[GRAND ORAL] Me Sidiki Kaba, Ministre de la justice sur la sortie des avocats de Hissène Habré «Je ne répondrai à l’injure par l’injure. On ne me donne pas d’arguments de droit»

REWMI.COM- Le ministre de la justice, garde des sceaux, Me Sidiki Kaba, est, ce matin, l’invité du Grand Oral sur la 97,5 Rewmi FM, à partir de 11 heures. Dans cet entretien repris par Rewmi Quotidien, le ministre de la justice a longuement débattu sur les questions qui marquent l’actualité judiciaire de notre pays. Procès Habré, vision de l’action du ministère de la justice pour le Sénégal, accalmie notée sur la traque des biens présumés mal acquis, entre autres sujets, ont été disséqués.

Vision de l’action du ministère de la justice pour le Sénégal

«Le 1er septembre prochain, je ferais deux ans à la tête de ce ministère. La vision que j’ai de la justice au Sénégal, c’est celle définie par le Président Macky Sall qui prône une justice moderne, dans le cadre de l’Etat de droit et d’une démocratie apaisée où le respect des libertés citoyennes est un impératif. Pour cela, nous avons besoin de faire une justice performante et efficace. Et, nous devons la moderniser, avec trois formes de déclinaisons. D’abord, les infrastructures doivent changer. Des Palais de justice, nous en avons qui sont vétustes et nous essayons d’en construire beaucoup. La deuxième chose, c’est la formation. Former nos magistrats à la meilleure compréhension des normes internationales et en faire des magistrats de grande compétence qui maîtrisent les standards judiciaires mondiaux. En ce qui concerne, par exemple, dans le cadre du statut de Rome, les crimes contre l’humanité, les crimes de guerre, les génocides, les crimes d’agression et les crimes internationaux. Cela est d’une importance capitale, de la formation initiale à la formation continue, pour mieux préserver les droits et les libertés des citoyens jugés par des magistrats compétents, intègres et sérieux. La modernisation de la justice, c’est  aussi les réformes. Et l’une des plus importantes a déjà été faite et qui est une réforme majeure : celle de la carte judiciaire. Nous avons supprimé les Cours d’assises, pour créer les Chambres criminelles permanentes, donnant ainsi aux citoyens la possibilité d’être jugés dans un délai raisonnable, de ne plus attendre 6 ou 7 ans, en détention préventive. D’autant que les Assises étaient lourdes et coûteuses. D’un autre côté aussi, beaucoup de réformes ont été initiées pour donner aux citoyens la possibilité d’avoir des formes alternatives à la prison. Les petites peines, au lieu d’aller en prison, être condamné, mais à des travaux d’intérêt général, entre autres. Il y a également le renforcement de l’Etat de droit contre la cybercriminalité et le terrorisme qui sont de réelles menaces. Autant de choses que nous sommes en train de mener pour renforcer l’Etat de droit au Sénégal, élargir les libertés des citoyens et permettre une justice de grande qualité, avec des magistrats de haut niveau, des greffiers formés et compétents et des avocats en capacité de pouvoir faire face à la maitrise des normes internationales, pour le plus grand bien des justiciables sénégalais.»

Les difficiles conditions de détention dans les prisons    

«C’est un fait réel que les conditions de détention sont quelque peu difficiles. C’est dû au fait que nous n’avons pas construit beaucoup de prison et je le dis souvent. Mais Senghor le dit bien. La pédagogie, c’est l’art de se répéter qui exprime aussi une conviction. Depuis 1863 où, à Saint Louis, nous avons la première prison, nous n’avons pas construit d’autres prisons. La prison de Sédhiou est donc de 1920, celle de Rebeuss, de 1929, d’une capacité de 600 détenus. Il arrive souvent, en pointe, qu’il y ait un peu plus de 1000 à 1500. Il faut changer cela. C’est la raison pour laquelle, nous envisageons deux types de réformes. La première, c’est la création d’une prison à Sébikotane. Nous avons fait la pose de la première pierre et nous sommes en train de trouver les meilleurs partenaires pour sa construction, en tenant compte des normes de sécurité. Cela est assez important, mais nous insistons sur un fait qui paraît être important, c’est qu’il faut permettre, dans le cadre de cette réforme de la construction de cette prison, la possibilité d’avoir une meilleure formation des agents pénitentiaires. Lesquels doivent pouvoir exercer la surveillance dans les prisons, dans les meilleures conditions, tout en respectant les droits des détenus, mais en assurant la sécurité des lieux. Il faut de plus faire en sorte que les prisons soient vidées et par les réformes que nous réfléchissons, nous en sommes à l’option d’un jugement rapide, pour que les citoyens n’attendent pas trop en prison. Autant de mesures qui vont dans le sens de vider les prisons, comme nous avons eu à prendre la mesure des libérations conditionnelles. Il faut dire qu’elles sont prévues par la loi. Parce que la politique pénale au Sénégal c’est la répression des crimes et délits, mais également il y a le volet de la réhabilitation. Lequel permet aux détenus qui ont prouvé des comportements sérieux d’adaptation, d’avoir une seconde chance. Quand ils sont condamnés à deux ans, par exemple, après un an de prison, on leur donne la possibilité de sortir, à charge pour eux d’avoir un bon comportement, de mieux s’insérer dans le cursus social, y jouer un rôle important et éviter également la récidive, facteur d’une plus grande sévérité à leur endroit.»

L’Etat de droit, un instrument de croyance en démocratie

«Partout où il y a des crises et des conflits qui engendrent des violations massives des droits de l’homme, si on évalue les causes, l’injustice y apparait grandement. Le système judiciaire est très important dans tout pays qui doit veiller à disposer de tribunaux performants qui assurent la sécurité judiciaire aux investisseurs. Venant d’ailleurs et ayant investi votre argent, vous devez avoir la certitude qu’en cas de conflit avec un autre investisseur, vous aurez droit à une bonne justice. C’est la raison pour laquelle nous avons fait la réforme du Rccm (Registre de commerce et du crédit mobilier). La dématérialisation pour permettre le suivi de la naissance de l’évolution des entreprises. Porter les suretés de sorte que les investisseurs aient une meilleure connaissance de notre environnement qui sera sécurisé, permet l’attractivité de notre pays et lui assurer le développement, avec plus d’emploi, plus de richesse, plus de croissance. Un système judiciaire qui assure la sécurité judiciaire aux citoyens assurer de fait les conditions de la stabilité. Parce qu’une justice qui fonctionne bien permet à la fois de régler les conflits et les différends entre les citoyens, les conflits entre les institutions et rend la justice électorale acceptable pour tous, veille à ce que la démocratie fonctionne, en tenant compte de ce que le verdict populaire soit conforme au verdict judiciaire. Autant de choses qui font que la justice joue un rôle pivot dans la stabilité de nos Etats, dans l’approfondissement de la démocratie et dans la sécurité et dans la liberté des citoyens.»

La nouvelle tournure du procès de Hissène Habré

«Je ne suis pas surpris de la tournure du procès de Habré. Je voudrais d’abord dire que c’est un procès historique. Il faudrait rappeler que c’est l’Union africaine qui a demandé au Sénégal de juger, au nom de l’Afrique, Hissène Habré. Cela évite le déshonneur à l’Afrique. Le choix qui s’offrait au Sénégal, s’il devait respecter la convention de 84 qu’il a ratifiée en 1997, c’était de juger Habré ou de l’extrader en Belgique. Cela, l’Afrique ne le voulait pas. Donc, ce sont les sentiments patriotiques et panafricains du Président Macky Sall qui l’ont amené à accepter de relever ce défi qui fait l’honneur de l’Afrique. La deuxième chose qu’il faut retenir est que c’est la première fois qu’un ancien chef d’Etat est jugé, sur la base des mécanismes de compétences universelles. Cela voudrait dire que cette convention de 84 donne la possibilité au juge national de juger un acteur étranger, en l’occurrence Hissène Habré, présumé avoir commis des crimes à l’étranger, au Tchad, sur des victimes étrangères, à savoir les victimes tchadiennes. Il faut surtout retenir que le Sénégal a donné un bel exemple de coopération judiciaire. A travers une convention, il a été créé les Chambres africaines extraordinaires, une première sur le continent. Ce sont des juges nationaux et africains qui ont la responsabilité de mener ce procès qui a eu lieu le 20 juillet 2015, avant d’être ajourné au 7 septembre prochain. Mais pourquoi ? Parce que les juges veulent que ce procès respecte toutes les normes d’un procès juste et équitable. La présomption d’innocence, la légalité des armes entre la défense avec le parquet, tout cela explique qu’Hissène Habré, ayant refusé de laisser ses avocats le défendre et, compte tenu de la gravité des crimes à lui reprochés, la loi sénégalaise prévoit qu’il faut nommer d’office des avocats pour assurer sa défense. Ainsi, trois avocats ont-ils été commis d’office mais, ne connaissant pas le dossier, leur a-t-on donné 45 jours pour s’en imprégner. Ce qui montre qu’il y a une volonté de respecter les droits de la défense, pour qu’à partir du 7 septembre, le procès reprenne. Aucune surprise donc, mais une volonté affirmée de faire en sorte que le procès soit juste et équitable. Parce que jusqu’à ce qu’une décision  définitive intervienne, Hissène Habré est présumé innocent.»

Les avocats de Habré ne reconnaissent pas les commis d’office

«C’est leur droit de s’exprimer comme tel, de même que celui de Habré de ne pas vouloir se défendre. Vous savez pertinemment que  c’est une situation qui se comprend parfaitement. Même s’il dit ne pas reconnaitre les Chambres africaines, la chose la plus importante qu’il faudrait retenir, c’est que le procès donne toutes les chances à celui qui est accusé et qui est présumé avoir commis des crimes aussi graves, de montrer sa propre innocence. Donc, c’est une occasion manquée.»

La condamnation de Hissène Habré

«Il faut savoir raison garder. Nous avons entendu beaucoup de choses. Ce n’est pas que ça. Nous avons entendu des injures, des propos diffamatoires, outranciers. Mais, ce n’est pas ça qui va nous faire sortir de notre rôle. Parce que ce qui est important, c’est la charge que nous avons de faire en sorte que les conditions d’un procès équitable soient là. Et, le Sénégal a donné le meilleur de lui-même. Il a donné les meilleurs magistrats qu’il a mis à la disposition de l’organisation de ce procès pour l’Afrique. Ces magistrats auraient pu servir à la justice normale. Parce que nous avons un déficit de magistrats. Il a aussi mis à sa disposition un tribunal qui est là et en y assurant la sécurité. Faire en sorte que les témoins, les victimes et les différents acteurs, tous, puissent avoir cette sécurité. C’est une mobilisation de l’Etat du Sénégal. Mieux, il est dans une prison qui a été construite et pour tout autre détenu que lui, comme tous les autres qui peuvent y être. Mais, être arrêté et avant d’être jugé ne signifie pas, pour autant, que vous êtes déjà condamné. Je n’ai pas ce pouvoir. Je ne suis pas un juge. Nous, nous sommes l’Etat et dans l’Etat, il y a le gouvernement, le principe de la séparation des pouvoirs. La plupart des gens confondent le ministère de la justice avec la justice. Bien sûr, nous sommes un ministère, le seul qui porte le nom d’une vertu : la  justice. Mais, nous ne sommes pas la justice. Nous essayons d’en organiser l’administration, dans les meilleures conditions que les justiciables puissent utiliser, que les usagers de la justice, ces hommes, ces femmes, ces magistrats, ces greffiers, ces avocats, ces notaires, ces huissiers, tous ceux qui participent à rendre une justice qui permet au  citoyen de savoir qu’il n’a pas le droit, lui, de se faire justice soi-même. Il est de bon temps et de bon endroit que l’on défende celui qu’on doit défendre, mais la loi voudrait que cela se fasse dans la bienséance. Mais nous, nous nous concentrons essentiellement sur notre mission, pour que ce procès se fasse dans les meilleures conditions possibles.»

Que gagne le Sénégal dans ce procès ?

«Rendre service à l’Afrique. L’idéal eut été qu’on le jugea dans son pays, le Tchad. Que veut le Sénégal dans cette affaire ?  Il a été demandé au Président Macky Sall de faire en sorte que ce procès se fasse au Sénégal. C’est une confiance en la justice du Sénégal. C’est une confiance en ses institutions judiciaires. C’est une confiance en ses magistrats, ses avocats, ses acteurs judiciaires. Sur 54 pays, le Sénégal répond par la solidarité et évite le déshonneur, s’il l’avait                                                                                                                         laissé aller. On nous parle des africains, des chefs d’Etat africains que l’on juge de l’autre côté que l’Occident n’acceptera pas de faire venir juger ses enfants ici. Mais, le Sénégal accepte de le faire et en le faisant, si d’aventure, une décision de condamnation devait intervenir, Hissène Habré ne serait jamais condamné à mort. Parce que le Sénégal a supprimé la peine de mort, le 10 décembre 2004. Habré a été condamné dans son pays, le 8 août 2008. Il y serait exécuté. Nous créons les conditions d’une justice. Et, quand on nous dit que les bailleurs sont l’Union africaine, le Tchad. Mais, il s’agit de Tchadiens, d’un ancien chef d’Etat tchadien, de victimes tchadiennes et de témoins tchadiens. Quoi donc de plus normal que le Tchad participe à l’organisation d’un tel procès, alors que le Sénégal donne tout : sa justice et toute son organisation. En le faisant, le Sénégal montre que c’est sa tradition de rendre la justice. Et, de faire en sorte que ses hommes servent la justice ici et à l’international. C’est une tradition pour le Sénégal de faire en sorte que le choix de la justice et le droit l’emportent sur guerre, la violence et la guerre civile. Ce qui a permis le renforcement de notre état de droit, le renforcement de la démocratie et que nous avons des alternances pacifiques et qu’on n’a pas de coup d’Etat.»

La non-comparution d’Idriss Deby devant les Cae

«Le monde entier a salué l’action du Président Macky Sall. Tous les grands média du monde ont salué le prestige du Sénégal et le combat de son président dans la lutte contre l’impunité. C’est une contribution importante pour la paix en Afrique. Nous avons choisi la justice et le droit, plutôt que des armes, pour régler les conflits. C’est une réponse pour la paix, mais c’est en même temps aussi, une réponse qui est donnée au monde. Ce sont les valeurs que nous mettons en avant. Quand on dit qu’on ne voudrait pas que le Président Idriss Deby ne comparaisse pas mais, l’acte de juger, c’est ceux qui poursuivent. Ils ont poursuivi les personnes concernées, dont Hissène Habré. Si des poursuites pourraient être exercées contre Idriss Deby, ce n’est pas le Sénégal, ni sa justice qui l’éviterait. Mais quand on veut créer une polémique… Nous avons dit que l’esprit de la justice internationale, c’est dans les codes. La Cour pénale internationale n’est pas compétente pour juger Habré, pour la bonne et simple raison que les crimes qui ont été commis sont antérieurs à sa création. Elle ne juge que les plus hauts responsables et non ceux que vous appelez, en langage commun, le menu fretin ou les acteurs intermédiaires. Ce sont les chefs d’Etat, les chefs d’Etat major, d’armées, les ministres, etc. On ne peut pas juger tout le monde, mais ceux qui ont planifié, ceux qui ont exécuté cette planification, cette perpétration du crime, on en a retenu 22. C’est ce que nous avons dit et ça, c’est l’histoire. Nous donnons une réalité historique et une réalité judiciaire. Nous ne protégeons personne. Ceux qui sont confrontés à la justice internationale, parce qu’ils ont commis des crimes, ceux là peuvent être rattrapés par le temps. Qui que vous soyez, que vous soyez en exercice et que vous ayez une immunité, soyez certain que le temps de la justice est long, mais il arrive.»

Le manque de communication sur les sorties de la défense de Habré

«Vous voulez que je réponde à l’injure par l’injure. On ne me donne pas d’arguments de droit. C’est ça le problème et ce n’est pas dans la rue qu’on plaide. C’est devant les tribunaux. C’est pourquoi j’ai dit qu’il faut donner la chance à celui qui est accusé et qui a la présomption d’innocence, d’aller se défendre. Le Sénégalais, il voit ceux qui veulent s’en prendre à leurs institutions, qui injurient les acteurs qui servent la République. Il les voit et il sait peut-être que c’est cet argument qu’ils ont entre leurs mains. Mais, je ne me réduirai pas à cela. Ce que je dirais à chacun, c’est de garder la raison. C’est de se dire que le procès qui est en cours, ira à son terme. Il sera mené par des magistrats professionnels qui ont une expertise et une qualité technique qui leur permettront de garantir, à la fois, les droits d’Hissène Habré, comme les droits des victimes qui seront présentes.»

L’accalmie sur la traque des biens présumés mal acquis

«Le temps médiatique est un temps d’instantanéité où l’on veut tout. Le temps de la justice est long. Vous savez, quand vous devez travailler sur la liberté, sur l’honneur des gens, sur leur sécurité et sur leur bien, il y a un temps d’investigation, un temps d’enquête et ensuite, un temps d’information, un temps de poursuite qui peut être suivi d’une arrestation ou d’un mandat de dépôt. Tout cela, c’est la justice et cela ne peut pas partir en même temps. Vous avez la durée du procès, alors on ne peut pas prévoir un procès. On peut dire voila à peu près ce qu’il y a. Il y a des faits qui sont reprochés, comment ces faits vont être analysés. Vous, les journalistes, vous voyez les débats contradictoires, les juges tendre leurs oreilles, les greffiers prendre les plumes pour essayer de voir si la réalité de l’accusation est largement suffisante pour condamner. Des personnes comme Karim Wade, Aïda Ndiongue, Tahibou Ndiaye, il y en a qui ont été jugées. Pour d’autres, il y a un pourvoi en cassation qui est en cours et va être examiné par la Cour suprême. Cela fait partie de notre système judiciaire et on verra bien la décision que la Cour suprême prendra. Mais le reste, les gens sont poursuivis, le procureur est en train de faire son travail et nous verrons bien quelle seront les décisions prises. Quand nous commencions le procès de Karim Wade, on nous disait qu’il n’aura pas lieu, qu’il n’y aurait pas une décision de justice. Ce n’est pas ça qui est important. Ce qui est important, c’est quand un Etat définit une action, la lutte contre l’impunité, que cela soit mené. Mais, qu’elle soit menée de belle manière. La belle manière, c’est les règles de l’art et ceux qui sont engagés à le faire, sans haine et sans autre chose, sinon rendre la justice, en tenant compte des droits de la défense, mais en même temps, des droits des victimes.»

Avis du Groupe de travail des Nations Unies dans l’affaire Karim Wade

«Nous avons longuement épilogué sur cette question. Aucune sanction n’est prévue contre le Sénégal. Il n’est dit, nulle part que le Sénégal doit libérer qui que ce soit. Il dit que le Sénégal doit procéder pour une période assez précise, nous avons notre interprétation de la question. Disons tout simplement que c’est un avis consultatif et le gouvernement du Sénégal a communiqué là-dessus. Les décisions qui sont prises par l’Etat du Sénégal, c’est ce que nous attendons. L’affaire est devant la Cour suprême du Sénégal et nous ne savons pas quelle sera la décision qui sera prise. Mais, la décision de la Cour suprême sera la décision de l’Etat du Sénégal. Quelle qu’elle soit, cette décision sera appliquée».

L’affaire des journalistes arrêtés récemment  

«Ce n’est pas un défenseur des droits de l’homme qui est à la tête du ministère de la justice. Ce n’est pas vous qu’on est parti arrêté. La chance que nous avons et que nous pouvons toujours défendre, c’est de faire en sorte que ceux qui arrêtent et surtout ceux qui jugent, le fassent en tenant compte des faits qui sont reprochés. Si ces faits ne tiennent pas, il faut relaxer. Si ces faits tiennent, il faut appliquer la loi. Et, la loi peut être appliquée dans la sévérité et comme dans l’humanité, en tenant compte de la personnalité du justiciable qui est devant la loi. Ce que moi, je peux vous dire, c’est que la chose la plus importante est de garantir à tous les citoyens, qui qu’ils soient, que nous ne sommes pas dans un Etat-Apr, nous ne sommes pas dans un Etat-Pds, nous ne sommes pas dans un Etat-Ps, mais dans un Etat de droit. Et, dans un Etat de droit, dans une République, il faut garantir à tous les citoyens qu’ils auront droit à une justice équitable. Cela est important pour nous tous. Si nous le faisons, nous assurons à tous ce que je peux appeler les garanties d’une sécurité collective, sinon, nous serons tous en liberté provisoire.»

Mandat d’arrêt contre le Président Saoudanais Oumar El Bachir

«Si ce dernier est toujours libre, c’est parce que je n’ai pas ce pouvoir. Je ne suis pas juge de la Cpi. Je suis le Président de l’Assemblée des Etats parties. Il y a la Présidente de la Cpi, le Procureur de la Cpi et moi, en tant que Président de l’Assemblée des états-parties, j’oriente les politiques et les directions qui permettront un bon fonctionnement de cette institution et préside à une assemblée de 123 Etats au monde. J’en suis le premier africain, par la volonté du Président Sall qui a soutenu cette candidature et qui, dans une certaine mesure, relève le prestige du Sénégal. Parce qu’ainsi, nous devenons un gardien de la justice internationale, dont il faudrait faire en sorte que par la prévention, il n’y ait pas de crimes et aussi, par la répression, lorsqu’il y a des crimes, que le plus haut responsable rende compte, afin que l’impunité puisse cesser, que le permis de tuer ne soit pas entre les mains de certains qui peuvent mettre en danger la vie de millions de personnes. Il faut dire que je n’émets pas de mandat d’arrêt et, pour Béchir, il y a eu un mandat d’arrêt international contre lui. C’est par la coopération des Etats que le mandat peut être exécuté. La Cpi n’a pas de police, n’a pas de gendarmerie et si les Etats ne coopèrent pas, les décisions de la Cpi ne peuvent pas être exécutées. C’est ce qui montre les limites de la justice pénale internationale.»

Cheikh Moussa SARR