Torture: mea culpa américain à Genève

Au lendemain du passage des États-Unis devant le Comité des Nations Unies contre la torture, les ONG saluent l’engagement de l’administration Obama à appliquer la Convention contre la torture aux prisonniers de Guantánamo. Ce n’était pas gagné. Dans l’entourage du président américain, un front de résistance a, jusqu’à la dernière minute, milité pour que ce texte ne s’applique pas aux prisonniers détenus en dehors du sol américain. D’un autre côté, les États-Unis ont pu mesurer l’impact négatif sur l’opinion publique mondiale des abus commis au nom de la lutte contre le terrorisme.

«Malheureusement, après le 11 Septembre, nous n’avons pas toujours été à la hauteur de nos propres valeurs. Nous avons franchi la ligne», a reconnu mercredi à Genève Mary McLeod, l’un des conseillers juridiques membre de la délégation américaine. Ce mea culpa sera-t-il suffisant? Pas sûr. D’ici à quinze jours, les experts du Comité des Nations Unies contre la torture doivent rendre un rapport qui pourrait se révéler cuisant. Car au-delà des mots, il y a les actes.

«L’injustice persiste»

S’il note un progrès dans la position américaine d’appliquer le droit «en dehors de son territoire», le secrétaire général de l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT), Gerald Staberock, estime qu’il reste beaucoup à faire avant que les États-Unis ne soient totalement dans les clous. Et de relever: «Obama explique que les abus ont été commis sous l’ancienne administration. Mais ce n’est pas un problème passé, c’est un problème d’aujourd’hui. Un système a été mis en place pour que les détenus ne racontent pas ce qu’ils ont vécu. Donc l’injustice persiste. Et la lutte conte l’impunité reste un défi majeur.»

Du côté d’Amnesty International, on salue aussi les progrès mais en ajoutant qu’il revient à l’administration Obama de prolonger cet engagement par des mesures concrètes. «Aujourd’hui, les États-Unis se disent attachés aux principes de la Convention contre la torture alors même qu’ils s’abstiennent de traduire en justice des personnes soupçonnées d’avoir perpétré des actes de torture», déplore Zeke Johnson, directeur du programme Personnes en danger d’Amnesty International. Ce que redoutent les ONG, c’est un engagement a minima de l’administration Obama. «Les États-Unis doivent explicitement accepter que le traité applique partout, y compris à l’étranger», insiste Laura Pitter, d’Human Rights Watch. L’ambassadeur Keith Harper, représentant les Etats-Unis auprès du Conseil des droits de l’homme, a promis de poursuivre ce «dialogue constructif» avec les organes onusiens et la société civile.

(TDG)