Suicide en plein tribunal «Emporter du poison à l’audience? Facile»

 

 


Les autorités néerlandaises enquêtent pour établir comment un accusé du Tribunal pénal pour l’ex-Yougoslavie, le Croate de Bosnie Slobodan Praljak, a pu se suicider mercredi devant les juges. Ils venaient de confirmer sa condamnation en appel.

Le parquet de La Haye a annoncé qu’il lançait «à la demande du TPIY» une enquête sur la mort de Praljak. «Au cours d’une session du TPIY, M. Praljak a avalé quelque chose et il est mort possiblement des conséquences» de cette action, a déclaré le parquet dans un communiqué.

L’enquête devra avant tout établir si Slobodan Praljak a reçu une aide pour commettre son suicide. «Pour le moment l’enquête va se concentrer sur la question du suicide assisté» et sur «la violation» de la réglementation sur les substances médicales, déclare le communiqué. «L’enquête venant seulement de commencer, le Parquet ne peut pas faire davantage de commentaires».

«Comme dans un aéroport»

Comment Slobodan Praljak a-t-il pu se procurer du poison alors qu’il se trouvait derrière les barreaux? Et comment a-t-il pu l’avoir sur lui pendant le procès alors qu’il est censé avoir passé des contrôles de sécurité? Un avocat serbe ayant souvent défendu des présumés criminels de guerre n’est pas surpris qu’un tel drame ait pu se produire.

Tom Fila estime en effet qu’il serait «facile d’emporter du poison pendant l’audience», ajoutant que la sécurité du tribunal est «semblable à celle des aéroports». Les agents vérifient en effet les métaux, les téléphones portables, les ceintures et autres pièces de monnaie, mais ne prêtent pas particulièrement attention aux «pilules et petites quantités de liquide», explique l’avocat au «Washington Post».

«Je rejette avec mépris votre verdict»

Le dramatique incident est survenu lors du prononcé du jugement en appel contre six anciens dirigeants et chefs militaires des Croates de Bosnie, accusés de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité durant le conflit croato-musulman (1993-1994) survenu dans le cadre de la guerre en Bosnie-Herzégovine (1992-1995).

Aussitôt après l’énoncé du verdict confirmant sa condamnation à 20 ans de prison, Slobodan Praljak, 72 ans, debout face aux juges, a déclaré d’une voix forte: «Slobodan Praljak n’est pas un criminel de guerre, je rejette avec mépris votre verdict».

Il a ensuite sorti de sa poche une fiole dont il a avalé le contenu, provoquant la stupeur dans la salle d’audience. Son avocat a prononcé le mot «poison», alors que l’audience était suspendue et qu’arrivaient des secouristes.

Peu après, Nenad Golcevski, porte-parole du TPIY, a annoncé le décès de Praljak. «L’un des six accusés dans le procès (…) est mort aujourd’hui à l’hôpital HMC de La Haye», où il a été transporté après avoir «bu un liquide dans la salle d’audience», a déclaré le porte-parole.

L’agence de presse officielle croate Hina a été plus directe: Praljak «est mort dans un hôpital de La Haye après avoir bu du poison» dans la salle d’audience, a-t-elle annoncé.

On ignore comment l’accusé a pu se trouver dans l’enceinte du tribunal en possession d’une fiole contenant le liquide suspect. Le porte-parole du TPIY a refusé de «communiquer là-dessus».

«Scène de crime»

La salle d’audience, théâtre du drame, est désormais une «scène de crime» et la police néerlandaise a commencé à enquêter.

Auparavant, les juges avaient condamné en appel à 25 ans d’emprisonnement l’ex-dirigeant des Croates de Bosnie, Jadranko Prlic, alors que 40 ans avaient été requis contre lui.

Il a été reconnu coupable d’avoir mené le transfèrement de populations musulmanes et d’avoir eu recours à des meurtres, des viols et des destructions de biens civils pour créer une «grande Croatie».

(nxp/joc/afp)