Paix et sécurité- le Forum qui peine à mobiliser les chefs d’États africains

 

Ils sont 800 participants à honorer de leur présence ce 4ème Forum sur la paix et la sécurité en Afrique, le second qu’organise le Gouvernement du Sénégal après que les deux premiers ont été pilotés par Dr Cheikh Tidiane Gadio avec l’Institut panafricain stratégique (IPS).
Du premier Forum où 4 Chefs d’Etats étaient présents dont Idrissa Deby, au 4ème avec seulement trois, en l’occurrence Paul Kagamé du Rwanda, Ibrahima Boubacar Keïta du Mali et le Chef d’Etat du Sénégal, on ne peut pas dire que l’Afrique soit vraiment bien représentée.

Certes, on ne peut pas minimiser la présence de hauts responsables représentant leurs Gouvernements respectifs, mais une telle rencontre aurait beaucoup gagné en crédibilité si un nombre important de Chefs d’Etats était présent.

La rencontre aurait été plus impressionnante, les réflexions beaucoup plus crédibles et les conclusions susciteraient plus d’espoir de concrétisation.

Mais, hélas, l’Afrique est comme elle est. Elle changera difficilement. Le simple fait que Dakar l’ait initié et organisé pourrait déranger certains. Le succès est analysé ici à l’aune des querelles de leadership sous-régional. La réalité est que nous avons du mal à être unis et à parler d’une même voix.

C’est peut-être le lieu de le regretter, mais si c’était la France qui l’avait organisé sur son propre sol, ils seraient nombreux les Chefs d’Etats à se précipiter là-bas, malgré le froid glacial qu’il y fait actuellement.

Si nous continuons à nous sous-estimer de la sorte, comment voulons-nous que les autres nous respectent ? Si par exemple le Président Trump s’était amusé à convoquer un forum de la sorte sur le même thème, ce serait alors la bousculade pour être présents de la part de nos dirigeants, en première loge, pour se faire remarquer.

Avouons-le, le problème c’est moins les grandes puissances que nous-mêmes. Ils nous prennent tels que nous sommes, encore bourrés de complexes et de préjugés sur notre propre capacité à régler les défis auxquels nous nous trouvons confrontés.

Nous avons eu de par le passé des Présidents garde-chasses comme Bokassa, beaucoup de « Préfets » du Gouvernement français prêts à exécuter leur moindre désir.

Les choses ont peu évolué depuis lors.
Ici, il suffit qu’un pays africain soit à l’origine d’une initiative, ne serait-ce que de réflexion, pour que les autres brillent par leur absence. Evidemment, les réflexions devraient être anglées, entre autres points, sur les stratégies à mettre en place pour la force du G5 Sahel. Or, ceux qui ont pris la responsabilité d’exclure le Sénégal de cette force commune, savent qu’ils ne gagneraient rien à pointer le nez à Dakar.
C’est dommage pour Me Sidiki Kaba, le nouveau Ministre des Affaires étrangères, pour qui c’est le premier Forum. Il a fait sa tournée africaine certainement pour réussir à mobiliser. Il n’a pas plus réussi que Gadio.

Or, comment veut-on faire trembler les terroristes, leur démontrer notre ferme détermination si nous sommes désunis ?

Des manœuvres géopolitiques

Je ne doute nullement qu’au cours des différents ateliers, des réflexions intéressantes verront le jour. Mais les décideurs que sont nos Chefs d’Etat attentent beaucoup de la France en termes d’initiatives. Ils suivront après.
Par exemple, lors de la crise du Mali présentée comme l’une des plus belles réussites françaises en Afrique en termes d’intervention militaire, personne n’a jamais compris l’inertie de la Cedeao et même le fait que certaines armes en destination du Mali aient été bloquées dans nos ports.

Si la Cedeao avait promptement réagi, les barbus du Nord Mali n’auraient pas le succès qu’ils ont eu et qu’ils continuent apparemment d’avoir.

Il y a trop de manœuvres géopolitiques dans ces conflits.

La preuve, durant le premier Forum, peut-être celui qui a plus de succès, les Chefs d’Etats présents, notamment Idriss Deby du Tchad, avaient eu le courage de pointer du doigt la responsabilité de la France sur ce qui se passe dans cette zone du fait de son action dans l’assassinat de Kadhafi. Il en est de même de celle des Etats-unis avec le mensonge d’Etat qui avait conduit à la guerre et à l’exécution de Saddam Hussein en Irak.
Depuis lors, c’est le chaos dans ces zones avec son corollaire, la circulation des armes et celle des bandes armées et des trafiquants de toutes sortes.

La preuve, la plupart des soi-disant soldats de Dieu sont des affairistes préoccupés par le gain tiré des opérations menées. Ce sont des trafiquants d’armes, de drogue, qui recrutent des mercenaires pour semer la terreur en faisant tout pour contrôler des parcelles de territoires de nos Etats. Ce sont des bandits comme les autres.
Avec cette complicité et en présence de Chefs d’Etats aux desseins parfois peu clairs envers leurs peuples, le mal risque de se propager encore pendant longtemps.

Ce qui manque, comme toujours en pareils cas, c’est la bonne foi des acteurs.

Assane Samb/Rewmi quotidien