L’armée tchadienne au Nigeria pour en finir avec Boko Haram

 

L’armée tchadienne a déclenché mardi 3 février une offensive terrestre au Nigeria contre Boko Haram,pénétrant dans la ville de Gamboru depuis la frontière camerounaise après de violents combats avec les islamistes qui contrôlaient la ville depuis plusieurs mois. C’est la première fois que des troupes tchadiennes, qui se sont déployées mi-janvier au Cameroun avec la volonté d’en découdre avec Boko Haram, pénètrent sur le sol du Nigeria, dont l’armée est très critiquée pour son inefficacité dans la lutte contre le groupe islamiste.

D’autres forces tchadiennes se sont massées à la frontière entre le Niger et le Nigeria, à proximité immédiate de bastions de Boko Haram.

«Un contingent d’environ 400 véhicules et des chars est positionné de Mamori à Bosso», deux bourgades de l’est nigérien, qui ne sont séparées du Nigeria que par une rivière, la Komadougou Yobé, a annoncé la radio privée Anfani, basée à Diffa (sud du Niger).

Dangereux équilibre

La France soutient ces mouvements avec des missions de reconnaissance au-dessus du Tchad et du Cameroun, ont indiqué mardi des sources officielles françaises, précisant que du renseignement était délivré à ces pays largement impliqués dans la lutte contre Boko Haram.

L’offensive tchadienne intervient à l’approche de l’élection présidentielle nigériane du 14 février, où le chef de l’Etat Goodluck Jonathan vise un nouveau mandat dans un pays miné par les attentats et les attaques de Boko Haram.

Ces attaques, menaçant de plus en plus l’équilibre régional en pesant sur les frontières du Cameroun, du Niger et du Tchad, ont entrainé la réaction militaire de N’Djamena, très soucieuse de se prémunir d’infiltrations de djihadistes sur son sol.

Président nigérien visé

Le président a échappé lundi à un attentat-suicide à la sortie d’un meeting dans le nord-est du Nigeria, région dont Boko Haram contrôle des pans entiers. L’attentat-suicide qui a secoué le parking du stade de Gombe quelques minutes après le départ de M. Jonathan, lundi après-midi, n’a pas été revendiqué pour l’instant, mais deux femmes kamikazes sont soupçonnées d’en être à l’origine, selon les secours et une source hospitalière.

Mardi matin, les blindés et les fantassins tchadiens ont franchi le pont séparant la ville camerounaise de Fotokol de la ville frontalière nigériane de Gamboru, au Nigeria, après d’importants bombardements aériens et d’artillerie et des échanges de tirs nourris avec les islamistes, qui avaient pris la ville il y a plusieurs mois, a constaté un journaliste de l’AFP.

Les opérations aériennes ont duré près d’une heure, puis les blindés tchadiens ont défoncé les obstacles placés sur le pont pour permettre le passage des troupes, qui sont entrées dans Gamboru vers 11h00.

Troupes et artilleries

L’intégralité du contingent de 2.000 hommes environ, selon des sources militaires, était entré au Nigeria à la mi-journée.

«Ils ont traversé le pont accompagnés de guides originaires de Gamboru qui avaient fui la ville et en connaissent tous les coins», a affirmé Umar Babakalli, qui réside à Fotokol.

«Un grand nombre de troupes sont entrées dans Gamboru. Ils sont entrés avec de l’artillerie lourde, deux chasseurs les soutenaient», a expliqué un autre habitant de Fotokol Idrissa Amadoun

Les forces camerounaises, et notamment l’unité d’élite, le Bataillon intervention rapide (BIR), qui protégeaient Fotokol depuis des mois, sont restées sur leurs positions, a constaté le journaliste de l’AFP.

Informations contradictoires

Le Nigeria avait annoncé lundi en fin de journée avoir repris Gamboru, alors même que l’armée tchadienne y avait pilonné pendant trois jours consécutifs les positions de Boko Haram.

Les Tchadiens, qui ont préparé le terrain avec leurs bombardements, se méfiaient des combattants islamistes. «Ils sont dans toute la ville, se cachent dans les maisons et ont placé des snipers partout», avait expliqué dimanche à l’AFP un officier de l’armée tchadienne, sous couvert d’anonymat.

Boko Haram avait pris le contrôle de plusieurs villes longeant la frontière nord-est du Nigeria, multipliant les attaques dans les pays frontaliers et s’aventurant en particulier au Cameroun.

Secte radicale

La force régionale censée lutter contre le groupe islamiste s’était retirée de sa base de Baga, sur les rives sud du lac Tchad, au Nigeria, en raison de différends entre Abuja et ses voisins, laissant la voie libre aux islamistes qui y avaient commis, début janvier, des massacres et des destructions massives, qualifiés de «crimes contre l’humanité» par la communauté internationale.

L’insurrection de Boko Haram, qui prône l’instauration d’un islamisme radical et s’associe aux idées d’Al-qaïda et de l’Etat islamique, a fait plus de 13.000 morts et 1,5 million de déplacés au Nigeria depuis 2009.

L’Union africaine a finalement réagi vendredi et samedi en appelant à la mobilisation en Afrique contre les islamistes, lors d’un sommet à Addis Abeba, et demandé la mise en place d’une force militaire régionale de 7.500 hommes, une idée soutenue par le secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon.

(ats/Newsnet)