L’ancien président égyptien Mohamed Morsi est mort

 

L’ancien président égyptien issu des Frères musulmans Mohamed Morsi, 67 ans, est mort lundi après une audition devant un tribunal du Caire, près de six ans après sa destitution par son successeur Abdel Fattah al-Sissi, alors chef de l’armée.

«Le tribunal lui a accordé le droit de parler pendant cinq minutes… Il est tombé sur le sol dans la cage des accusés… et a été immédiatement transporté à l’hôpital…» où il est décédé, selon un communiqué du parquet général égyptien.

«Il est arrivé à l’hôpital à exactement 16H50 et il n’y avait pas de nouvelles blessures visibles sur le corps», a-t-il le parquet général. L’ancien président, en détention depuis juillet 2013, comparaissait lundi dans la cage réservée aux accusés à l’intérieur du complexe pénitentiaire de Tora dans le sud du Caire.

«Plus de pouls»

Interrogé par l’AFP, l’un de ses avocats, Abdelmoneim Abdel Maksoud, a déclaré: «nous n’avons même pas pu le voir au tribunal à cause des parois de verre blindé (du box) insonorisé. Mais d’autres détenus nous ont fait signe qu’il n’avait plus de pouls».

«Je l’ai vu emporté sur une civière dans le complexe judiciaire» de la prison de Tora, a-t-il ajouté, précisant que ni lui ni la famille du président défunt ne savait vers quel hôpital il avait été emmené. Selon Me Maksoud, ses enfants espèrent le voir enterré dans sa région natale de Charqiya (nord) mais «cette décision relèvera des autorités et non de la famille».

«Meurtre à petit feu»

Dans un message posté sur Facebook, Ahmed, le fils de M. Morsi a confirmé la mort du président déchu. Le Parti de la liberté et de la justice de M. Morsi, le bras politique des Frères musulmans, a parlé d’un «assassinat», dénonçant dans un communiqué de mauvaises conditions de détention dont «le but était de le tuer à petit feu».

En mars 2018, une commission britannique indépendante avait condamné son maintien à l’isolement 23 heures par jour, dans des conditions de détention pouvant «relever de la torture ou du traitement cruel, inhumain ou dégradant».

«Le refus d’un traitement médical de base auquel il a droit pourrait entraîner sa mort prématurée», avait déclaré devant le parlement britannique le député Crispin Blunt, président de cette commission.

Le chef de l’Etat turc Recep Tayyip Erdogan, allié de l’ancien président islamiste, lui a rapidement rendu hommage en le qualifiant de «martyr». L’émir du Qatar, cheikh Tamim ben Hamad Al-Thani, a lui exprimé «sa profonde tristesse».

Selon Jonathan Schanzer, du cercle de réflexion Foundation for Defence of Democracies (FDD), «étant donné les circonstances, Mohamed Morsi sera considéré comme un martyr. Et les théories du complot autour de sa mort vont certainement prospérer». Mais selon ce dernier, «les Frères musulmans resteront moribonds en Egypte. Et ils resteront affaiblis dans le reste de la région».

Répression sans merci

Dans un communiqué, l’ONG Amnesty International a demandé aux autorités une «enquête immédiate» sur la mort de M. Morsi, qualifiée de «profondément choquante». L’organisation de défense des droits humains Human Rights Watch (HRW) a également réagi. Sa directrice pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord, Sarah Leah Whitson a dénoncé sur Twitter «l’échec du gouvernement à lui accorder des soins médicaux adéquats, encore moins des visites de sa famille».

Le leader islamiste était emprisonné depuis sa destitution par l’armée. Il avait été jugé par la suite dans plusieurs affaires dont un dossier d’espionnage au profit de l’Iran, du Qatar et de groupes comme le Hamas à Gaza. Le mouvement islamiste au pouvoir dans l’enclave palestinienne s’est dit en deuil après la mort de M. Morsi.

L’ancien président égyptien avait également été accusé de fomenter des actes de terrorisme. «Il y a eu une pause entre deux séances pour des affaires différentes (…) Ils avaient juste terminé la séance concernant l’affaire d’espionnage», a dit à l’AFP une source judiciaire lundi après l’annonce de la mort de l’ancien président.

Depuis sa destitution, son tombeur et ancien ministre de la Défense Abdel Fattah al-Sissi a mené une répression sans merci contre l’opposition islamiste et en particulier les Frères musulmans, dont des milliers de membres ont été emprisonnés. Plusieurs d’entre eux sont décédés en détention.

(nxp/afp)