année consécutive.

Manifestations

Samedi, le gouvernement chaviste et l’opposition se sont, une nouvelle fois, défiés dans la rue. Devant des milliers de partisans rassemblés dans le centre de Caracas, le chef de l’Etat aux abois a brandi la menace d’une «intervention armée» venue de l’extérieur, sans en désigner clairement l’origine.

Nicolas Maduro en a aussi profité pour accuser une nouvelle fois les Etats-Unis de vouloir «en finir avec les courants progressistes en Amérique latine». D’après le Washington Post, des responsables des services de renseignement américains estiment que le gouvernement vénézuélien pourrait être renversé par une insurrection populaire cette année. (ats/nxp)