La Petite côte au bord de l’épuisement de ses réserves foncières : Le boom de la vente des villas

 

La Petite côte a longtemps constitué une destination privilégiée pour les touristes qui n’hésitaient pas à acheter des parcelles, de construire des villas. Aujourd’hui, à côté de la course vers l’acquisition des maisons en bordure de la mer, la revente des villas est une tendance en nette hausse à Saly, Ngaparou et Somone. Plusieurs raisons expliquent ce phénomène.

Saly Portudal a longtemps exercé un attrait avec ses nombreux atouts. La localité est située à quelque 80 km de la capitale et à 15 mn du nouvel aéroport international du Sénégal. Le site constitue un exemple d’aménagement réussi. Il s’étend le long de la mer ; ce qui lui confère un climat agréable. Presque toute l’année durant. A cheval entre les différentes régions du Sénégal, le transport y est plutôt accessible. Saly, c’est également une station balnéaire à la réputation internationale. Certains visiteurs venus de l’Occident pour un court séjour ont fini par y élire domicile. Conséquence : c’est la course vers la construction des villas à l’architecture exotique. Des maisons « pieds dans l’eau » poussent comme de petits champignons en bordure de la mer.

Le rivage est débordé. Le prix du terrain avait dépassé le seuil de la rationalité. En arrière-plan de la plage, les nouveaux quartiers aux allures des résidences européennes, avec des villas aux murs parés de fleurs, se détachent des habitations traditionnelles de Saly. Par son emplacement géographique exceptionnel et son dynamisme culturel, l’endroit est un lieu de résidence attractif. Ces facteurs tendent à soutenir un marché immobilier dont les prix sont parmi les plus élevés au Sénégal. Après la course à l’achat des parcelles et à la construction des maisons, il se développe, aujourd’hui, une nouvelle spéculation : la vente des villas. Le phénomène prend de l’ampleur. C’est un vent qui balaie la zone touristique. En cette matinée de mercredi, pas moins d’une vingtaine de villas sont affichées devant les locaux d’une agence immobilière. Toutes sont proposées à la vente. Les prix varient entre 45 et 120 millions de FCfa. On affiche « villa à vendre » presque dans plusieurs coins de rue à Saly, à Saly Niakh Niakhal, Somone, Warang, Ngaparou… La vente et la revente des villas sont une activité florissante. Surtout que la station balnéaire est au bord de l’épuisement de ses réserves foncières. Il est quasi impossible de s’offrir un terrain nu à usage d’habitat à Saly Portudal.

Nouveaux atouts

« Trouver un terrain nu à Saly relève d’un combat de titan », confie Marie Sène. Elle gère y une agence immobilière. Les rares personnes qui disposent encore d’une parcelle à Saly ne sont souvent pas dans les dispositions de vendre, souligne-t-elle. « Au lieu de céder leur terrain, les propriétaires préfèrent construire, pour ensuite mettre les lieux sous location. Cela est beaucoup plus rentable. Et quelque soit la durée du loyer, la maison reste la propriété du bailleur », relève-t-elle. A ce jour, Saly est l’un des plus grands centres touristiques de l’Afrique de l’Ouest et compte des hôtels et des résidences. Saly abrite aussi de nombreux restaurants, bars, discothèques, boutiques artisanales, etc. On peut également y pratiquer la pêche, la planche à voile, le ski nautique, le tennis, l’équitation, le golf… Des raisons, entre autres, qui ont poussé le couple Duverne à s’installer sur la Petite côte il y a de cela 17 ans. Jean et Bernadette venaient alors de prendre leur retraite. « Nous étions des habitués de Saly. Nous passions plus nos vacances ici. C’est naturellement que nous sommes tombés amoureux de la localité et avons décidé, après notre retraite, de nous offrir une villa à Somone », informe Jean. Mais, le couple a décidé de vendre. « Nous prenons de l’âge et il est temps de retourner au bercail », souligne Bernadette sur un ton ironique. Selon Penda Guèye, également gérante d’une agence immobilière à Saly, « la clientèle a changé. Dans les années 2000, avec le passage à l’euro, beaucoup d’Occidentaux sont venus investir dans l’immobilier à Saly. La plupart d’entre eux étaient déjà à la retraite à l’époque. Les années cumulées font que ces personnes sont très âgées et préfèrent souvent rentrer chez-eux », analyse-t-elle. Penda explique que certains passent maintenant six mois à Saly, durant la période hivernale, et le reste de l’année, ils sont dans leur pays d’origine qui leur offre un meilleur plateau sanitaire. Selon toujours la spécialiste des ventes immobilières, les enfants de ces personnes préfèrent généralement vendre les maisons léguées, car ne connaissant rien du Sénégal.

La nouvelle clientèle est de race noire
Saly, c’est aussi le point de départ de nombreuses excursions avec des destinations qui ont pour noms : la réserve de Bandia, l’île de Gorée, Fadiouth ou l’île aux coquillages, le Lac Rose, etc. La localité compte plusieurs banques, des assurances, des agences immobilières, un bureau de poste, une compagnie de sapeur-pompier, une gendarmerie… L’accessibilité de ces services contribue à faire de la zone une destination privilégiée. Cela, malgré la crise. Et à la différence des années passées, les gérants des agences ont constaté qu’une nouvelle classe de Sénégalais investit dans l’immobilier dans cette zone balnéaire. Toutefois, l’on croise également des Blancs qui continuent de racheter des maisons. C’est le cas de Ludovic. Depuis 5 ans, sa vie est partagée entre la Belgique et Saly. Il a fini par se payer une villa qui donne sur la mer. « Nous voyons certains revendre des villas qui sont sur la plage à cause de l’insalubrité. C’est vrai aussi qu’il y a une tendance vers la modernité. Beaucoup avaient acheté des maisons dans le style typique africain. A l’époque, c’était à la mode. Aujourd’hui, la donne a complètement changé. Les gens aspirent plus à la modernité. Ils veulent plus d’espace. Les maisons construites au bord de la mer sont souvent de petites parcelles », fait remarquer Penda la gérante. Leur clientèle n’est pas exclusivement de race blanche. En plus des atouts naturels, de sa position géographique, la proximité de l’aéroport international Blaise Diagne renforce l’attrait du site. L’aéroport et l’autoroute, dit-elle, ont créé une nouvelle clientèle essentiellement locale, habitant la plupart du temps à Dakar. Ces gens cherchent quelque chose de moderne. « Il y’en a aussi qui vendent pour acheter ailleurs et rénover. Il y a, enfin, des touristes à la découverte du Sénégal ou des ressortissants de la sous-région (Maliens, Guinéens…) », informe Mbaye Sène, un agent immobilier. La bourgeoise locale est quant à elle attirée par la tranquillité et la stabilité de la zone. « La diaspora sénégalaise se rend compte aussi qu’il y a de moins en moins de débouchées en Europe. Ces Sénégalais reviennent investir au Sénégal », ajoute Penda Guèye. Elle se souvient qu’elle avait affaire, dans les années 2000, à des touristes qui économisaient durant des années pour pouvoir acheter une maison.

Par Oumar BA et Idrissa SANE (Textes), Assane SOW (Photos) / lesoleil.sn /