Moussa Togola, chef d’orchestre de Gadiaga: digne héritier du grand poète El Hadji Ganda Fadiga.

 

Le griot Moussa Togola est un élève du grand parolier soninké El Hadji Ganda Fadiga, décédé en 2009 à Paris. Dans ses chants, celui qu’on a surnommé «Maître Doctorat d’Etat» n’a jamais dévié du chemin tracé par son formateur. Il aborde dans ses productions plusieurs thèmes dont la bravoure, le courage et l’humilité.

La notoriété du griot El Hadji Ganda Fadiga, originaire de Diombokhou Maréna, dans la région de Kayes, a dépassé les fron­tières maliennes. En Afri­que, Europe, Etats-Unis ou encore en Asie, il était adulé par la communauté soninké. De son vivant, il a marqué les esprits par la sagesse de ses paroles. Il est parti pour le repos éternel le 19 septembre 2009 à Paris. Mais le maître de la parole n’a pas laissé un vide derrière lui, puisqu’il a formé plusieurs générations de «sacs à parole». Moussa Togola, surnommé «Maître Doctorat d’Etat», fut son élève durant 4 longues années. En effet, c’est en 1978 que ce petit Moise a été confié à Ganda. A l’époque, il n’avait que 15 ans. Alors, l’adolescent grandira sous l’aile protectrice de son maître qui lui apprend les rudiments du métier. «Je suis un guesere (traditionnaliste, caste proche du griot en langue soninké). J’ai appris le ganbere (guitare traditionnelle) auprès de mon maître El Hadji Ganda Fadiga. Et depuis 1978, année de mes débuts, je n’ai pas un autre boulot», confie-t-il fièrement.

Né dans le royaume de Gadiaga de l’époque, précisément à Digui, village situé dans la région de Kayes, commune de Falémé à la frontière sénégalo-malienne, Moussa Togola est aujourd’hui chef d’un orchestre  qu’il a appelé Gadiaga. Dans ses chants, il n’a jamais dévié du chemin tracé par son formateur. Moussa Togola aborde en effet dans ses productions plusieurs thèmes dont la bravoure, le courage et l’humilité. Il lui arrive aussi de dédier des morceaux à des particuliers. Et dans ces tubes,  il raconte «les hiis­sas» (légende) de plusieurs personnages historiques. A la fin de son apprentissage, renseigne-t-il, il fut accompagné chez lui avec les honneurs par Mody Fadiga, frère de son maître.

De sa carrière, l’on retient que l’artiste a déjà fait plusieurs tournées dans des pays comme l’Algérie, la France, l’Espagne, la Suisse  à la rencontre des fans. Mais de plus en plus, il dit avoir des difficultés pour obtenir un visa. Monogame et père de 7 bouts de bois de dieu, Moussa Togola n’a initié aucun de ses enfants à sa tradition. Sa progéniture a préféré s’orienter vers les études. Avant d’intégrer l’école de Ganda, M. Togola était d’abord chez El Hadji Daouda Gakou, marabout à Digui, pour y étudier le Coran comme les autres jeunes de son âge. Et à un moment, l’envie de quitter son village natal lui traversa l’esprit. Mais les parents s’y opposent, compte tenu de son jeune âge. Toutefois, il tient tête et en 1975, avec bagages, il sera stoppé net par des policiers à la frontière de Kidira. L’année suivante, il ressaye le coup et parvient à tromper la vigilance des hommes de tenue.

A Tambacounda, conte-t-il, il effectuait les travaux domestiques, moyennant la somme de 1 500 francs Cfa par mois comme salaire. Une époque bien loin de la vie qu’il mène aujourd’hui. Connu pour son rôle de régulateur social, le griot parle en plus du soninké, le wolof, le bambara et le peulh. Cet amoureux du karaté qu’il a pratiqué en France fut aussi du temps du Brésilien Ronaldinho un fervent supporter du Fc Barcelone.

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