Théâtre populaire : “Niani Wouli” de Tambacounda s’illustre dans les thématiques de société

 

« Niani Wouli » est une troupe qui s’illustre depuis 10 ans à Tambacounda dans le théâtre populaire. Avec cette formation, toutes les questions existentielles sont abordées sous le prisme culturel ; il y va de l’économie à l’éducation en passant par le respect de l’environnement, la santé…

« Au début, la troupe n’avait pas de nom ; on se rencontrait au Centre départemental de l’éducation populaire et sportif (Cedeps) de la région, qui nous servait de siège pour effectuer nos séances de répétition… C’est une bonne volonté qui nous a persuadés de jouer dans la sous-région au mois de décembre, dans le cadre de la Semaine de l’amitié et de la fraternité et aussi à former un groupe pour évoluer ensuite », relate Aliou Mbow, directeur artistique de la troupe « Niani Wouli ».

Chemin faisant, une troupe est formée avec plus de 25 membres pétris de talent et d’inspiration féconde. « Nous avons même de nouvelles personnes qui veulent adhérer dimanche prochain », révèle M. Mbow, qui précise qu’à chaque année, au mois de décembre, la troupe se rend dans la sous-région pour vendre « la diplomatie culturelle » du Sénégal. Même si cela n’est pas déterminant. La Gambie, le Mali, la Mauritanie et les deux Guinée ne sont pas de nouveaux pays d’accueil pour eux.

Collaborant avec les Ong pour faire passer leurs messages socio-éducatifs par la communication de masse, la troupe « Niani Wouli » se positionne en véritable régulateur social. La recherche de fonds pour aider les couches vulnérables fait partie de leur répertoire. « Nous apportons notre contribution dans toutes les structures qui œuvrent dans le social », souligne le directeur artistique, qui précise que certains comédiens s’adonnent à d’autres activités professionnelles pour arrondir les angles à la fin du mois. Toutefois, M. Mbow, lui, ne fait que le théâtre qui reste sa seule préoccupation de tous les jours. La réticence des parents, au début, les acteurs du « Niani » l’ont vécue. Mais, il fallait faire preuve de tact, de persévérance, de conviction pour les convaincre ; car, autrefois, le théâtre ne pouvait être guère considéré comme un métier.

« Nombre d’entre nous allaient aux séances de répétition en catimini ; on nous snobait. Faute de ne plus continuer à jouer à cache-cache avec nos parents, nous nous sommes résolus à leur dire la vérité même si certains programmes prennent fin tardivement la nuit », explique M. Mbow.

Poursuivant, Aliou raconte : « L’un d’entre nous a eu des problèmes avec son parent, car il ne l’avait pas informé. Nous sommes allés pour dissiper les nuages ; depuis lors, chaque nouvel adhérent détient sa fiche d’adhésion qu’il montre à ses parents, chargés de la signer. Maintenant, il n’y a plus d’incompréhension ».

Un amour de théâtre
Cohabiter avec leur passion n’empêche pas à ces comédiens de ne pas vivre en couple. « Nos comédiennes sont épousées par des hommes qui les aiment d’abord par ce qu’elles font. Pour les mariées qui veulent adhérer, en tant que responsables, nous leur demandons premièrement la permission des époux », explique le directeur artistique. Cette approche prudente encadre aussi les sorties du territoire, surtout à l’égard des mères de famille. Les comédiennes Coumba Bâ et Léna Manga peuvent en témoigner. Chaque année, la troupe organise « La Nuit du rire » pour chasser le stress du chômage et des angoisses de la vie qui étranglent la société tambacoundoise. L’année dernière, le budget pour l’organisation de cette soirée était arrêté à la somme de 3,7 millions de FCfa. Pour 2017, le montant sera revu à la hausse ; d’ailleurs, une troupe guinéenne est l’hôte de la 10ème édition.

« Depuis que notre troupe a vu le jour, aucune autorité ne nous a aidée. Nous n’attendons personne dans nos projets ou entreprises ; nous fonctionnons grâce à nos cotisations, même si des moments difficiles ont secoué la vie de la troupe », souligne M. Mbow, qui magnifie l’appui de certaines bonnes volontés. Le cachet plafond de la troupe est (pour le moment) de 3,5 millions de FCfa, mais le tarif plancher oscille entre 50.000 et 200.000 FCfa. « Cela dépend des contrats qui nous lient aux clients et autres particuliers. Vendre la destination de Tambacounda sous le spectre culturel est notre défi le plus important. La visibilité manque terriblement à notre région. Nombre de citoyens croient que le théâtre relève de la futilité. Pour effacer ce préjugé tout fait, nous devons nous comporter en ambassadeur afin que les gens respectent ce que nous faisons, car c’est notre gagne-pain », affirme le directeur artistique.
Une lapalissade de dire que l’art ne nourrit pas son homme sous nos cieux. C’est pour cette raison qu’Aliou Mbow lance un appel aux autorités publiques eu égard au rôle important que les artistes jouent. « En cinq minutes de spectacle, nous faisons comprendre à un public un message, qui nécessitait deux heures de séminaire », remplace-t-il.
Ce 8 avril, au Camp militaire Mamadou Lamine Dramé de Tambacounda, la troupe théâtrale va encore célébrer son anniversaire prévu pour « La Nuit du rire » qui, chaque année, se tient à pareil moment.

« Nous allons convier les Artistes comédiens du théâtre sénégalais (Arcots), des régions de Thiès, Kaolack, Saint-Louis, et ceux de la sous-région qui œuvrent dans la musique, la danse, afin de donner un cachet très populaire à la manifestation », affirme Aliou Mbow.

Serigne Mansour Sy CISSE / lesoleil.sn /