Etats-Unis: Le métro de New York au bord de l’asphyxie

La fréquentation du métro de New York, l’un des plus anciens au monde, ne cesse d’augmenter, au point de placer certaines lignes au bord du chaos et de pousser la régie des transports à une course contre la montre.

A Brooklyn, des passagers prennent le métro dans l’autre sens le matin, simplement pour avoir une chance de monter à bord quelques stations en amont et de se rendre à Manhattan.

La capacité des rames est pourtant supérieure de plus de moitié à celles du métro parisien. «J’ai vu deux femmes se tirer les cheveux après s’être rentré dedans», raconte Ana Fernandez, reconnaissant néanmoins que les altercations sont rares.

Quais bondés

Dans certaines stations, il arrive même de devoir attendre pour accéder au quai, inaccessible car noir de monde.

«Parfois, je dois laisser passer plus d’un train» avant de pouvoir monter, explique Cynthia Martinez, qui vient de laisser passer une rame de la ligne 6, bondée.

«Nous sommes victimes de notre succès», résume Kevin Ortiz, porte-parole de la régie des transports de New York, la Metropolitan transportation authority (MTA).

Quelque 1,76 milliard de trajets ont été effectués en 2015 dans le métro new-yorkais, un record depuis 1948 et une hausse de 61% en 20 ans. La population nette de la ville a augmenté de près d’un million depuis 1994, et la délinquance dans le métro s’est effondrée d’environ 90% depuis son plus haut au début des années 1990.

Depuis 1981, 115 milliards de dollars ont été investis pour remettre à niveau le réseau qui était, à l’époque, «en état de décomposition», selon M. Ortiz. «Le système est en bon état. Les trains sont sûrs et propres, et les pannes sont rares. La surpopulation est davantage source de problèmes», observe David King, professeur d’urbanisme à l’université Columbia.

Travaux en cours

La fermeture possible pour 18 mois de travaux du tunnel de la ligne L, qui relie le quartier tendance de Williamsburg à Manhattan, pourrait faire monter encore d’un cran la tension.

Au coeur de la fourmilière, les lignes 4, 5 et 6 –qui circulent sur le même axe ferroviaire– sont plus fréquentées que la totalité des réseaux de Chicago, Boston et Washington réunis. «Je pars plus tôt, avant le +rush+», explique Mme Fernandez, qui emprunte ces fameuses lignes et s’astreint à être sur le quai avant 08H30.

Et les retards, en augmentation selon un récent rapport du New York State Comptroller, ajoutent à la situation. Pour la MTA, ils sont en bonne partie dus aux travaux sur les voies, car le métro circule 24 heures sur 24.

«C’est clairement un défi de faire face à cette demande croissante», reconnaît M. Ortiz, expliquant que la MTA «prend des mesures (…) à court et long terme». Toutes ses rames sont actuellement utilisées et les deux commandes passées ne feront que remplacer du matériel existant, explique-t-il.

Chantier gigantesque

La régie travaille notamment à la conception d’un train sans séparation entre voitures, pour en augmenter la capacité.

Et elle équipe progressivement des lignes du Communications-Based Train Control (CBTC), un système de contrôle automatique permettant de situer chaque train sur les voies et d’en faire circuler davantage.

A plus long terme, New York a engagé un chantier gigantesque pour prolonger la ligne Q sur la deuxième avenue et ainsi délester les lignes 4, 5 et 6. La livraison de la première tranche est prévue en décembre, mais le projet se poursuivra bien après 2020.

Mais certains pointent aussi du doigt la croissance effrénée de certains quartiers de Brooklyn, où des tours remplacent des immeubles de deux étages.

«Ils construisent trop, sans avoir de plan pour les infrastructures, que ce soient les transports, les écoles, ou le reste», s’insurge David Dobosz, enseignant retraité qui vit à Brooklyn. «Il doit y avoir une collaboration plus étroite entre la ville et nous, pour nous assurer que nous répondons bien à ces besoins», reconnaît M. Ortiz.

La popularité inédite des transports publics n’est pas l’apanage de New York. San Francisco, Washington et Chicago ont ainsi lancé de grands projets pour améliorer leurs métros respectifs.

(nxp/afp)