Bâle parmi les cibles possibles «L’EI n’a aucune raison d’attaquer la Suisse»

 

Des réservoirs de pétrole se situant dans un port sur le Rhin étaient au coeur d’un projet d’attentat de l’organisation Etat islamique (EI) au mois de janvier dernier, selon des documents secrets qui émanent de forces dirigeantes de l’EI que le «Sunday Times» a pu analyser. L’attaque était censée déclencher une «catastrophe économique». Mais contrairement à ce que l’on pourrait penser, les plans de l’EI n’étaient pas dirigés contre la Suisse, selon Jacques Baud, expert en terrorisme, qui a répondu aux question de nos confrères de «20 Minuten».

M. Baud, des données saisies sur des combattants syriens ont montré que l’EI voulait attaquer des réservoirs de combustible au bord du Rhin dans le port de Bâle….
Halte. Tout d’abord, il faut dire que d’après les informations dont je dispose, il ne s’agit pas de plans d’attaque, mais un catalogue de cibles. En d’autres termes, une vue d’ensemble des destinations possibles. Aucune mesure préparatoire concrète n’a été prise. Il serait trompeur et exagéré d’affirmer le contraire.

Mais pourquoi la Suisse est-elle ciblée par l’EI?
Ce n’est tout simplement pas le cas. Je suis d’avis que le groupe Etat islamique n’a aucune raison de mener des attaques contre la Suisse. Par le passé, l’EI s’est constamment dirigé contre des pays qui étaient militairement impliqués en Syrie ou en Irak. Par exemple les États-Unis, la France, l’Angleterre, l’Allemagne ou la Suède. Il n’y a aucune raison de supposer que le groupe jihadiste ait changé son orientation idéologique.

Si l’Ei voulait vraiment attaquer la Suisse, l’accent serait mis sur la population et pas nécessairement sur les réservoirs de pétrole dans la zone frontalière. L’idée aurait probablement été de vouloir frapper la France et l’Allemagne et il y aurait eu des conséquences pour la Suisse. Mais nous n’étions pas la cible.

Ça veut dire qu’on peut baisser la garde, il ne nous arrivera rien de toute façon?
Non, la Suisse n’est pas à l’abri du terrorisme, les infrastructures critiques et la population doivent être protégées. Mais tant que la Suisse ne sera pas impliquée dans la coalition contre l’EI, elle ne sera pas considérée comme un ennemi. Et donc pas une cible.

Bien entendu, il n’est pas exclu que des attaques contre des «cibles ennemies» – par exemple contre les ambassades française ou belge – soient menées sur le sol suisse. Mais même cela est peu probable: l’EI pourrait tout aussi bien attaquer ces ambassades en Jordanie, en Turquie ou en Arabie saoudite. Mais ce n’est pas le cas.

Mais la Suisse n’appartient-elle pas à l’Occident, que l’EI veut détruire?
Non. L’EI n’a jamais dit cela: ce ne sont que des déclarations de politiciens et de soi-disant experts (surtout en France et en Belgique). L’EI a déjà combattu 70 pays en Irak et en Syrie – pourquoi ouvrir un nouveau front?

Son objectif est de dissuader l’Occident de s’engager militairement, politiquement, religieusement et sur le plan humanitaire dans le monde islamique. Même si l’EI n’a pas réussi, cette idée reste très forte auprès des autres groupes jihadistes.

(dk/mst)