Tambacounda: L’amir de la JIR invite à combler le fossé séparant le temporel et le spirituel

 

L’amir de la Jamatou Ibadou Rahmane (JIR), Abdoulaye Lam, a invité, dimanche à Tambacounda, les politiques et les religieux à combler le fossé qui sépare le spirituel et le temporel, pour mieux travailler au profit de la société. Professeur d’arabe et spécialiste du fiqh (jurisprudence islamique), Oustaz Abdoulaye Lam, animait au quartier Gourel, sa première conférence en tant qu’amir de la JIR, sur le thème ‘’Islam, système de vie’’. Il a remplacé à ce poste Serigne Babou à l’issue du congrès de la structure, en janvier dernier.

Invitant à une ‘’compréhension plus large’’ de la religion, au-delà des actes cultuels proprement dits que sont la prière la zakat, le pèlerinage et le jeûne, qui couvre tous les aspects de la vie, il a estimé qu’une meilleure compréhension de l’islam comme ‘’système complet’’ de vie, peut permettre aux musulmans d’améliorer leur quotidien.

Il faut que le musulman considère que tous les actes qu’il pose dans la journée, sont actes de foi, qu’il s’agisse d’activités professionnelles ou de relations interpersonnelles. ‘’Que le musulman comprenne qu’en allant le matin à son bureau, à l’hôpital au marché, il est dans un acte d’adoration, dans la mesure où il doit y prendre en compte les recommandations divines’’, a-t-il dit. Si bien que son action sera marquée par l’éthique, où qu’il soit. C’est cet ‘’équilibre’’ délicat que recherche l’islam. ‘’En islam, le spirituel et le temporel ne font qu’un’’, a-t-il relevé, précisant que ‘’le président de la République doit pouvoir diriger la prière, faire un sermon, comme un ministre peut être aussi un religieux’’. Au regard de l’islam, ‘’il n’y a aucune contradiction’’ entre les deux postures, affirme-t-il.

Toutefois, une compréhension incorrecte de l’islam fait que les populations ont tendance à s’indigner en voyant un imam descendre dans l’arène politique. Dans le même temps, quand un politicien écorche un verset coranique au ‘’gamou’’, on s’empresse de souligner son ignorance de la religion. ‘’C’est un fossé qui existe entre nous et qu’il faut combler et que chacun continue de jouer le rôle qui est le sien : président et imam, ministre et imam, il n’y a aucune contradiction’’, soutient-il. Par le passé, le colon a favorisé cette dichotomie entre spirituel, en écartant les religieux de la chose politique, mais quand il a eu besoin d’eux pour prendre pied dans la société, il a fait appel à eux, a-t-il indiqué.

De la même façon, les rois, quand ils ont été défaits par le colonisateur, se sont réfugiés auprès des religieux, nouant finalement avec elles des liens d’alliance par le mariage. Un des exemples typiques est celui de Lat-Dior qui avait rejoint Maba Diakhou Bâ.

Aujourd’hui, ‘’beaucoup d’hommes religieux ont compris que c’était une duperie, et commencent à s’investir en politique’’. Il a cité les exemples de Serigne Mansour Sy Diamil de Tivaouane, de Serigne Modou Kara de Touba, de l’imam Mbaye Niang, des prédicateurs qui ont créé leur propre parti. Les politiciens ont aussi compris la tromperie et sont allés faire allégeance à des religieux, a-t-il poursuivi.

‘’Heureusement qu’aujourd’hui, tout le monde a compris que cette dichotomie est un leurre et est prêt à enterrer cette dissension pour travailler pour le bien du pays la main dans la main’’. Il a rappelé que les politiciens de gauche, sous l’emprise du communisme, étaient réputés antireligieux, car estimant, comme le disait Marx, que ‘’la religion est l’opium du peuple’’, la ‘’tromperie’’. Mais tous ont renoué avec la religion, a-t-il fait observer.

Identifiant huit dimensions de l’islam, dont celles politique, économique et financière, sociale, culturelle, juridique, réformatrice, il a relevé que la spiritualité est celle qui doit sous-tendre toutes les autres. Selon lui, sans elle, il n’y a point de progrès. ‘’Du gardien au président de la République, en passant par le maire, chacun doit faire preuve de spiritualité’’, a-t-il dit.

Se montrant très optimiste quant à la jonction entre le spirituel et le temporel, il a salué l’introduction progressive de la finance islamique au Sénégal, par les pouvoirs publics, l’adoption des textes établissant le ‘’waqf’’, l’introduction de la zakat dans le Code général des impôts.

En outre, le gouvernement a accordé un rôle important aux religieux dans le Plan Sénégal émergent (PSE), impliquant 12 groupes religieux, dont 9 associations islamiques parmi lesquelles la JIR, dans sa vulgarisation auprès des populations.

Abdoulaye Lam a déploré une certaine vision de la laïcité qui parfois est opposée à une majorité de musulmans pour les empêcher de jouir d’un droit religieux, au nom de ce principe. Il a cité le cas de la construction d’une mosquée dans une école, que beaucoup interdiraient sous prétexte qu’elle est laïque. Ce qui peut pourtant être réfuté, à son avis résolu, en faisant prévaloir un autre principe démocratique, à savoir la loi de la majorité.

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