Genève: Une ONG veut placer Bouteflika sous curatelle

 

L’avocate d’une ONG a déposé vendredi une demande de curatelle du président algérien, qui est toujours soigné aux HUG.

Dans cette requête déposée devant le Tribunal de Protection de l’adulte et de l’enfant de Genève, l’avocate Saskia Ditisheim, présidente de la branche suisse de l’ONG Avocats sans frontières, demande la nomination d’un ou plusieurs curateurs en invoquant l’état de santé de M. Bouteflika. Agissant pour le compte d’une citoyenne algérienne, l’avocate affirme que la «santé fragile» de Bouteflika l’expose à être «manipulé» par son entourage.

L’avocate estime «évident que le président algérien est à ce jour incapable de discernement, dans un état de santé très précaire, et que tous ses actes, aussi bien le dépôt de sa candidature que les communiqués, ne sont pas effectués par lui-même mais par son entourage politique et familial qui le manipule» Selon elle, on peut clairement parler de «séquestration et usurpation de la pensée». Sa liberté de pensée est violée, affirme M. Ditisheim, interrogée par Keystone-ATS.

«Chance de succès»

Il n’est pas clair si le tribunal genevois admettra d’examiner cette requête et si elle a une chance d’être acceptée. «Le tribunal est compétent et vu les circonstances il y a une chance de succès importante», estime la présidente de la branche suisse de l’ONG Avocats sans frontières.

La requête de curatelle demande aussi d’«autoriser les curateurs à délier les médecins des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG)» du «secret médical» à l’égard du président algérien. Et à les «autoriser à obtenir une attestation médicale se prononçant sur ses aptitudes à gouverner un pays». Elle demande que «toute communication officielle au nom» de M. Bouteflika fasse l’objet d’un «accord préalable» des curateurs «afin de s’assurer que les propos tenus émanent réellement du pupille».

«Ce curateur devra être nommé en dehors du cercle entourant le président et devra nécessairement faire preuve de neutralité et dénué de tout conflit d’intérêt éventuel», demande-t-elle.

Des manifestations se succèdent depuis le 22 février en Algérie pour demander au président Bouteflika, 82 ans, de renoncer à briguer un cinquième mandat à l’élection du 18 avril. M. Bouteflika est hospitalisé aux HUG depuis le 24 février, pour des «examens médicaux» selon la présidence algérienne. M. Bouteflika, président depuis 1999, a été rarement vu en public depuis un AVC dont il a été victime en 2013.

«Faire abstraction du politique»

Selon le juriste Nicolas Jeandin, professeur de droit à l’Université de Genève, il revient aux autorités judiciaires algériennes de déterminer si un citoyen doit être placé sous mesure de curatelle. Mais si un tribunal helvétique estime qu’il existe un besoin urgent de protéger un individu vulnérable, il pourrait intervenir, déclare cet expert à l’AFP. Il souligne que «la question est de savoir s’il y a urgence». «En théorie, le juge suisse doit faire abstraction du plan politique (…). Le juge doit déterminer si la personne a besoin d’aide», ajoute-t-il.

(nxp/ats)