Or de Khossanto / Destruction de l’environnement, utilisation du cyanure à ciel ouvert, lac artificiel non sécurisé : SORED MINES, un pillage organisé…

 

Le Sénégal a rejoint en 2013 l’Initiative pour la Transparence dans les Industries extractives (ITE). Toujours dans les réformes juridiques, la nouvelle constitution sénégalaise révisée et adoptée en mai 2019 stipule en son article 25-1 que les ressources naturelles appartiennent au Peuple sénégalais. L’objectif est d’en assurer une gestion optimale pour le pays, déjà secoué par des scandales de corruption. Mais entre le texte et la réalité sur le terrain, il existe parfois un décalage énorme.

De la présence de SORED MINES à Khossanto.

Pour en savoir un peu plus sur la SORED MINES, il faut aller dans le journal officiel du N° 6386 du Samedi 19 JANVIER 2008 pour y trouver le Décret n° 2007-1327 du 2 novembre 2007 accordant une concession minière pour or et substances connexes à la Société de Recherche et de Développement des Mines (Sored-Mines S.A.) sur le périmètre de Niamia, commune de Khossanto. La Société de Recherche et de Développement des Mines (SORED-MINES S.A.) est une société de droit sénégalais qui est titulaire du permis de recherche du périmètre de NIAMIA attribué par décret n° 98-238 du 12 mars 1998 à la société EEXIMCOR-AFRIQUE S.A pour la recherche d’or et de substances connexes, renouvelé une première fois par arrêté n° 5130 du 1er juin 2004, puis une deuxième fois par arrêté n° 7433 du 20 juillet 2007. Le périmètre de la concession minière couvre une superficie réputée égale à 120 km² et est délimité par les points suivants : Les travaux complémentaires de développement et de faisabilité sont planifiés par la société SORED MINES S.A entre la fin 2007 et tout au long de l’année 2008. La construction de la mine et des infrastructures d’utilité et de support est prévue sur une période de dix-huit (18) mois à partir de janvier 2009.
Le début de la production est prévu à partir de janvier 2011. Les investissements pour les travaux de développement et l’étude de faisabilité ont été évalués à 4.445.000 Euros. Les coûts de l’investissement pour la mine et les infrastructures de support seront déterminés de manière précise à l’issue de l’étude de faisabilité. Par ailleurs SORED-MINES S.A s’engage à réaliser une étude d’impact sur l’environnement avant le démarrage des travaux d’exploitation conformément aux dispositions de l’article 83 du Code minier. Ce projet va générer environ mille (1000) emplois directs selon SORED-MINES S.A. Au vu du montant important de l’investissement estimé à cinquante-deux millions trois cent soixante-dix mille (52 370 000) de Dollars US pour l’ensemble du projet d’exploitation, sous réserve de la réalisation avant le démarrage des travaux de construction de l’étude d’impact sur l’environnement et de l’étude de faisabilité, j’émets un avis favorable pour l’attribution d’une concession minière à la société SORED-MINES S.A pour une durée de dix (10) ans renouvelables.

En effet, compte tenu de la taille des ressources mises en évidence à ce jour et des incertitudes sur la cadence et la durée de vie de l’exploitation, la durée de la concession est raisonnablement fixée à dix (10) ans renouvelables au lieu des vingt-cinq (25) ans sollicités par SORED-MINES S.A. Il convient de souligner qu’il s’agit de la première concession minière accordée à une société de droit sénégalais, ce qui, à n’en pas douter, contribue au renforcement de la place des opérateurs sénégalais dans le secteur minier, en conformité avec la lettre et l’esprit de la déclaration de politique minière et de la loi 2003-36 du 24 novembre 2003 portant Code minier.

« Par rapport aux engagements de la société, l’administration veillera à ce que la société respecte tous ses engagements. L’administration est là pour protéger les populations, et les populations de Khossanto ne feront pas l’exception. » (William Manel, ex-gouverneur de Kédougou)

La séance publique de validation de l’étude d’impact environnemental menée par la société « Sored-Mines » s’est tenue le samedi 26 janvier 2018 dans la commune de Khossanto, arrondissement de Sabodala. C’était en présence de l’ex-gouverneur de la région de Kédougou, William Manel, du sous-préfet de Sabodala, du préfet de Saraya et des agents des services techniques. Cette audience publique qui s’est tenue à la case foyer des jeunes a vu la présence des habitants des villages de la commune de Khossanto, soit un total de sept villages qui seront impactés, qui y ont été conviés pour participer à la validation du rapport. Dans sa communication, Amar Dior Mbaye, cabinet Synergie Environnemental, avait présenté le rapport de l’étude d’impact environnemental. Selon lui, « Sored-Mines est une société qui fait l’objet d’aménagement et d’exploitation d’une mine d’or.
La société est une particularité, c’est une société sénégalaise et qui offre 10% de ses actions à l’État du Sénégal. » Selon toujours le rapport, la société sera autonome en électricité, en eau potable et en eau dont la société a besoin pour son fonctionnement.  Cette étude a fait état des impacts majeurs que l’installation de la société pourrait avoir sur les populations. Il s’agit des émissions de poussière, la qualité de l’air, les rejets d’eau chargées ou polluées, l’injustice dans les recrutements, et les bruits et vibrations, entre autres. À ces impacts, le cabinet a proposé des solutions majeures que sont: l’arrosage, des filtres, l’aménagement des bassins de recyclage des eaux usées, pour le recrutement, le cabinet propose que priorité soit faite aux populations à compétences égales, pour les vibrations et bruits, une limitation du niveau sonore est vivement recommandée.
Après que la société aura fini d’exploiter, le rapport propose à la société un plan de réhabilitation de tous les sites qui ont fait l’objet d’exploitation, de combler les mines partiellement et de profiler le reste. Aussi, transférer les routes à la région et le camp d’hébergement transféré à la commune pour servir d’écoles et d’autres structures, la décontamination. L’exploitation de la société va toucher directement six villages, entre autres Corolon et Corolon Ouest, Madina, Salomon, Dindifa et Niamaya.

Pour leur part, les populations avaient exprimé leurs préoccupations quant à l’exploitation de l’or. Elles souhaitent que les sociétés les considèrent plus car elles ne se retrouvent pas dans les politiques mises en place par les sociétés. Leurs craintes, c’est de voir les jeunes sans emploi alors qu’ils ne souhaitent que ça. « Monsieur le gouverneur, ce n’est pas normal d’accueillir des sociétés qui viennent s’enrichir sur notre sol et repart nous laisser pauvres. Nous ne sommes pas contents parce que nos préoccupations ne sont jamais prises en compte. L’emploi des jeunes, l’accès à l’eau ont été soulevés par les représentants des sept villages, comme quoi c’est une doléance générale des habitants du Beledougou. De leur côté, les femmes s’inquiètent de leurs activités maraichères qu’elles ne peuvent plus mener faute d’avoir suffisamment d’espace pour. Les habitants des villages du Beledougou émettent des réserves promesses faites par la société. Car, selon lui, d’autres sociétés minières ont exploité avant elles et n’ont pas tenu leurs promesses. Apportant une réponse aux préoccupations, M. Mbaye les renvoie au rapport qui a pris en compte toutes les questions en trois rubriques ou familles : les mesures réglementaires, les mesures techniques et les mesures d’accompagnement social. Pour le représentant de la société Sored-Mines, lorsque l’exploitation commencera, les populations sauront que les choses vont changer et que toutes leurs préoccupations seront prises en compte.

Malgré les réserves et les inquiétudes des populations, l’ex-gouverneur de Kédougou a validé le projet et invitera les populations à « se réjouir de la venue des société minières surtout lorsqu’elle est dirigée par un Sénégalais. Par rapport aux engagements de la société, l’administration veillera à ce que la société respecte tous ses engagements. L’administration est là pour protéger les populations, et les populations de Khossanto ne feront pas l’exception ». Tels étaient les engagements de l’administration territoriale d’alors.

Une réalité bien différente des engagements.
Pour non-respect des engagements pris, les populations sont montées au créneau. Ce sont les travailleurs de la société minière basée à Khossanto qui ont porté le combat contre la direction de ladite société. Les travailleurs déplorent les dures conditions de travail qui leur sont imposées et le non-respect des engagements de la direction de l’entreprise. En effet, la société dirigée par Ousmane Anne, DG de l’entreprise, est gérée sur place par son frère Aziz Anne qui imposerait des conditions de travail inhumaines à ses employés. « Nous sommes comme des esclaves chez nous », déplore l’un d’eux avant d’ajouter : » Nous travaillons, pour certains depuis des années sans aucun contrat, sans couverture maladie, sans assurances… » La société SORED MINE qui employait 100 personnes, a obtenu en 2007 une autorisation d’exploration. Après cette exploration, l’usine serait entrée en phase d’exploitation active de l’or depuis bientôt quatre ans. Les travailleurs sont formels. Selon les travailleurs, « Ils ont bien commencé à exploiter de l’or. » Si tel est le cas, qui a autorisé SORED MINES à entrer en phase d’exploitation ?
Réunis au foyer des jeunes vendredi 04 juin 2021, sous l’initiative de Mamadou Lamine Cissokho, conseiller municipal de Khossanto, des chefs de village, jeunes, ont violemment fustigé la non-assistance de SORED MINES. En effet, pour le Président du Conseil Communal de la Jeunesse de Khossanto, Demba Cisssokho, cette société n’apporte rien à la population en terme de RSE. Des jeunes qui ont eu à travailler avec SORED sont une fois restés trois mois sans percevoir leurs salaires. Ainsi, Mamadou Lamine Cisssokho, initiateur de la rencontre, qualifie la SORED de société qui pratique l’esclavage avec des salaires misérables. À l’en croire, cette compagnie minière ne respecte aucune règle pour la protection de l’environnement. En effet, des animaux meurent à cause de l’utilisation du cyanure d’où une réelle menace pour la faune et la flore sans parler des risques que cela peut engendrer sur la population.

Selon Mamadou Lamine Cisssokho, 98% des demandes sociales sont rejetées par SORED sous prétexte qu’elle est pauvre. « Se cachant derrière la pauvreté, cette société pille nos ressources et exploite nos jeunes frères », dixit le Conseiller municipal. Et il continue, plusieurs jeunes ont démissionné pour garder leur dignité car leurs familles comptent sur leurs revenus mais ces salaires ne peuvent rien résoudre. Si SORED MINES ne peut pas soutenir la population qu’elle arrête son exploitation dans notre commune même si elle est une société Sénégalaise. Constatant que leur appel soit tombé l’oreille d’un sourd, le 09 Novembre 2021 une centaine de travailleurs de la société minière SORED MINE, installée à Khossanto, avait bloqué tous les accès à l’usine pour protester contre les dures conditions de travail. Pour calmer la situation, M. Cyprien Antoine Mballo, préfet de Saraya, s’était rendu sur place. Ainsi, il avait réussi à faire baisser la tension en s’engageant à convoquer une réunion avec l’inspecteur régional du travail après le Maouloud et qui sera présidée par le sous-préfet de Sabodala dans les jours à venir pour clarifier toute la situation qui prévaut dans la société. Comme promis par le préfet du département, le sous-prefet de Sabodala a convoqué le 21 Novembre 2019 une rencontre à laquelle a participé également l’inspecteur régional du travail. Ainsi, le sous–préfet de Sabodala et l’inspecteur régional du travail, M. Mbengue se sont rendus sur le site minier pour vérifier de visu les conditions de travail des ouvriers. Lors de la rencontre l’inspecteur du travail a expliqué les obligations et devoirs des travailleurs.

En prenant la parole, ces derniers ont dénoncé pour certains être restés 15 ans, 10 ans, 4 ans, 2 ans sans contrat, ni couverture maladie. Chose grave pour le signaler, ces emplois ne sont pas déclarés à l’inspection régionale du travail. Les travailleurs ont aussi regretté l’absence de responsable de la société. En effet, la réunion s’est tenue sans aucun représentant de SORED MINES qui pourtant, a bien reçu une convocation de la Gendarmerie nationale. Le frère du DG, M. Aziz Anne, refuserait tout dialogue, car semble-t-il, « protégé d’en haut et ne voulant rien faire pour améliorer leur situation… » Les jeunes ont dénoncé le refus de payer des journaliers, dont certains font 30 jours de travail sans être recrutés, ce qui est contraire au droit du travail. L’édile de la commune a également dénoncé le comportement des agents de sécurité de SORED MINES qui menacent les autres gardiens locaux avec des armes et que l’entreprise ne participe à aucune action de développement dans la commune.

En réponse, l’inspecteur dira qu’il n’était pas au courant de la mise à production de l’usine, ce qui justifierait le fait que les travailleurs ne soient pas déclarés. Il a cependant promis de sévir si le droit a été bafoué. Comment une entreprise peut-elle faire travailler dans une région, une centaine de personnes sans aucun contrat, aucune couverture maladie etc…? Comment se fait-il que l’ITE qui milite pour la transparence ne fasse nullement cas dans ses rapports des activités de la SORED MINES ? Comment dans ce pays une société peut-elle exploiter des ressources naturelles sans aucune participation financière ni au trésor encore moins pour la collectivité territoriale ?

Des lacs artificiels à ciel ouvert causant mort d’enfants et d’animaux
C’est dans cet étang que N. Konaté, un garçon âgé de douze ans a été retrouvé mort noyé. Cette vaste étendue d’eau a été créée par la société minière dans la commune de Khossanto. Outre l’absence de grille de protection, ce lac à ciel ouvert constitue un danger pour les populations bien que situé à quelques quatre kilomètres environ du village. L’étang a été créé par Sored Mines dans sa mine à Khossanto et il est non sécurisé. Les enfants s’y rendent souvent pour nager. Le petit garçon s’est noyé vers dix-huit heures en présence de son frère qui l’a perdu de vue dans l’eau. Ce n’est que 24 heures après que le corps a été repêché. La responsabilité de la société minière qui évolue dans cette partie du pays est totalement engagée. L’on se demande comment peut-on créer un lac artificiel aussi grand et ne pas le sécuriser.
Les populations ont pourtant dénoncé avec la dernière énergie cet état de fait et demandent à l’État de revoir et de dire à la société Sored Mines de sécuriser les lieux du lac artificiel qu’ils ont créé pour préserver la vie de leurs enfants. »
Alertés, les éléments du poste de gendarmerie de Sabodala se sont rendus sur les lieux pour procéder aux constats d’usage. Une enquête a été ouverte, pour élucider cette affaire qui malheureusement n’a ému personne dans ce pays. Aux dernières nouvelles le ministère des mines par l’entremise de DCSOM aurait commandité une enquête.
Tous les jeunes de la commune travaillant dans la société, envoyés en chômage technique depuis Août 2021.
Pour se débarrasser de jeunes décidément trop gênants, la société a simulé une fermeture temporaire et envoyé tous les jeunes recrutés dans la commune en chômage en technique. À leur reprise la mine est totalement fermée aux jeunes au profit de jeunes venant d’autres localités, ou ayant d’autres nationalités.

À qui profite l’or de NIAMIA ?
La société dont le permis a été renouvelé en 2017 est en pleine phase d’exploitation de l’or. Mais est-on tenté de nous demander, où va cet or ? Pour le moment mystère et boule de gomme. Dans le rapport 2021 de l’ITE il n’y est fait aucune mention d’un quelconque résultat de la société. Même pendant la dure période de la covid19, la société est restée insensible à la souffrance des populations. Ainsi donc, il est à se demander où va l’or de Khossanto ? Comment font Ousmane Anne et ses amis pour échapper à tout contrôle de la part de l’État ? Comment une société minière qui est en phase d’exploitation peut-elle ne pas figurer dans les livres des comptes de l’ITE ? Pourquoi, au moment où des sociétés clandestines d’extraction de l’or sont traquées dans la région, la SORED MINES reste toujours intouchable ?  En tout état de cause, l’État, à travers le ministère des mines et de la géologie est interpellé…

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