Fatick, Kaolack et Tambacounda : Les interventions de l’Inp ont permis de récupérer des terres et d’augmenter les rendements

Le directeur général de l’Institut national de pédologie (Inp) vient de boucler une tournée dans les régions de Fatick, Kaolack et Tambacounda confrontées à des problèmes de dégradation des sols. Avec des techniques simples et des aménagements appropriés, l’Inp a montré aux populations comment atténuer les effets liés à la dégradation et comment récupérer les superficies affectées par les phénomènes de salinisation, d’érosion et/ou d’ensablement.

En visite dans les régions de Fatick, Kaolack et Tambacounda, le directeur général de l’Institut national de pédologie (Inp) a tenu à constater de visu les réalisations de ses équipes de terrain en matière de techniques et d’aménagements pour lutter contre la dégradation des sols et recueillir l’avis des populations bénéficiaires. Mamadou Amadou Sow s’est réjoui des efforts consentis dans les deux zones pédoclimatiques visitées sur les huit que compte l’institut. Selon lui, la région du Sine-Saloum, du fait de son passé marin, sa géomorphologie et sa proximité avec l’océan, est confrontée à de sérieux problèmes de salinisation de ses terres, notamment celles des vallées communément appelées « khour ou faro ». Ce phénomène connu des populations est, aujourd’hui, aggravé par les changements climatiques et certaines pratiques de l’homme qui ont rendu des vallées quasi impropres à l’agriculture à cause du sel. Face à cette situation, l’Etat du Sénégal, par le biais de certaines de ses institutions, a entrepris de construire des ouvrages dans plusieurs vallées pour limiter l’intrusion des eaux salées dans les terres (digues anti-sel) mais aussi retenir les eaux de pluie pour les usages agro-sylvo-pastoraux de saison sèche (digues de retenue). Saluant ces initiatives, M. Sow a, toutefois, soutenu que « ces ouvrages, à eux seuls, n’éliminent pas entièrement le sel.

Mais ils ont le grand mérite de limiter son intrusion à l’intérieur des terres cultivables ». Il a donc préconisé, une fois les ouvrages en place, de mettre en œuvre des pratiques qui permettent de neutraliser le sel ou mieux, l’éliminer complètement du milieu. Entre autres pratiques, il a conseillé, selon les sites, le recours à l’une ou plusieurs des pratiques, telles que le drainage, les amendements au phosphogypse, l’utilisation massive des matières organiques (coque d’arachide, compost, résidus de récolte, fumier, etc.), la culture de plantes tolérantes…

Dégradation des terres
Dans la région du Sénégal oriental, deuxième étape de la tournée, l’érosion hydrique et la baisse de la fertilité des terres sont les premières préoccupations des populations. « L’érosion dans cette région est essentiellement due aux eaux de ruissellement, lesquelles s’expliquent par la force de l’eau qui tombe sur des terrains relativement accidentés et dépourvus de toute protection de surface (défrichage, déforestation) », a expliqué le directeur de l’Inp. « La conséquence est que les terres des plateaux et des talus sont arrachées par la furie des eaux de ruissellement, puis déposées dans les bas-fonds et autres vallées jadis très fertiles et cultivées pour le riz », a-t-il ajouté. Ce processus de dégradation s’est accru dans la région de Tambacounda en raison des changements climatiques et l’action de l’homme qui exerce une très forte pression sur le couvert végétal.

L’Inp préconise, entre autres actions, la sensibilisation des populations sur les effets des changements climatiques et l’action de l’homme ; la lutte contre le déboisement et la déforestation ; le reboisement et la plantation d’espèces herbacées en touffes pour atténuer la force de l’eau de ruissellement (vétiver, andropogon) ; l’aménagement d’ouvrages filtrants (cordons pierreux et diguettes en cadre) pour retenir la terre sur les plateaux et empêcher le comblement des vallées ; les amendements organiques et minéraux ; la formation des producteurs sur les bonnes pratiques agricoles (travail du sol, valorisation des matières organiques de toute sorte, plans d’assolement et successions culturales…)

Satisfaction des populations
Au terme de cette tournée, les personnes rencontrées ont unanimement reconnu que les techniques et les aménagements diffusés par l’Inp pour lutter contre la dégradation des sols ont donné entière satisfaction. Si l’on en croit les acteurs, le phosphogypse, appliqué dans les parcelles affectées par le sel, a permis une amélioration significative des rendements maraîchers et rizicoles. Les techniques de restauration des sols (cordons pierreux et diguettes en cadre) ont montré leur efficacité dans la restauration des terres dégradées en amont (plateaux et talus) et la réduction de l’ensablement des vallées. Aussi, Mamadou Amadou Sow et sa délégation ont souhaité « une extension des techniques de défense et de restauration des sols ». Il a promis de s’appuyer sur sa tutelle technique, le ministère de l’Agriculture et de l’Equipement rural (Maer), pour la consolidation des acquis en matière de défense et restauration des sols/conservation des eaux et des sols (Drs/Ces) et une plus large diffusion des techniques de lutte contre la dégradation des sols dont l’efficacité est reconnue par les bénéficiaires.

Dossier réalisé par Pape Sanor Drame

Grâce aux technologies introduites : Hausse de 10 % des rendements                                                                            inp rendementLes efforts consentis dans la conservation des sols ont permis une augmentation des rendements agricoles dans la région de Tambacounda. Selon l’ingénieur-délégué Mare Ndiaye, une hausse de 10 % de la production serait notée chez certains producteurs bénéficiaires.

L’Institut national de pédologie (Inp) a vulgarisé une série de techniques comme l’aménagement de cordons pierreux, la construction de diguettes, la plantation d’espèces herbacées fixatrices du sol (vétiver, andropogon) pour lutter contre les phénomènes d’érosion hydrique et d’ensablement dans 34 bas-fonds rizicoles du département de Tambacounda. Ces actions, entrant dans le cadre du partenariat établi entre l’Inp, le projet Pam-4R (depuis 2013), puis le Padaer (2014 et 2015), ont montré la voie pour lutter contre l’érosion et l’ensablement.

L’érosion hydrique est due au ruissellement des eaux de pluie qui décapent la partie superficielle arable des sols des talus et plateaux en amont, transporte et dépose les sédiments dans des bas-fonds et vallées rizicoles avec comme conséquences l’ensablement de ces derniers et leur perte pour la riziculture. Les efforts de défense et de restauration des sols/conservation des eaux et des sols (Drs/Ces) effectués dans la région sont particulièrement appréciés par les populations et les structures de développement dont le Programme alimentaire mondial (Pam) qui atteste, dans son rapport d’évaluation de 2015, qu’ils ont produit de bons résultats. « Le riz est une culture clé soutenue par l’initiative 4R à travers la création de structures de conservation de l’eau et des sols pour une meilleure gestion des bas-fonds. Les bénéficiaires du programme 4R ont amélioré leur production moyenne de riz d’environ +230 kilogrammes par ménage sur la période de l’enquête, alors que les non-bénéficiaires ont augmenté leur production de seulement +20 kilogrammes », rapportent les techniciens. A Sinthiou Alamet (commune de Ndame), on a pu constater l’ampleur du phénomène de l’érosion hydrique. Ici, des superficies devenues inaptes à l’agriculture, appelées « Bad land » et couvrant plusieurs hectares, ont entraîné le déplacement de la majeure partie de la population à la recherche de nouvelles terres de culture.

« Mais, grâce aux efforts de l’Inp et ses partenaires, des terres ont été récupérées », s’est félicité Sellé Ndao, le chef du village. L’intervention de l’Inp a rendu possible une bonne production du riz dans la vallée où il était devenu impossible d’assurer sa levée.

Autre lieu, autres résultats. Dans la vallée de Sandougou, les aménagements secondaires réalisés par l’Inp à côté de l’ouvrage de retenue du village de Koumbidia ont réduit significativement l’ensablement des bas-fonds rizicoles et l’érosion des plateaux où sont pratiquées les cultures d’hivernage (mil, maïs et arachide). La population du village de Koumbidia, par la voix de son chef, a témoigné de l’impact de ces innovations et ouvrages dans l’amélioration de la productivité de leurs terres et plaidé pour l’augmentation des moyens de la délégation de Tambacounda pour que celle-ci puisse toucher un plus grand nombre de sites affectés par le fléau et de producteurs dans la région.

Mare Ndiaye, délégué de la zone de Tambacounda : « Entre 1990 et 2000, la perte de la fertilité se chiffre à 140 milliards de FCfa »
mare ndiayeL’ingénieur délégué Mare Ndiaye revient, dans cette interview, sur l’importance de la conservation des sols au Sénégal.

Que pouvez-vous nous dire sur l’Inp et la Délégation de Tambacounda ?
Je vous remercie de m’avoir ouvert vos colonnes pour me permettre de m’exprimer sur l’Inp et l’importance des sols dans le développement agricole. Selon le découpage du territoire national en zones pédoclimatiques basé sur le type de sol, les facteurs climatiques et les types de dégradation des sols, la zone pédoclimatique de Tamba regroupe la région de Tambacounda et une partie des régions de Kaffrine et Louga. Il faut savoir que l’Inp est un établissement public à caractère scientifique et technologique créé par décret 2004-802 du 28 juin 2004. Les principales missions de l’institut, conférées par le décret portant sa création et son fonctionnement, tournent autour de la caractérisation et la cartographie des ressources en sols du pays, de l’orientation de l’occupation et de l’aménagement du terroir. Il doit assister les acteurs et les décideurs dans le choix de l’occupation des terres et contribuer à l’amélioration de la productivité des sols par la diffusion des technologies de sauvegarde et restauration des capacités de production des sols. Il a aussi une mission de sensibilisation et de formation pour l’adoption de bonnes pratiques de gestion durable des terres.

Quelle est l’importance du sol dans une agriculture qui se veut porteuse de croissance ?
Au Sénégal, l’agriculture constitue la principale activité économique. Elle occupe 77 % de la population. Le sol constitue le premier facteur dans le système de production. Il est donc capital de porter une attention particulière à la ressource sol non seulement pour une agriculture porteuse de croissance mais aussi pour un pays dont le développement économique et social passe forcément par le secteur agricole.

De façon concrète, à combien évalue-t-on les pertes ?
A titre illustratif, je peux citer une estimation faite par le gouvernement (fiches techniques pour l’élaboration du Plan d’orientation pour le développement économique et sociale 2002-2007) qui révèle que la valeur de la production perdue (comparée au potentiel du secteur primaire) liée à la perte de fertilité des terres se chiffre, entre 1990 et 2000, à environ 140 milliards de FCfa par an. Cela est énorme pour une économie comme la nôtre.

P. S. Drame

Salinité des sols du Sine-Saloum : Les changements climatiques accentuent la dégradation des terres
Les paramètres biophysiques des écosystèmes, en interaction avec les activités humaines, déterminent, selon les techniciens, les caractéristiques agro-pédologiques d’un terroir. M. Seydou Cissé, délégué de l’Inp dans le Sine-Saloum, nous apprend que les changements climatiques et les mauvaises occupations et pratiques sur les terres ont accéléré et amplifié la salinisation des sols.

« Dans le Sine-Saloum, depuis des décennies, la qualité des sols qui peut s’apprécier par sa productivité a été durement éprouvée par les changements climatiques, lesquels ont entrainé la salinisation de toutes les voies d’eaux du bassin versant dudit fleuve », a indiqué Seydou Cissé. En plus, a-t-il ajouté, dans un contexte de croissance démographique, avec la pression sur le foncier et les mauvaises pratiques sur les terres, il y a eu une amplification du phénomène que les collectivités subissent de plein fouet. Faisant l’état des lieux sur la salinité des sols du Sine-Saloum, M. Cissé a affirmé que « la qualité des sols a baissé presque partout dans les terroirs de production rizicole et maraichère à cause des aléas climatiques ».

La plupart des sols hydromorphes, autrefois cultivés en riz, sont, aujourd’hui, salés, voire sodiques, et évoluent sous des formations pédologiques marginales (tannes). Selon lui, ces sols ne peuvent même plus supporter le bétail qui jouait un rôle très important dans le maintien de la fertilité des sols dans le Sine où plus de 400.000 hectares des terres sont, à nos jours, hyper-salinisées. « Même les terres hautes, où le mil et l’arachide entrent en rotation, sont menacées par le front de salinité provenant des tannes », a averti le délégué de l’Inp dans le Sin- Saloum, ajoutant que « certains producteurs de Djilaas, Tattaguine-Sine, Ndiaffate, entre autres, ont été obligés, ces dernières années, d’abandonner les variétés locales pour en adopter d’autres plus tolérantes au sel ».

Dans les zones de dépression, avec des sols hydromorphes favorables au maraîchage, l’eau est parfois chargée du fait du mouvement des marées. Ainsi, la production légumière est fortement touchée par ce phénomène de salinisation le long des cours d’eaux traversant le sud-ouest de Foundiougne. Ce faisant, l’amplification anthropique de la salinisation des sols est, pour le moins, une préoccupation dans le Sine-Saloum. Et pour faire face, Seydou Cissé a préconisé une stratégie de lutte dont le succès viendra du « développement d’une alliance entre tous les acteurs de la terre -organisations paysannes, collectivités locales, services techniques et de recherche-développement- pour une exploitation et un partage des savoirs locaux, la formation sur la lutte contre la salinité, la bonne gestion des ouvrages hydro-agricoles, le reboisement avec des espèces halophiles, etc. ».

P. S. Drame

Kaolack : 99 % du stock de semences d’arachide vendus dans les points de cession
arachideLe directeur régional de développement rural (Drdr) de Kaolack, Pierre Diouf, a indiqué, mardi, que 99 % du stock de 12.000 tonnes de semences d’arachide de la région sont vendus dans les points de cession agréés. « Pour ce qui est de la mise en place de l’arachide, c’est bouclé, nous sommes à 99 % de vente (…) », a-t-il soutenu lors d’un Comité régional de développement (Crd) axé sur l’évaluation de la mise en place des intrants pour la campagne 2016-2017. « Il en est de même pour l’engrais d’arachide, le 6-20-10, qui est à 99 % de cession », a ajouté M. Diouf, estimant que la mise en place des semences d’arachide est satisfaisante.  « Pour l’arachide, a-t-il indiqué, nous étions à plus 12.000 tonnes de semences, dont plus de 10.000 tonnes sont des semences certifiées ». Le Drdr a précisé que le processus de mise en place des semences d’arachide a, dans le cadre de la présente campagne agricole, mis l’accent sur les semences certifiées. Pour les autres espèces comme le maïs et le niébé, a-t-il renchéri, il y a encore quelques rajouts à apporter puisque seuls 65 % des quotas attendus sont reçus. « Le sorgho est à 85 % de réception tandis que le triple 15 est de l’ordre de 60 % à 65 % ; il nécessite d’être complété puisqu’il y a le département de Guinguinéo qui n’a pas encore reçu son quota », a relevé Pierre Diouf. « Pour le sésame, on n’en a pas encore reçu, de même que l’urée- le grand manquant de l’heure-, pour satisfaire les besoins en engrais du riz et du maïs », a-t-il déploré, invitant les opérateurs à accélérer la mise en place des intrants agricoles.

(APS)