[Tamba Portrait] Boubacar Dembo Tamba « le métier de journaliste nécessite beaucoup de patience, de capacité d’écoute et de discernement, de courage et de pugnacité ».

 

Au fil de ses pérégrinations dans la région tambacoundoise, tambacounda.info ambitionne de présenter à travers des interviews le profil de cadres ou entrepreneurs dont le cœur et l’esprit restent fortement attachés à la région de Tambacounda. C’est au tour de Boubacar Tamba, journaliste, administrateur et rédacteur en chef du site tambacounda.info ; secrétaire exécutif d’AGERNA et membre du Comité National ITIE-SENEGAL.

  1. Monsieur Tamba, pouvez-vous vous présenter aux lecteurs de Tambacounda.info ?

    Je suis un diola tropicalisé mandingue. Je fus directeur d’école et j’ai fais vite le choix de quitter ce métier sur les conseils de mon défunt père qui fut directeur d’école aussi, car il ne cessait de me claironner que je ne pouvais pas être bon partout et je risquais de sacrifier des générations d’enfant. J’ai opté pour le journalisme pour lequel j’ai subi plusieurs formations, et depuis 1998 je travaille pour SUD FM. Présentement je suis administrateur et rédacteur en chef de www.tambacounda.info, je suis le Secrétaire Exécutif d’AGERNA, je suis le chargé de communication de la section sénégalaise de Publiez Ce Que Vous Payez, je suis membre du Comité National ITIE et je suis enfin consultant communicant dans le domaine géo extractif.

  2. Comment a germé en vous la passion du journalisme ?

    Je conçois ce métier comme le meilleur moyen de lutter contre les inégalités sociales, de consolider la démocratie et l’Etat de droit.

  3. Depuis que vous êtes à la tête du site www.tambacounda.info la ligne éditoriale a complètement changé et le nombre de visiteurs à explosé. Quel à été votre crédo et comment expliquez-vous ce succès ?

    D’abord beaucoup travailler, ensuite opérer un choix, celui de ne point verser à outrance dans des faits divers qui ne sauraient contribuer à attirer des investisseurs ou autres organismes de bienfaisance vers la région dont le seul développement constitue notre crédo. Enfin, mettre en relief les bonnes initiatives, critiquer objectivement et pointer du doigt les opportunistes et autres fossoyeurs de l’œuvre de développement de la région et du pays.

  4. Quel regard avez-vous sur le métier du journalisme à Tambacounda ?

    L’environnement est peu propice. La région est vaste comme le monde, enclavée par endroits, paradoxalement riche en ressources naturelles mais dont la plupart des habitants vit dans une situation de pauvreté, les moyens de communication ne sont pas toujours ce qu’elles doivent être et cela ne peut pas être sans avoir des répercussions sur le journaliste officiant dans la région, et qui est loin d’être un empire dans un empire ! Il vit ces réalités, surtout que certains d’entre eux ne sont pas aussi mis dans les conditions minimales de performance par leurs employeurs. Cela joue négativement sur le journaliste qui n’est pas un immortel, ce qui se traduit par moments des productions que l’on sait, qui sont dénouées de toute pertinence et de tout intérêt pour les populations. Les sujets tournent rarement au tour des genres d’opinion, c’est le factuel qui domine. Cela pourrait peut-être s’expliquer par la nature des sources, sources blanches ou vertes ou sources ouvertes, sources grises ou semi ouvertes et sources noires complètement fermées qui, elles, nécessitent un certain profil.

  5. Que conseilleriez-vous aux jeunes Tambacoundois et Tambacoundoises qui s’intéressent au métier du journalisme ?

    De prendre le temps de beaucoup se former surtout dans la langue officielle de travail de notre pays, de bien prendre le temps de s’outiller en TIC d’autant plus qu’ils savent mieux que quiconque que nous sommes à l’ère des News Medias, ils doivent être à même de bien collecter, de bien traiter, mais de bien analyser le sujet avant de le diffuser ou de le publier. Ce métier nécessite aussi de la patience, beaucoup de patience même, de capacité d’écoute et de discernement, de courage et de pugnacité.

  6. Vous êtes le secrétaire exécutif d’AGERNA. Pouvez-vous nous parler de cette structure ?

    L’Association pour une Gestion Efficace et Rationnelle des Ressources Naturelles est une jeune association que j’ai créée suite à ma formation au Centre d’Excellence sur la Gouvernance des Ressources Naturelles de l’Université Catholique d’Afrique Centrale de Yaoundé. Au préalable, je me suis beaucoup intéressé aux sujets relatifs au secteur géo extractif dans la région de Kédougou, suite à une collaboration avec l’ONG La Lumière, pionnière en la matière au Sénégal et dont je serre la main au passage à son vaillant patron Ibrahima Sory Diallo, une autre fierté nationale. AGERNA s’inscrit dans ce sillage pour opérer dans la communication spécifique au secteur des mines, du gaz et du pétrole. AGERNA s’intéresse aussi au suivi des contrats, notamment ses aspects sociaux, à l’exploitation artisanale de l’or, au plaidoyer, entre autres domaines.

  7. Nous vous savons très impliqué dans la gestion des mines au Sénégal. Quel regard portez-vous sur ce secteur à Tambacounda ?

    La seule unité industrielle minière de la région de Tambacounda est l’unité de production de grès quartzitiques de Bakel qui vient d’être inaugurée par le Président Macky Sall au cours de sa tournée économique dans la vallée et l’avait conduit à Bakel. Cette unité exploite une petite mine mais qui a déjà des impacts positifs dans la contrée, en termes d’infrastructures hydrauliques, d’emploi, de santé, entre autres. Sinon, il n’y a que le célèbre village de Diyabougou où d’importantes quantités d’or sont exploitées à l’échelle artisanale. Peut être qu’un jour, la compagnie détentrice du titre minier dans lequel le couloir d’orpaillage de Diyabougou est tracé décidera d’y implanter une mine comme à Gora car cela pourrait avoir des retombées significatives pour Tambacounda. La région regorge de richesses minières dont le potentiel n’est pas exactement connu car, il faut pour cela de l’exploration et des recherches qui nécessitent de gros moyens que l’Etat n’a toujours pas. Il faut que des investisseurs s’y intéressent pour enfin voir les choses bouger. Maintenant, si le projet de port minéralier de Bargny aboutit avec l’exploitation du fer de la Falémé, le chemin de fer devant être construit pourrait aussi contribuer à avoir des impacts significatifs pour la région de Tambacounda.

  8. Pensez-vous qu’il est possible de mener une politique de gestion des mines qui pourrait sortir Tambacounda de sa pauvreté ?

    Vous savez, exceptée l’exploitation du quartzite de Bakel, l’or de Diyabougou artisanalement exploité, il n’ya pas d’autres minerais en exploitation industrielle dans la région de Tambacounda. Si, dans le cadre de la politique d’organisation de l’exploitation artisanale de l’or amorcée par les pouvoirs publics, des initiatives sont prises pour installer un comptoir d’achat de métaux et pierres précieux à Bakel ou Tambacounda pour l’or extrait à Diyabougou et non à Kédougou, avec toutes les mesures d’accompagnement qui s’imposent, cela pourrait sensiblement jouer sur le tissus économique de la région de Tambacounda. L’autre facteur, à mon avis non négligeable, est qu’avec les politiques de développement des ressources minérales que la CEDEAO appelle de tous ses vœux, il faut que nos Etats aient des ressources humaines de qualité, en termes d’ingénieurs des mines car là nous en disposons peu, en termes de juristes fiscalistes spécialisés. Pour ce faire, le Président Macky Sall avait annoncé la création d’une Ecole des Mines, du Gaz et du Pétrole qui pourrait avoir une vocation sous régionale. La meilleure proposition de site à mon avis est Tambacounda pour sa position géographique. Cela pourrait aussi contribuer à impacter positivement l’économie de la région.

  9. Vous êtes à Kinshasa au Congo, quelle est la raison de ce voyage ?

    A Kinshassa nous sommes en conclave pour renforcer les liens entre les membres des différents membres de la société civile d’Afrique francophone et les représentants au Conseil de l’Initiative pour la Transparence dans les Industries Extractives (ITIE), pour faciliter l’échange d’expérience au tour de la transparence des contrats, du projet pilote sur la propriété réelle, la gestion des revenus infranationaux, la gouvernance des groupes multipartites et la mesure de l’impact de la mise en œuvre de l’ITIE au niveau des différents pays. Il s’y est ajouté l’importante session de formation sur l’utilisation des données issues des rapports ITIE à des fins de plaidoyer.

  10. Vous qui avez une vision très large de la situation politique dans la région de Tambacounda. Quelle analyse en faites-vous ?

    Que les politiques arrêtent de se moquer des populations en les utilisant comme faire valoir et qu’ils s’attèlent à concevoir et à mettre en œuvre des programmes et politiques qui puissent les sortir de la triste et regrettable situation dans laquelle elles se trouvent. Que ceux qui ont choisi la politique comme métier ou moyen de promotion sociale se mettent à l’esprit qu’ils ne sont pas les seuls à exister et à être « capables » de soulager les populations. Il y a d’autres valeureux fils du terroir qui sont dans d’autres créneaux, par voie de conséquence, qu’ils ne les fatiguent pas avec leurs interminables et insipides querelles de chapelles qui enfoncent davantage la région dans une situation peu enviable, alors qu’il est parfaitement possible de la hisser parmi les régions les plus prospères de ce pays eu égards à ses nombreux atouts. Il n’y a que cela qui compte pour moi.

  11. Votre dernier mot ?

    Il est possible de changer la situation de Tambacounda mais à mon avis, cela passerait par d’abord mettre au niveau des instances politiques de décision des hommes et des femmes ayant un minimum d’aptitudes. Ensuite, il faut que les cœurs vibrent à l’unisson car le seul dénominateur commun entre le politique et le non politique, l’artisan et le technicien supérieur, le vendeur et l’acheteur, l’enseignant et l’enseigné, le cocher et son client, le producteur et l’industriel, c’est Tambacounda.