Taxer les plus riches? La benjamine du Congrès américain fait des remous.

 

«Plus vous grimpez vers le haut de l’échelle, plus vous devez contribuer»: Alexandria Ocasio-Cortez, benjamine du nouveau Congrès américain, a fait une entrée tonitruante sur la scène politique en évoquant l’idée de taxes très élevées pour les plus riches.

Née d’une mère portoricaine et d’un père américain, cette démocrate new-yorkaise de 29 ans, qui revendique un ton libre et direct, a fait honneur à sa promesse pour ses premières heures en tant qu’élue de la nouvelle Chambre des représentants.

«Oui, les gens vont devoir commencer à payer leur juste contribution en impôts», a-t-elle lancé dans un extrait de l’émission «60 minutes» diffusé par la chaîne CBS.

 

 

Afin de financer un plan environnemental qu’elle soutient avec d’autres élus, ayant notamment pour but de réduire les émissions carbone à zéro d’ici 2030, celle qui est surnommée «AOC» a ainsi lancé l’idée d’une taxe touchant les plus riches, à hauteur de 60% ou 70%.

 

Faisant l’éloge du système de taxation progressive des années 60, elle a expliqué: «Votre taux d’imposition, disons, entre zéro et 75’000 dollars peut être de 10% ou de 15%. Mais quand vous arrivez dans les sommets, à partir de 10 millions de dollars, parfois vous voyez des taux d’imposition à 60 ou 70%».

Le taux maximal d’imposition aux Etats-Unis est, depuis la réforme fiscale de Donald Trump il y a un an, de 37%. Il était auparavant 39,6%. Alors même qu’elle n’a quasiment aucune chance d’aboutir, cette idée soulevée par la jeune parlementaire a récolté un large écho. Le New York Daily News a ainsi affiché son visage en Une de son édition samedi, une image qu’elle s’est empressée de retweeter.

Analysant sa proposition, le Washington Post a tenté d’évaluer ce qu’elle pourrait rapporter à l’Etat. Si les 16’000 Américains gagnant plus de 10 millions de dollars étaient taxés à 70% sur leur revenu au dessus de cette limite, le gouvernement américain récolterait 72 milliards de dollars par an, selon un expert. Probablement moins en réalité, tempère-t-il toutefois, car les riches citoyens trouveraient probablement des moyens de contourner ce nouvel impôt.

Dans une tribune publiée dans le New York Times, le prix Nobel d’économie Paul Krugman a appuyé la proposition de la jeune élue, regrettant les tentatives répétées de «la dépeindre comme écervelée et ignorante». «Et bien, sur la question fiscale, elle dit simplement ce que de bons économistes disent,» a-t-il jugé.

– Pas une «petite fille» –

Depuis sa victoire surprise lors des primaires démocrates fin juin face à un baron de la Chambre des Représentants, Alexandria Ocasio-Cortez est devenue l’une des figures les plus en vue de son parti.Elle a aussi prouvé qu’elle avait du répondant face aux attaques, nombreuses, de ses adversaires politiques.

Le vétéran républicain Ed Rollins parle d’elle comme d’une «petite fille» ? La réponse fuse: «Cet homme est un argument vivant pour taxer la misogynie à 100%». Vendredi, une vieille vidéo circulant sur internet et montrant la fougueuse démocrate en train de danser s’est retournée à son avantage, contrairement à ce qu’attendaient ses opposants.

Se jouant de la situation, elle a répondu en postant sur les réseaux sociaux — où elle est très présente — une nouvelle vidéo d’elle dansant devant son bureau, accompagnée de ce commentaire: «J’entends dire que le parti républicain pense que les femmes qui dansent sont scandaleuses. Attendez qu’ils découvrent que les femmes parlementaires dansent aussi!»

Ancienne serveuse dans un bar new-yorkais, AOC entend ainsi incarner la nouvelle vague de jeunes élus, plus divers que leurs prédécesseurs, entrés au Congrès à l’occasion des élections de mi-mandat, et faisant souffler un vent de fraîcheur sur l’institution. S’affichant volontiers comme prête à bousculer les élites, elle a peu à peu conquis une place de premier choix au sein de l’aile gauche de son parti.

«Seuls les radicaux ont, dans l’Histoire, changé ce pays», a expliqué la jeune femme sur CBS. «Abraham Lincoln a pris la décision radicale de signer la proclamation d’émancipation. Franklin Delano Roosevelt a pris la décision radicale de s’embarquer dans une série de mesures comme la sécurité sociale.» Et de déclarer fièrement: «Si c’est ce que radical signifie, appelez-moi radicale».

(nxp/afp)