Crise en Catalogne «Avec elle, vous pouvez oublier le mot corruption»

 

«La majorité sociale désire l’union avec l’Espagne et l’Europe», a-t-elle lancé jeudi soir, tout sourire, dans son discours de victoire, «les partis nationalistes ne pourront plus jamais prétendre parler au nom de toute la Catalogne». Elle ne dirigera pas, car elle est minoritaire face aux élus indépendantistes. En revanche, son parti gagne du terrain: Inès Arrimadas aura donc le rôle de première opposante.

Au cours des dernières années, cette jeune femme brune de 36 ans, avocate de formation, s’était imposée comme l’une des principales figures de la lutte contre le projet sécessionniste, dans les médias ou à la tribune du Parlement de Catalogne.

Elle avait ainsi qualifié de «coup porté à la démocratie» l’adoption, lors des sessions des 6 et 7 septembre, par la courte majorité indépendantiste de la chambre régionale de la loi qui a permis l’organisation du référendum d’autodétermination illégal du 1er octobre.

Elle avait ensuite accusé le président catalan Carles Puigdemont, destitué depuis et réfugié en Belgique, d’avoir entraîné la région dans un processus «kafkaïen». «Vous n’aimez pas le face-à-face, monsieur le président», lui avait-elle lancé. «Vous n’aimez pas dialoguer, débattre, négocier avec qui n’est pas comme vous.»

Une ascension fulgurante

Née en Andalousie (Sud) à Jerez de la Frontera, elle a étudié le Droit et l’Administration des entreprises, a passé une année étudiante Erasmus à Nice. Elle s’est ensuite installée il y a plus de dix ans en Catalogne, comme avocate dans le privé.

Mariée à Xavier Cima, ancien homme politique indépendantiste retiré de la vie publique, elle assiste en 2010 à un meeting du parti Ciudadanos, créé en 2006 en réaction contre la corruption et pour s’opposer au nationalisme catalan. Elle y adhère l’année suivante et entame alors une ascension fulgurante, jusqu’à être élue députée au Parlement régional fin 2012.

Elle s’impose rapidement comme la cheffe de file de Ciudadanos en Catalogne, alors que le président et fondateur de la formation, Albert Rivera, partait à l’assaut de Madrid pour affirmer la vocation nationale du parti libéral.

Porte-voix

Cheffe de l’opposition au Parlement catalan depuis 2015, elle se distingue par ses talents de communicatrice et son sens de la formule. Elle taxe la revendication indépendantiste de «monothème» ou la consultation sur l’indépendance de «neverendum».

Face à un nationalisme qu’elle qualifie «d’excluant», elle s’est fait la porte-voix des centaines de milliers d’Espagnols qui, comme elle, sont venus d’autres provinces pour travailler dans la riche Catalogne et participer à son essor économique.

Si l’ancien Premier ministre français Manuel Valls, natif de Barcelone et partisan de l’union de l’Espagne, a dit «admirer» les discours de la jeune femme, elle s’est attirée les foudres des indépendantistes. Núria Gispert, ancienne présidente du parlement catalan, lui a ainsi lancé qu’elle ferait mieux de retourner dans son Andalousie natale.

Son but avoué était de «mettre fin au processus» indépendantiste: malgré son score historique jeudi, elle n’y est pas parvenue.

«Stricte et légaliste»

Andrés Rodríguez Benot, professeur qui enseignait le Droit international privé à l’Université Pablo de Olavide de Séville, raconte que son élève Arrimadas, «brillante mais réservée», s’était aperçue que certains élèves falsifiaient leurs résultats en langues étrangères afin d’obtenir des bourses Erasmus.

Elle les a dénoncés au recteur, qui a mené l’enquête, vérifié les faits et sanctionné les coupables. «C’est une personne stricte et légaliste», assure son ancien professeur. «Avec elle, vous pouvez oublier le mot corruption».

(20 minutes/ats)