Financement de la santé basé sur la cotisation en nature : L’exemple de Kédougou

 

Par Ibrahima DIABEKHATE – Dans la région de Kédougou, le financement de la santé à travers leurs ressources naturelles est une réalité. Elle a abrité la semaine dernière, une série d’ateliers sur «l’identification et la mise en pratique des Mécanismes endogènes de financement de la santé». Il s’agit d’un cycle d’ateliers de réflexion sur la faisabilité des «Mécanismes endogènes de financement de la santé (Mefs)» : il est question de participations en nature, la mise en valeur d’un champ collectif qui englobe les producteurs, transformateurs, chambres de commerce, chefs de village, mutualistes, autorités administratives et sanitaires. C’est une façon de réduire la dépendance des populations à l’argent pour financer leur santé dans une région aussi pauvre que Kédougou. C’est très simple : ces mécanismes qui répondent à leur contexte, leur culture et leurs possibilités, tournent autour de la collecte de produits naturels comme le karité, le maad, le bouye, le foin, la paille.
L’Ong Cicodev Afrqiue, en collaboration avec l’Agence régionale de la Cmu de Kédougou et les mutuelles de santé, a parcouru les localités de Dakatély, Dar Salam (département de Salémata), Bembou, Sabodala (département de Saréya), Bandafassi et Fongolémbi (département de Kédougou), où le succès est palpable. «A Kédougou, les populations nous ont dit qu’elles n’avaient pas toujours de l’argent liquide pour payer leurs adhésions et cotisations aux mutuelles de santé. Mais qu’elles avaient des produits issus de leurs activités agricoles : du fonio, du madd, des nattes, de la poudre de pain de singe, etc., qu’elles étaient prêtes à donner en contrepartie de leurs frais d’adhésion et de cotisations aux mutuelles de santé. Nous sommes convaincus que seuls les Mécanismes endogènes de financement de la santé peuvent nous permettre d’atteindre notre objectif de taux de Couverture nationale de 75%. Il nous faut donc identifier ces Mefs, les reconnaître et les institutionnaliser», a déclaré le Directeur exécutif de Cicodev Afrique, Amadou Kanouté.
Au Sénégal, les comptes nationaux de la santé révèlent que les ménages contribuent à hauteur de 52% aux frais de santé. Ces contributions reposent sur une minorité de citoyens qui ont la capacité de couvrir leurs frais de santé et ceux de leurs familles. Ce constat exclut naturellement une grande majorité de citoyens qui, même s’ils sont pauvres, sont pour autant capables de produire pour subvenir à leurs besoins essentiels. Il suffit juste que des mécanismes soient mis en place pour les aider à valoriser leurs capacités productives et, avec les ressources ainsi générées, pouvoir adhérer aux mutuelles de santé. Aujourd’hui, il y a une adhésion massive des populations et aussi des élus locaux de Kédougou, qui se sont «engagés à faire des délibérations pour octroyer des terres, champs collectifs aux populations qui en feront la demande» et à octroyer d’importantes sommes d’argent allant de 100 mille à 2 millions F Cfa pour l’achat de semences, entre autres. «La stratégie des Mefs est une démarche innovante pour un financement efficient de la santé. Cette dernière étant une compétence transférée, il nous faut saisir l’opportunité des Mefs pour asseoir un système de santé adéquatement ressourcé», renchérit Souhaibou Ba, maire de Dakatély. «(…) C’est important pour l’Etat de voir les mutuelles fonctionner pleinement. Un Etat a toujours besoin de partenaires engagés comme Cicodev Afrique pour mettre en œuvre sa politique publique», enchaîne Mbaye Seck, adjoint au sous-préfet de Bembou.
Directeur de l’Agence régionale de la Couverture maladie universelle à Kédougou, Ousseynou Diop soutient : «Avec l’appui de Cicodev Afrique, la Cmu dispose pour la première fois, d’un partenaire constant qui ne cesse de nous pousser à mener des actions pour atteindre nos objectifs.»

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