[VIDÉO] Bakel: 45 degrés de canicule, pas une goutte depuis une semaine dans “l’indifférence totale” des autorités

 

 

 

Dia Diakhité, membre du Comité de veille et d’alerte, à l’origine de la manifestation à Bakel pour protester contre le manque d’eau que connait la localité depuis plus d’une semaine, a confié dans une interview à PressAfrik que « la situation reste entière ». Et ce, dans « l’indifférence totale » des autorités. Déterminés à obtenir gain de cause dans cette lutte, lui et ses camarades ont procédé à la rédaction d’un mémorandum qu’ils vont remettre aux autorités compétentes. INTERVIEW

PressAfrik : Plus d’une semaine après la marche que vous avez organisée pour protester contre le manque d’eau à Bakel, qu’en est-il de la situation ?

Dia Diakhité: Jusqu’à présent, la situation reste entière. Après la marche, nous avons rencontré le préfet de Bakel. Parce qu’au tout début du manque d’eau, la population ne savait pas à qui s’adresser. Il n’y avait personne pour communiquer avec les gens et leur expliquer ce qui est à l’origine de ce manque d’eau. Si un manque d’eau se fait sentir, au moins Sen’Eau (entreprise en charge de la distribution d’eau au Sénégal, NDLR) doit communiquer aux populations, car elles paient la facture.

Avec 45° degré de canicule dans ce mois de carême, aucun agent de Sen’eau n’a parlé aux populations pour expliquer l’origine du problème et s’excuser. C’est là qu’on a déclenché la marche. C’était une marche improvisée. Et beaucoup de personnes sont sorties. Le même jour, les Eaux et forêts et les Sapeurs-pompiers, nous ont octroyés deux (2) citernes. C’est une démarche que nous saluons.

Donc toujours pas d’eau ?

Toujours pas. Actuellement, on est en train de travailler sur la rédaction d’un mémorandum. C’est déjà rédigé. On est juste en train de faire les dernières corrections. Si on termine, nous allons déposer le document à la Gendarmerie, auprès du Gouverneur de Tamba, du ministre de l’Eau et de l’Assainissement, de la Sones et enfin de Sen’Eau. Au moment où je vous parle, il y a une partie de la population qui a manifesté ce matin (hier mardi). Il s’agit des femmes de Montagne Centrale (un quartier sur les collines). Elles sont les plus affectées. Ça fait 2 ou 3 ans qu’elles souffrent de ce manque d’eau. Comme les quartiers de Guidimpallé et Diabé Guidé.

On a une délégation qui est à Dakar. Ils n’ont pas quitté ici pour aller rencontrer Sen’Eau ou Sones. Mais pour prendre part au Conseil présidentiel pour l’emploi des jeunes. Ils en ont profité pour rencontrer Sen’Eau et Sones. Mais, jusqu’à présent, il n y a pas de satisfaction. On va remonter l’information. C’est difficile pour les femmes de jeûner, préparer le repas pour la rupture et l’aube se passer la journée à la recherche du liquide précieux.

“Les femmes se battent entre elles devant les citernes pour obtenir le liquide précieux”

Il m’arrive de me réveiller à 2h ou 3 heures du matin, pour voir si on peut trouver quelques gouttes d’eau dans le robinet. Mais certains n’ont même pas cela. A Guidimpallé, il y a toute cette population à la recherche de l’eau. Les femmes partent jusqu’à Darou Salam (un autre quartier distant). Et parfois, elles se battent entre elles devant les citernes pour obtenir le liquide précieux. Quelque chose qui n’a jamais existé à Bakel.

Est-ce qu’on vous a dit ce qui est à l’origine de ce manque d’eau ?

Oui. Un jour, il y avait une coupure de courant à la Senelec. On nous a dit que c’est ça qui a endommagé les pompes de Sen’Eau. C’est ce qu’on nous a dit sans donner plus de détails. On ne sait pas si c’est une panne simple ou les pompes sont carrément endommagées. C’est ce qui est à l’origine du problème, selon eux.

Avez-vous rencontré le maire ou ses collaborateurs ?

Jusqu’à présent, nous n’avons pas rencontré les gens de la mairie. Au contraire, ils sont en train de jeter des piques sur les gosses. Mais on ne les a pas rencontrés. Nous sommes en train de travailler sur le mémorandum. Si on termine, nous allons le remettre à la mairie. On va déposer la lettre et discuter avec eux. Le danger à Bakel, c’est Sen’Eau. Il y’a qu’un seul représentant qui est là. Il est commercial, plombier, technicien, administrateur…Il est tout. Il va au forage, il ferme le bureau.

Qu’est-ce que les autorités locales ont fait ?

Ah, ils sont au courant de la situation. Nous, nous allons continuer le combat et les mettre devant les faits. Nous allons mettre tous ces manquements dans le mémorandum, car il faut prendre ça en compte.

Avec cette situation, comment les gens font pour s’approvisionner en eau ?

On a noté des cas de bilharzioses à Bakel, parce que certains sont obligés de boire l’eau du fleuve


Au fleuve. Il y a des gens qui partent puiser l’eau du fleuve. Certains vont chez des voisins. D’autres vont chercher de l’eau dans les puits ou à la SAED. Là-bas, ils ont de l’eau potable et leur propre forage. Mais le problème est que l’eau du fleuve n’est pas bonne. On a noté des cas de bilharzioses à Bakel. Certains sont obligés de boire l’eau du fleuve, parce qu’ils n’ont pas le choix. Ils font même de la glace avec cette eau.

Ce manque d’eau concerne Bakel ville seulement ?

Je n’ai aucune idée par rapport à cela. Mais je sais qu’on n’est pas alimenté par la même entreprise. Dans les villages environnants, c’est l’hydrologue rurale qui les alimente. Quant à nous, c’est la société Sen’Eau ou Sones. Tout ce qui est équipement, c’est la Sones et tout ce qui est eau, c’est la Sen’Eau. Il y a même un deuxième château d’eau ici depuis des années. Mais jusqu’à présent, ce château n’est pas équipé.

C’est quoi votre objectif maintenant ?

Que les populations aient de l’eau 24h/24. C’est un droit. Ce n’est pas parce qu’à Dakar ou Ziguinchor, les gens ont des problèmes d’eau que ça doit être pris comme exemple pour calmer les gens. Nous, c’est Bakel qui nous intéresse. Nous réclamons nos droits. On paie les factures. Sen’Eau ne peut pas signer un contrat avec l’État et ne pas respecter le cahier de charge. Dans le cahier de charge, il n’est pas dit que telle localité va avoir de l’eau et non telle localité.