Macron silencieux sur les “gilets jaunes”

 

Emmanuel Macron est allé constater les dégâts dimanche à Paris au lendemain des scènes de guérilla urbaine. Face à cette crise politique majeure, il a demandé à son premier ministre de recevoir les chefs de partis politiques et des représentants des “gilets jaunes”.

Tout juste revenu du sommet du G20 à Buenos Aires, le chef de l’État a présidé une réunion de crise à l’Élysée avec le Premier ministre Édouard Philippe, le ministre de l’Intérieur Christophe Castaner et son secrétaire d’État Laurent Nuñez ainsi que le ministre d’État chargé de la Transition écologique François de Rugy.

“Le président de la République ne s’exprimera pas aujourd’hui”, a indiqué plus tard l’Élysée, alors que l’opposition et une partie des “gilets jaunes” attendaient un geste fort de la part de M. Macron après les violences de samedi qui ont fait 263 blessés en France, dont 133 rien qu’à Paris.

M. Macron a cependant demandé au Premier ministre de recevoir les chefs de partis et des représentants des “gilets jaunes”, a annoncé un peu plus tard l’Élysée.

Hommage aux forces de l’ordre

La communication publique du président s’est donc limitée dimanche à un seul mot : “Merci”, qu’il a écrit sur son compte Twitter pour accompagner trois photos le montrant rendre hommage aux pompiers et aux forces de l’ordre.

Avant de retrouver l’Élysée, le président s’était d’abord rendu à l’Arc de Triomphe, théâtre de violences et de dégradations samedi. Il s’est rendu au pied de la tombe du soldat inconnu, avant d’entrer à l’intérieur du monument, tagué et en partie saccagé.

Il a ensuite rendu hommage aux forces de l’ordre et rencontré des commerçants sur l’avenue Kléber, vandalisée samedi. Parfois applaudi, il a aussi essuyé des huées dans la foule.

Emmanuel Macron “a été choqué des dégradations à la fois à l’Arc de Triomphe, qui est un lieu symbolique, et avenue Kléber”, a indiqué la présidence.

Immenses dégradations

Au total, 412 personnes ont été interpellées et 378 placées en garde à vue à Paris, selon un bilan de la préfecture de police. La maire de Paris Anne Hidalgo a indiqué que le coût des dégradations surprendra “tant elles sont immenses”.

Des incidents ont également eu lieu en province en marge d’une mobilisation qui a rassemblé samedi 136’000 manifestants en France selon l’Intérieur, contre 166’000 le 24 novembre.

A Toulouse, 57 personnes, dont 48 policiers, ont été blessées samedi. À Arles, un automobiliste est décédé dans la nuit après avoir percuté un poids lourd à l’arrêt en raison d’un bouchon provoqué par un barrage des “gilets jaunes, portant à trois le nombre de décès liés à cette crise.

Dimanche, la zone de péage autoroutier de Narbonne sud et un peloton autoroutier de la gendarmerie ont été incendiés.

“Pas de troisième samedi noir”

La commission des lois du Sénat a annoncé qu’elle entendra “les explications” mardi de Christophe Castaner et de Laurent Nuñez sur les violences de samedi.

“Le gouvernement n’a pas le droit à un troisième samedi noir”, a mis en garde le président du Sénat Gérard Larcher, alors que plusieurs appels ont été lancés sur Facebook pour manifester à nouveau samedi prochain à Paris.

La première réponse de l’exécutif a d’abord été celle de la fermeté. Emmanuel Macron a encore insisté sur la nécessité “qu’aucun des actes” survenus samedi “ne reste sans réponse judiciaire”.

Il a également souhaité que Christophe Castaner “mène une réflexion sur la nécessité éventuelle d’une adaptation du dispositif du maintien de l’ordre dans les jours à venir” face à “des casseurs plus violents, plus mobiles, plus organisés”. Mais l’éventualité d’instaurer l’état d’urgence n’a pas été évoquée, a ajouté la présidence.

L’opposition au créneau

L’opposition a sommé le chef de l’État de réagir face à une situation souvent décrite comme “insurrectionnelle”. À droite, le président des Républicains Laurent Wauquiez a demandé de “rendre la parole aux Français” et réitéré son appel à un référendum sur la politique écologique et fiscale d’Emmanuel Macron.

Marine Le Pen (RN) et Jean-Luc Mélenchon (LFI) ont plaidé de concert dimanche pour une dissolution de l’Assemblée nationale. Cette question n’a toutefois pas été évoquée en réunion, selon l’Elysée. Une source à la présidence a indiqué à Reuters qu’Emmanuel Macron n’envisageait a priori pas cette solution pour répondre à la crise.

Face à ces revendications, le gouvernement est resté inflexible. “On a dit que nous ne changerions pas de cap. Parce que le cap est le bon”, a déclaré dimanche le porte-parole du gouvernement Benjamin Griveaux.

“En revanche, nous avons une méthode plus ouverte de dialogue”, a-t-il ajouté, précisant que l’exécutif était “prêt” à discuter avec les représentants de “gilets jaunes libres”, auteurs d’une tribune appelant à une sortie de crise, publiée dans le JDD.

(ATS)