Esclavage en Libye : un crime contre l’humanité.

 

 

Depuis un moment, sur les plateaux de télévisions, à travers les ondes des radios, sur les colonnes des journaux, les déclarations et autres incriminations fusent de partout de la part des autorités, des associations de la société civile et autres activistes pour fustiger le comportement inhumain et barbare des groupes armées et milices libyennes qui s’activent dans le commerce crapuleux et odieux des noirs africains, surtout ceux du sud du Sahara que l’on a toujours qualifié de « Crime contre l’Humanité » . Je m’en désole car, il a fallu seulement qu’une chaîne de télévision américaine en parla pour que ce brouhaha soit entretenu alors qu’en réalité depuis plus de trois ans, des compatriotes sénégalais, engagés et animés de valeurs citoyennes profondes, avaient déjà en son temps appuyé sur la sonnette d’alarme pour attirer l’attention des autorités sénégalaises afin qu’elle puissent prendre les devant, avant que l’irréparable ne se produise.

J’en veux pour preuve qu’ à la suite d’une réunion tenue avec des ressortissants sénégalais basés en France le 17 décembre 2014 au Foyer Murielle, 16 rue Fernand Leger 75020 PARIS, M.KANTE Coordonnateur a saisi par courriel , le 22 décembre 2014 , le coordonnateur de l’Association pour le Développement du Boundou et du Gadiaga : M. DIAW , pour attirer son attention sur le fait que prés de trois cent sénégalais sont détenus dans les prisons libyennes.

La plupart de ces jeunes sont des ressortissants des départements de Goudiry, Tambacounda, Kolda Kédougou, etc.… , partis à l’aventure en Libye, espérant atteindre les côtes italiennes, dans des conditions extrêmement difficiles et à la limite inhumaines.

Mobilisation pour faire libérer nos compatriotes

Dès la réception de la saisine de M. KANTE, moi-même en tant que membre de l’Association et le Coordonnateur, M. DIAW, sommes mobilisés pour faire des démarches auprès des autorités compétentes afin d’obtenir la libération de nos compatriotes sénégalais détenus dans les prisons libyennes.

A cet effet, le 22 décembre 2014 déjà, nous avions adressé une correspondance à M. le Ministre des Affaires étrangères et comme ampliataires le Directeur Général des sénégalais de l’extérieur, pour leur rapporter la situation. En réponse à ce courrier, le chargé des affaires juridiques à la Direction des sénégalais de l’Extérieur nous a promu de transmettre à qui de droit et d’en assurer le suivi.

Dans la journée du 26 12 2014, nous avons été reçus en audience par M. TINE, Ex- Président du Comite Sénégalais des Droits de l’Homme, en présence de ses plus proches collaborateurs dont son Directeur de cabinet et sa Conseillère juridique. Après lui avoir expliqué clairement les situations draconiennes que traversent nos compatriotes dans les prisons libyennes lors de ces tentatives échouées pour l’immigration et les risques qu’ils encourent entre les mains de leurs ravisseurs, M. TINE s’est dit d’emblée être à nos côtés pour mener les démarches qu’il faut et œuvrer par tous ses moyens pour que nos compatriotes soient libérés sans conditions et dans les meilleurs délais. Il avait fustigé le mutisme des autorités et même affirmé que ce problème ne date pas de maintenant et qu’il urge de trouver des solutions par le gouvernement.

Toujours préoccupé par la libération de nos compatriotes, nous avons pu décrocher une audience avec son Excellence M. Rajab SAID, en son temps Chargé d’Affaires de l’Ambassade de la Libye au Sénégal. Ainsi, avec une forte délégation, le Chargé d’affaires nous a reçus de 12 heures 30 mn à 14 heures. Après l’avoir remercié de sa disponibilité, la courtoisie dont il a fait montre, nous lui avons témoigné tout notre soutien au peuple libyen par rapport à la crise que le pays traverse actuellement. Nous lui avons fait un exposé de la situation de nos compatriotes en Libye. Son Excellence s’est d’abord félicité de notre démarche. Ensuite, il a affirmé d’emblée la complexité de cette affaire, compte tenu de la situation qui prévaut en Libye et enfin, l’autre difficulté est que notre pays ne dispose pas de représentation diplomatique dans ce pays. Il avait affirmé en son temps, qu’il n’a jamais été saisi officiellement par les autorités sénégalaises de cette situation. Cependant il dit être au courant de cette affaire par l’intermédiaire d’amis qui sont en Libye. Il nous avait même proposé de saisir d’abord les autorités sénégalaises qui à leur tour, le saisissent officiellement. Il s’était dit être parfaitement disponible et ne ménagerait aucun effort pour trouver une issue heureuse à cette situation qui n’a que trop duré et qui continue encore de faire des victimes dans cette partie du continent.

Un appel à la jeunesse sénégalaise et plus particulièrement à celle du Boundou qui en a payé le plus lourd tribu.

Cela dit, personne ne doute que nos autorités ont pris des mesures pour le rapatriement de nos compatriotes en difficultés dans cette contrée où ailleurs et assisté ceux qui veulent rentrer définitivement au pays. Au plan stratégique également des politiques publiques ont été élaborées et mises en œuvre pour occuper la jeunesse sénégalaise mais malheureusement insuffisantes et inégalement reparties sur le territoire nationale. Je sais que la région naturelle du Sénégal orientale est celle-là qui à payé le plus lourd fardeau face à cette problématique car étant par nature et depuis la nuit des temps une zone où l’émigration est non seulement liée à un problème de pauvreté, de recherche d’emploi mais un problème culturel.

Je lance un appel à la jeunesse africaine et sénégalaise mais en particulier à celle de mon Boundou natal : Pour leur dire que la plupart des candidats à l’émigration ont entre 16 et 30ans. Ils ont tous dans la tête ce rêve de découvrir « le mirage européen », mais dites vous que ce rêve est devenu un cauchemar. Vous avez la possibilité, en restant dans votre terroir, à côté de vos parents, la possibilité de gagner votre vie à la sueur de votre front sans prendre le risque de mourir dans des conditions désastreuses. Et ce faisant, non seulement vous contribuerez au développement de la localité qui n’a que trop souffert des politiques discriminatoires des différents régimes qui se sont succédés à la tête de ce pays mais aussi de par la carence et l’ignorance de ses dirigeants qui y conduisent la politique locale.

Si réellement le gouvernement en place veut éradiquer ce phénomène dans cette partie sud-est du Sénégal, des politiques publiques courageuses et de grandes envergures doivent être prises sur le plan des investissements structurant, c’est-à-dire à forte valeur ajoutée et durables. Les priorités, ce sont d’abord des investissements massifs sur la modernisation et la mécanisation de l’agriculture, pour que les populations puissent se nourrir elles-mêmes sans avoir besoins d’un SOS pour la faim. Pour rappel, le département de Goudiry a été cité comme l’une des plus pauvres du Sénégal et l’insécurité alimentaire y règne en maitre. Ensuite, le gouvernement doit tout mettre en œuvre pour qu’enfin l’Université polarisant les régions de Tambacounda et de Kédougou soit fonctionnelle dans les meilleurs délais et au plan des enseignements-apprentissage, donner la priorité aux filières agricoles, minières et techniques, compte tenu des potentialités de ces pôles-territoires. A La suite d’une bonne qualification professionnelle, les jeunes pourront bénéficier des financements et développer l’économie locale et rurale pour faire disparaitre la pauvreté dans cette zone. C’est à la suite de ces seules conditions que le secteur privé complètement absent, pourra enfin investir dans cette partie du Sud Est.

Aux jeunes, ne mettez pas la pression sur vos parents pour vous payer le voyage vers « l’Enfer » !!!! Aux parents, prenez le temps de dissuader vos enfants qui sont encore tentés et qui n’ont pas encore compris que l’avenir du monde c’est l’Afrique et que la locomotive qui conduira les pays de la sous- région vers le l’émergence, c’est bien le Sénégal.

Quant aux solutions, d’emblée, je dis que face à ce drame, il faut vaincre le mal par la racine. Le commerce des Hommes noirs et la prise en otage des candidats à l’émigration en Lybie n’est que le problème alors que la problématique est beaucoup plus profonde. Et c’est à celle là qu’il faut s’attaquer. J’ai entendu des associations prôner une opération coup de force menée conjointement entre la diplomatie sénégalaise et les forces armées onusiennes ou africaines pour extirper nos compatriotes détenus dans les geôles des milices libyennes. Procédant ainsi je doute fort qu’il ne bute tout droit dans le mur car n’ayant pas un interlocuteur légal et légitime pour obtenir leur libération. Ensuite quelle sera la stratégie à adopter ? Y iront-ils en opérations commandos avec les forces de l’UA ou des NU, auxquels cas, ils feront face à des groupes armée jusqu’aux dents, prêt à combattre au prix de leur sang ? Si l’on sait que les brigades de Misrata sont connues pour leur radicalisme religieux et leur bravoure au combat et sont une armée dans l’armée libyenne. Ou bien, quel levier actionner au plan diplomatique pour faire revenir la paix dans cette partie de l’Afrique, en organisant une table ronde internationale sur le retour de la paix en Lybie avec comme préalable le mea -culpa des occidentaux qui ont mis le pays dans le chao total sur la base de préjugées politiques politiciennes ? Un pays sans État où la loi du plus fort est la meilleure ? Où des passeurs qui contrôlent le Business et des vendeurs d’Hommes noirs font régner la loi. Certes, il y’a une urgence qui consiste à faire libérer nos compatriotes mais je pense que la deuxième hypothèse reste la plus plausible. Sa mise en œuvre prendra du temps mais en définitive elle réussira à faire réconcilier le peuple libyen. La détention et la vente des hommes noirs en Lybie est un problème qu’il faut gérer mais la problématique à solutionner c’est le retour de la paix en Lybie.

EL Seydou Nourou SY /Analyste en GRH /DGPPE/MEFP
Membre de la Coordination des Cadres APR
Email : syseydounourou@yahoo.fr
DAKAR – SÉNÉGAL
TEL/77 655 58 83