Venezuela: Maduro vers un nouveau triomphe électoral.

 

Malgré la crise économique et la réprobation internationale, le président vénézuélien Nicolas Maduro devrait dimanche remporter une nouvelle victoire, cette fois aux élections municipales, face à une opposition quasi-absente. Un galop d’essai avant la présidentielle de 2018.

Pour le chef d’Etat socialiste, qui compte se représenter l’an prochain, le paysage s’est largement dégagé quand les trois principaux partis de la coalition d’opposition de la Table pour l’unité démocratique (MUD, large coalition) ont décidé de boycotter ce scrutin local.

Découragement

Dans le camp des anti-Maduro, l’heure semble être au découragement face à la mainmise du chavisme (du nom du défunt Hugo Chavez, président de 1999 à 2013) sur la quasi-totalité des institutions. «Je ne vais pas aller voter car je ne crois pas en la transparence du CNE», le Conseil national électoral, confie Nerver Huerta, designer graphique de 38 ans.

Dénonçant «l’absence de garanties» sur l’élection de dimanche, les formations des trois leaders d’opposition Henrique Capriles, Leopoldo Lopez et Henry Ramons Allup ont renoncé à présenter des candidats, craignant de voir se répéter le scénario des élections régionales d’octobre.

Le scrutin avait été marqué par une large victoire du camp présidentiel, qui a remporté 18 des 23 postes de gouverneurs, mais l’opposition a dénoncé de nombreuses fraudes.

Main-mise

Cette fois, «l’absence des principaux partis politiques (de la MUD, ndlr) et (la force de) l’appareil chaviste font qu’il est impossible que l’opposition puisse conserver ne serait-ce que la moitié des municipalités qu’elle contrôle», explique à l’AFP Eugenio Martinez, expert électoral.

Donc le Parti socialiste unifié du Venezuela (PSUV) «augmentera son pouvoir» dans le pays, avec derrière, un objectif-clé: l’élection présidentielle de fin 2018, qui selon plusieurs analystes et dirigeants d’opposition, devrait être avancée au premier trimestre.

Sur les 335 villes appelées dimanche à choisir leur maire pour quatre ans, le PSUV en gouverne 242 et l’opposition 76, le reste étant aux mains d’indépendants.

Des «attributions»

La lourde défaite de la MUD aux régionales a accentué ses divisions: plusieurs dirigeants emblématiques, comme Maria Corina Machado et Henrique Capriles, ont claqué la porte de la coalition.

Pour Mme Machado, participer à l’élection c’est reconnaître la légitimité de l’Assemblée constituante, aux pouvoirs très étendus (dont ceux du Parlement, unique instance contrôlée par l’opposition) et intégralement composée de partisans de M. Maduro.

Gouverneurs régionaux et maires doivent en effet, une fois élus, prêter allégeance devant cette institution, rejetée par une grande partie de la communauté internationale. «Ce ne sont pas des élections, mais des attributions» de postes aux plus dociles, commente à l’AFP Maria Corina Machado, pour qui la participation au scrutin est aussi une «trahison», une façon d’oublier la mort de 125 personnes lors des manifestations hostiles à Maduro entre avril et juillet.

D’autres ne veulent pas renoncer: «Ils essaieront de nous voler le vote, mais nous n’allons pas leur en faire cadeau», assure Yon Goicoechea, candidat à une mairie d’un quartier de Caracas. Il dit vouloir «défendre» les minces espaces que contrôle l’opposition.

L’opposition fissurée

L’analyste Luis Vicente Leon met toutefois en garde contre un «scénario dévastateur» pour les anti-chavistes, car «il n’y aura ni abstention massive» enlevant toute légitimité au vote, «ni victoire significative» des opposants candidats.

Les élections municipales seront un nouveau test pour le président Maduro qui, malgré sa faible popularité (20%), briguera un nouveau mandat en 2018, selon son vice-président Tareck El Aissami.

Il devrait justement essayer de profiter des divisions au sein de l’opposition – qui n’a même pas réussi à parler d’une seule voix lors des négociations récemment entamées avec le gouvernement, en République dominicaine – pour organiser au plus tôt le scrutin présidentiel.

Le chavisme aussi

Le chavisme présente lui aussi des fissures, comme l’a révélé cette semaine le limogeage de l’ambassadeur auprès de l’ONU, Rafael Ramirez, fidèle de Chavez désormais accusé de corruption au sein du groupe pétrolier PDVSA.

Mais il garde une solide base électorale, le fruit selon de nombreux analystes d’une «structure clientéliste» efficace. «Malgré tout, le président m’a aidé, je ne peux pas être ingrat», reconnaît William Lugo, 65 ans, au moment de recevoir un bon de Noël que le gouvernement dit distribuer à quatre millions d’habitants. «Je voterai dimanche et s’il faut le réélire, je serai là».

(nxp/ats)