Contribution: Des pistes de réflexion pour un développement économique et solidaire de la région de Tambacounda

Frantz Fanon : « Chaque génération a le choix entre trahir ou accomplir sa mission ».

A l’entame de ce nouveau siècle, nous enfants de Tambacounda et du Sénégal, sommes devant des défis majeurs. Notre région se trouve dans une situation économique et sociale catastrophique. Cette situation dangereuse exige une hauteur de vue et une rupture avec les pratiques en cours. Il est opportun et obligatoire pour toute une génération, de participer significativement à l’émergence d’un pôle de développement économique et social, dans un Sénégal uni et prospère. Pour cela les acteurs politiques et les citoyens doivent promouvoir une nouvelle forme de militantisme et d’actions. Ceux et celles qui aspirent à la plus petite parcelle de responsabilité doivent s’imprégner des difficultés que vivent leurs concitoyens, avoir une vision et un programme. Il faut que nos actions politiques et citoyennes dépassent le stade folklorique des meetings, et autres animations et se prolongent par l’échange, la réflexion, l’étude, la proposition et in fine la réalisation.


DIAGNOSTIC

  • NOUS SOMMES DOS AU MUR, LE CHANGEMENT EST VITAL

Tambacounda est à la croisée des chemins, la région se trouve dans un état économique et social calamiteux. Les problèmes sont nombreux : enclavement, insécurité, déforestation, accès à l’eau, paupérisation extrême des populations. Les défis sont immenses. La situation sociale et économique de Tambacounda est dramatique et nécessite un plan de redressement à la hauteur de ses potentialités et du courage de ses populations. Il n’est pas opportun de porter un jugement sur l’action politique, telle qu’elle a été menée dans notre région depuis des années, les faits parlent d’eux-mêmes.

Pour inverser la tendance destructrice en cours, il appartient aux acteurs politiques, aux acteurs associatifs et au citoyens de réfléchir et d’apporter des solutions.

Le développement exige une rupture et l’adoption de nouvelles pratiques politiques, qui partent de visions, de démarche concrètes, palpables et basés sur une culture d’honnêteté, d’engagement, de compétences et de résultats.

Nous sommes arrivés à un point de non retour, nous sommes dos au mur, cette situation de crise extrême est une occasion pour remettre tout à plat, revoir et corriger de manière profonde les maux, les us et habitudes qui ont plombé la région afin d’impulser une nouvelle dynamique qui enclencherait le développement économique et social de Tambacounda. Cela dans le cadre d’une République solidaire ou l’humain serait au cœur des préoccupations politiques, économiques et associatives.

Tambacounda dispose des ressorts et de personnes intègres et compétentes pour emprunter les voies du développement.

 

  • UNE CRISE PROFONDE

La région de Tambacounda est l’une des régions administratives les plus pauvres du Sénégal, si ce n’est la plus pauvre. Les indicateurs sociaux et économiques de bases sont au rouge. En effet, comparés à la plupart des autres régions du Sénégal, les taux de couverture sanitaire, de scolarisation, surtout celle des filles (même s’il faut reconnaitre des avancées durant ces quinze dernières années) d’accès aux services de base que sont l’eau, l’électricité sont ici les plus bas. A l’échelle de la région de Tambacounda, ces indicateurs sont davantage faibles dans les zones rurales où les peuplements sont dispersés.

Le diagnostic de la situation socio-économique met en relief des contraintes dues en grande partie au non mis en valeur des potentialités de la région. Mais aussi à la démission, parfois à la médiocrité et aux compromissions des personnalités politiques, intellectuelles et associatives de la région.

Il faudra revoir tout à la base, échanger, discuter afin de diagnostiquer les freins au développement et impulser une vraie politique de développement avec l’ensemble des tambacoundois et des amis de Tambacounda.

 

  • L’ENCLAVEMENT : UNE SITUATION QUI FREINE TOUTES PERSPECTIVES DE DEVELOPPEMENT

Malgré l’importance des ressources et des potentialités agricoles, force est de constater que la région de Tambacounda n’arrive pas encore à tirer véritablement profit de ses opportunités. L’enclavement limite à biens des égards la venue de potentiels investisseurs nationaux comme étrangers. Il limite par ailleurs la bonne circulation des biens et des personnes.

Le réaménagement de la route Kaolack Tambacounda est une bonne nouvelle pour les populations mais en même temps nous assistons à la détérioration de la route Tamba- Kidira-Bakel et le quasi inexistence de routes praticables (pistes non carrossables) reliant Les centres urbains et les villages de l’intérieur.

Il est très difficile de circuler surtout en période d’hivernage où des localités entières restent difficilement accessibles voire isolées. Les conséquences de cette situation sont notamment dramatiques pour l’évacuation des malades et des femmes enceintes vers les postes de santé et l’hôpital régional de Tambacounda.

L’enclavement freine les initiatives à l’image des opérateurs économiques qui ne veulent plus investir dans le transport. L’état calamiteux des routes favorisant les pannes des véhicules et leur non rentabilité, ce qui freine le commerce qui est une activité indispensable à tout développement économique.

Le désenclavement est en grande partie la condition pour viabiliser le développement dans la région.

Le Président Macky Sall qui avait à convoqué en 2006, à sa qualité de 1er ministre un conseil interministériel sur le désenclavement des régions de Tambacounda et de Matam a prit l’engagement s’il accède à la magistrature suprême de lancer un plan de désenclavement rural. Soucieux d’un développement solidaire et partagé, la tournée effectuée dans les routes sinueuses de la région en février 2011 a fini de le convaincre d’en faire une priorité.

 

  • NON MAITRISE DE L’EAU: UN DEFI A RELEVER

Malgré l’existence d’un réseau hydrographique assez important (Fleuve Sénégal, Nieriko, Falémé…), on note des problèmes liés à la maîtrise de l’eau. Pendant l’hivernage les cours d’eau sont quasiment remplis, toutefois la répartition annuelle et spatiale n’est pas équilibrée, ce qui nécessite des aménagements d’infrastructures.

Les infrastructures hydrauliques sont insuffisantes. Elle favoriserait le maintien de l’eau (barrages) et l’initiation d’une agriculture d’irrigation, qui permettrait aux populations d’avoir une activité régulière et de diversifier les productions (maraîchage, culture légumière et fruitière, semence).

 

  • LA DESERTIFICATION: UN DANGER QUI RISQUE DE LIMITER TOUS LES EFFORTS DE DEVELOPPEMENT

De par ses conditions climatiques et de par l’existence en son sein d’un domaine forestier non négligeable, la région de Tambacounda est une réserve importante pour le pays. On dénombre des hectares de steppes arborées, de savanes arborées, de savanes arbustives (surtout dans la zone du Boundou et allant vers le Niokholo). Toutefois, l’exploitation abusive pour les besoins en charbon de bois et en bois de chauffe, les feux de brousse, l’extension des défrichements, l’action nocive des éleveurs migrants et le manque de personnel d’encadrement sont une menace sérieuse pour la sauvegarde du domaine forestier.

Le projet de réserve communautaire du Boundou est un grand pas vers la préservation de notre écosystème. Des actions comme celle-ci doivent être encouragé et promu.

 

  • SANTE ET HYGIENE: DEUX ASPECTS FONDAMENTAUX DU DEVELOPPEMENT DURABLE

Les contraintes majeures au bon fonctionnement la politique de santé et d’hygiène sont dues à l’absence d’infrastructures en quantité et en qualité. La région ne compte qu’un seul grand hôpital (Régional de Tamba) qui est confronté à toutes sortes de carences matérielles et humaines. La dispersion des peuplements, la faiblesse des moyens de transports et la dégradation des routes sont un frein à l’accès au soin. Mais aussi le coût des médicaments qui sont si chères pour une population essentiellement rurale et pauvre.

Ces dernières années, pour ce qui est de l’équipement en infrastructures sanitaires on note une forte implication des immigrés originaires de la région. Malgré l’effort de ces derniers qui ont construit des cases de santé et des postes de santé dans un certain nombre villages, la région vit un drame sanitaire. En effet non seulement ces infrastructures manquent de personnels qualifiés (souvent de personnels tout court) mais en plus les populations sont obligées de faire des kilomètres pour accéder à des soins de base alors que les routes sont quasiment impraticables surtout pendant la saison des pluies. Elles ne bénéficient par ailleurs pas de soins adaptés. Résultat, le paludisme fait des ravages dans la zone et les épidémies se développent très rapidement faute de moyens de sensibilisation et d’information adéquats des populations. Par ailleurs il est fréquent de constater que nombres de postes de santé sont fermés dans les villages pendant les congés ou les absences des infirmiers responsables de ces structures. Cette situation est bien sûr dramatique pour les populations.

 

  • SCOLARISATION ET ALPHABETISATION : DEUX ASPECTS CLES DU DEVELOPPEMENT DU BOUNDOU

Ces dernières années il y’a eu un effort de construction d’infrastructures scolaires mais la population qui est essentiellement rurale et pauvre a beaucoup de mal à assurer aux jeunes la possibilité de poursuivre les études au-delà du niveau primaire. Les enfants qui n’ont pas de proches parents en zone urbaine n’ont généralement d’autres solutions que d’abandonner l’école. Ce phénomène est encore plus notable chez les filles, car il est beaucoup plus facile pour nos parents de laisser leurs garçons partir. Par ailleurs il n’existe quasiment pas de programmes d’alphabétisation en français ou langues nationales pour adultes.

 

  • L’INSECURITE: UN PROBLEME REEL AU BOUNDOU

Tambacounda connaît depuis quelques années de graves problèmes d’insécurité aussi bien dans les zones urbaines qu’en milieu rural. Nous avons assisté ces dernières années à toute sorte d’attaque contre les populations. Le banditisme, le trafic de drogue, les coupeurs de routes ont pignon sur rue dans la région. Sa position géographique (carrefour, frontière avec 3 pays), le chômage endémique, l’absence de perspectives pour les jeunes et le désespoir poussent certains jeunes à se refugier derrière l’alcool, la drogue, le banditisme et le vol pour survivre. L’absence des services de sécurité dans les zones rurales favorise le développement du vol de bétail et du banditisme. L’existence d’un cheptel important et les mouvements migratoires attisent la convoitise des bandits et des délinquants.

 

  • UNE ELITE ET DES CITOYENS PASSIFS

Tambacounda regorgent d’hommes et de femmes de talent qui dans une dynamique solidaire serait un atout de taille dans le combat contre le sous développement. Le manque d’implication des intellectuels, l’orientation des associations vers des activités plutôt sportives, les insuffisances de l’élite politique et la passivité d’une grande partie de la population constituent la cause principale du retard économique et sociale de la région.

La vie publique se limite aux tournois de football et aux meetings folkloriques de politiciens dont la seule ambition est la prise ou la conservation du pouvoir à des fins personnelles ou claniques.

Les populations sont quasi exclues des sphères de décisions, elles subissent les choix et les forfaits des élus avec une passivité déconcertante. Les organisations de la société civile sont inexistantes ou en totale léthargie.

L’élite intellectuelle a démissionné et préfère mener une vie tranquille à Paris, Dakar ou ailleurs au lieu de s’engager, laissant les destins de la région dans des mains peu experte. Ceux et celles qui ont été élus ou « choisis » pour diriger nos institutions n’ont souvent pas une envergure politique ou intellectuelle pour s’imposer dans les instances et institutions nationales.

 

PRECONISATIONS

  • DES SOLUTIONS NECESSITANT SURTOUT UNE PLUS GRANDE VOLONTE POLITIQUE

Bien qu’économiquement très pauvre, La région de Tambacounda ne manque pas d’atouts pour amorcer un développement économique et social. Les ressources et potentialités ne manquent pas, mais les bases fondamentales à leur exploitation font défaut. Il faut une plus grande volonté politique et des mesures fortes et concrètes pour sortir de cet état.

Il faut un plus grand engagement des citoyens à travers les associations et les organisations de la société civile dans la vie publique. Il faut orienter l’action des associations vers des activités économiques en encourageant la création de groupements d’intérêt économique (GIE) et de coopératives. Il faut réformer le système des tournois «  navétanes » et le réorganiser, il est inconcevable que dans une région agricole la période hivernale riment de plus en plus avec tournois de football alors que ces jeunes devraient être mobilisés pour les activités champêtres.

 

  • DES INFRASTRUCUTURES

L’enclavement est un sérieux handicap au développement économique et social de la région. Pour faciliter la circulation des biens et des personnes, il faut des actions hardies de désenclavement à travers notamment la construction de routes et de ponts en milieu rural. Il faut par ailleurs accroître la couverture postale et téléphonique, ainsi que la médiatisation et la vulgarisation des potentialités économiques et culturelles afin d’attirer l’attention des investisseurs nationaux et étrangers. La viabilisation du développement dépend en partie du désenclavement de la zone.

Il faut aussi une politique active de maîtrise de l’eau. Pendant l’hivernage les cours d’eaux sont remplis. Il faut donc maintenir l’eau, en favorisant la création d’infrastructures adéquates, en construisant des forages adaptés et de puits afin de favoriser une agriculture d’irrigation qui permettrait la diversification des productions et une agriculture hors saison des pluies.

L’accès à l’eau est très important dans le cadre du développement d’une région, surtout quand elle est comme principales richesses l’agriculture et l’élevage.

Il est vital aussi de construire des infrastructures de santé de qualité et doté chaque commune de la région d’un hôpital équipé de matérielles modernes. Les postes et cases de santé construits par les tambacoundois de la diaspora doivent obligatoirement bénéficier d’infirmier d’état. Ceci est d’autant plus possible que des centaines de jeunes formés à l’école nationale de développement sanitaire et social (ENDSS) chôment, faute d’affectation.

Il faut saluer l’apport de l’agence japonaise de coopération qui construit en ce moment les centres de santé de Diankémakhan et de Makacoulibatang.

  • LA VALORISATION DES PRODUCTIONS POUR UNE PLUS GRANDE SECURITE ALIMENTAIRE

Il faut accroître les productions et les diversifier en favorisant une agriculture d’irrigation et mettre en place une politique d’encadrement. Il faut donner la possibilité aux villageois d’accéder à des formations aux techniques agricoles et pastorales et aussi leur permettre d’accéder au micro crédit et à des taux réduits. La mise en place de coopératives de matériels agricoles (par exemple un village s’engage pour prendre un tracteur en crédit) permettrait d’accroitre la productivité.

 

  • CREER DES FERMES AGROPASTORALES POUR RESORBER LE CHOMAGE DES JEUNES

L’agriculture peut résoudre le chômage des jeunes, une agriculture moderne et diversifiée. Les jeunes veulent travailler la terre mais pas dans les mêmes conditions que nos grands parents. Il serait judicieux vu la forte demande en denrées alimentaires de créer des fermes agropastorales avec divers statuts : entreprise individuelle, GIE ou coopérative et qui utiliseraient les technologies modernes permettant de maximiser la productivité. Ces fermes créeraient des emplois annexes aussi et permettraient à la région de devenir autosuffisante et d’exporter.

L’abondance favoriserait aussi l’émergence d’un secteur agro-industriel à travers la transformation des produits alimentaires.

 

  • LA SECURITE UN PROCESSUS A ASSURER EN PERMANENCE AU BOUNDOU

Il faut assurer la sécurité intérieure et transfrontalière en augmentant de manière plus forte et significative la présence des forces de l’ordre en zone rurale. Cela d’autant plus par exemple que le phénomène de vol de bétail (une des seules ressources viables dont disposent les villageois) et de coupeurs de routes est constant. Par manque de moyens les décisions de justice ne sont souvent pas suivies d’effets faute de moyens matériels et humains. Chaque communauté rurale doit disposer d’agents de sécurité pour assurer la sécurité des biens et des personnes.

La lutte contre le chômage, la scolarisation et l’apprentissage sont essentiels pour venir à bout de la délinquance juvénile.

 

  • LE DEVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES.

Depuis quelques années, l’on peut constater que le retard que nous accusions sur le plan scolaire commence à être rattrapé. Nous avons aujourd’hui à l’université de Dakar des jeunes issues des villages reculés de la région. Ce qui est très important car la première des ressources est la ressource humaine. Cependant, des difficultés demeurent. Beaucoup d’élèves abandonnent les bancs prématurément, car les moyens de leurs parents sont limités. Ils n’ont souvent pas les moyens de continuer leurs études dans les zones urbaines où sont concentrés les collèges et lycées. Les plus touchés par ce phénomène sont les filles, du fait des mariages précoces et de leur vulnérabilité dans des zones « étrangères ». Les zones rurales doivent avoir un statut de zones d’éducation prioritaires où l’on identifiera les obstacles et y remédier en mettant les moyens.

Tambacounda ville carrefour doit devenir un pôle universitaire, à travers la construction d’une université pluridisciplinaire. Les conditions de vie des étudiants de l’intérieur à Dakar sont scandaleuses et font le lit de l’échec universitaire. Il faut un lycée dans chaque commune ou grande communauté rurale, deux pour les communes les plus peuplées : Tambacounda, Diawara, Bakel et un collège dans chaque chef lieu de communauté rurale ou gros villages.

La formation professionnelle et l’apprentissage doivent être encouragés. Le projet de formation aux métiers de l’automobile de Dembélé Doumbouya et celui de l’école de formation des ressortissants de Bakel en France doivent être soutenus et appuyés.

Il est indispensable d’avoir des ressources humaines bien formées et en bonne santé pour gagner la bataille du développement. Il est par ailleurs urgent d’améliorer les conditions de vie sanitaire des populations en dotant chaque communauté rurale d’un médecin et des infirmiers dans tous les villages. Il faut aussi assurer l’approvisionnement en eau potable et mettre en place des projets de formation pour les villageois. Il faut enfin accentuer la lutte contre l’analphabétisme et mettre en place une politique permettant aux jeunes écoliers de poursuivre leurs études en favorisant le transport et la création de collèges et d’internats dans les chefs lieu d’arrondissements. Après 50 a ns d’indépendance, Tambacounda a été le parent pauvre de création d’infrastructures, l’Etat doit rectifier le tir afin de permettre à cette région d’utiliser ses potentialités humaines et naturelles qui sont indispensables à l’émergence du Sénégal.

 

  • MISE EN PLACE DE CONSEILS DE QUARTIERS ET DE CONSEILS VILLAGEOIS DE DEVELOPPMENT

Le Sénégal s’est lancé depuis plusieurs années dans un processus de décentralisation et de déconcentration revêtant un caractère politique par la création d’organes exécutifs locaux mais aussi un caractère administratif et technique pour une gestion administrative à la base. C’est un transfert de pouvoir qui se fait par la création de nouvelles personnes morales.

En 1990, on assiste à un renforcement du pouvoir des Présidents des communautés rurales qui deviennent ordonnateurs de budget à la place des Sous Préfets, un transfert de compétence aux exécutifs régionaux et municipaux.

Mais en prenant exemple sur nos zones rurales, l’organisation reste largement imparfaite, le fonctionnement des conseils ruraux est souvent centralisé à la présidence. Il n’existe pas de répartition des domaines de compétences au sein du conseil, ce qui fait que les conseillers ne sont pas impliqués comme il faut dans les  plans locaux de développement.

La décentralisation doit se poursuivre par la mise en place d’organe exécutif de base au sein de chaque village, car nos villages ne sont pas gérés. L’autorité politique et administrative suprême est le Chef de village, son pouvoir est un héritage traditionnel et féodal, il joue un rôle coutumier assez important, surtout pendant les crises entre personnes ou familles, donc sa fonction est importante pour assurer la paix civile.

Mais au fil du temps, avec l’évolution des mœurs démocratiques et l’exemple des pratiques démocratiques en occident, l’autorité du Chef de village se fissure, sa fonction est aujourd’hui beaucoup plus coutumière qu’administrative ou politique.

Ce phénomène engendre un vide dans la gestion des villages, il n’existe plus d’organe fédérateur chargé de l’administration, mais plutôt des organisations diverses (associations et autres) qui interviennent de manière anarchique et désordonnée, dans un esprit de concurrence dans la gestion des activités des villages. Cette désorganisation entraine des conflits entre les différents intervenants, pose un problème de suivi des projets et de maitrise d’ouvrage. Par ailleurs les partenaires au développement ont du mal à identifier un interlocuteur légitime représentant toutes les entités et sensibilités du village pour une implication maximale des villageois dans les différents projets.

Il est donc nécessaire d’avoir un seul interlocuteur en matière de politique et de développement. Cela pourrait être un Conseil Villageoise de Développement (CVD), élus par l’ensemble des villageois, pour une durée bien déterminée, ayant un mandat pour la gestion politique, administrative, technique et financière du village.

Dans le même souci d’impliquer les citoyens dans gestion de la vie publique, il est nécessaire de mettre en place des conseils de quartier qui participeraient à la vie publique locale. Les adjoints au maire auront une délégation pour s’investir dans les activités d’un quartier.

La création de ces conseil permettra d’impliquer les populations au maximum dans les politiques de développement, donc de renforcer la démocratie participative. Mais aussi de diagnostiquer et de répondre aux problèmes et défis à la base. Par ailleurs, cela favorisera une

 

  • CULTURE ET TOURISME

Tambacounda dispose d’un patrimoine culturel inégalable. La position de région carrefour où se sont rencontrés, regroupés des populations diverses fait de Tambacounda une région arc en ciel. La grande majorité des tambacoundois sont bilingues ou trilingues (en langues nationales). Il est nécessaire d’organiser dans la région avec l’appui d’acteurs culturels une manifestation annuelle d’envergure nationale voire internationale. Cet événement contribuera à la revalorisation des cultures de la région dans un souci d’enracinement dans les valeurs et coutumes locales. Il sera en outre un vrai outil de communication qui permettrait d’exposer et de vendre l’image et les richesses de notre terroir. Ce sera l’occasion de mobiliser tous les acteurs culturels de notre département et de les aider à vulgariser leurs productions.

La richesse de notre culture associée aux potentialités naturelles de la région (la réserve communautaire du Boundou, le Parc Niokholo Koba etc.) devraient « boostaient » le tourisme rural et créait des emplois.

 

  • MIGRANTS : ORIENTER LES TRANSFERTS D’ARGENT VERS DES SECTEURS PRODUCTIFS.

Selon le ministère des sénégalais de l’extérieur, les sénégalais de la diaspora ont transféré 500 milliards par an entre 2005/2009. Ce qui constitue une manne financière très importante. Vu le nombre de migrants originaires du Niani, du Wouli, du Boundou et du Gadiaga, nous pouvons dire qu’une bonne partie de cette manne a été transféré dans la région de Tambacounda. Mais ces transferts répondent généralement à des besoins sociaux de bases ou de prestiges.

Pour combattre efficacement le sous développement, il est indispensable de valoriser cet atout, en orientant les transferts d’argent vers des secteurs productifs. Les efforts des migrants dans la création de petites infrastructures de bases sont significatives et l’accompagnement de dispositifs comme le programme d’appui aux initiatives de solidarité et de développement (P.A.I.S.D) ont permis ont favorisé l’implantation d’infrastructures dans les villages. Mais il faut aller plus loin en encourageant les tambacoundois de la diaspora à s’engager dans le créneau de la création d’entreprises. Ceci nécessite la mise en place d’un cadre de dialogue et d’échanges entre tambacoundois de l’intérieur et de la diaspora.

Pour viabiliser cela, il est nécessaire d’encourager nos frères de la diaspora à créer un cadre associatif unitaire afin d’être les interlocuteurs des organisations locales et d’aller vers la création d’un vrai cadre de partenariat public/privé.

 

  • COOPERATION ET MUTUALISATION

  • Banque coopérative

L’émergence de petites et moyennes entreprises, des fermes agropastorales et autres micro entreprises indispensables au développement et à la lutte contre le chômage est conditionné par la création d’organismes bancaires ou de crédits.

La diaspora peut être sollicitée pour la création d’une banque coopérative domiciliée à Tambacounda et qui pourrait appuyer la création d’entreprises viables pour les tambacoundois. Les migrants qui veulent épargner peuvent devenir les sociétaires au même titre que des personnes morales ou physiques.

Les avoirs de la diaspora tambacoundoise dans différentes banques à travers le monde constituent des milliards qui peuvent en partie servir à la création d’une banque coopérative.

 

  • Mutuelle de santé

L’objectif est d’établir des systèmes de soin de santé durables, offrir l’accès aux traitements et aux médicaments pour tous. Un système d’assurance-santé qui permettrait l’accès aux soins à tous, dans un cadre participatif.

Cela peut être une réalité à travers la création d’une mutuelle de santé qui couvrirait les besoins en santé des sociétaires et de leurs familles dans la région. Ceci est d’autant plus utile quand on prend en compte la part des dépenses de santé dans les transferts d’argent des migrants. Imaginez chaque immigrés originaire de la région cotisant 10 euros/ mensuel au titre de l’assurance santé. Ajoutez à cela les adhésions internes qui doivent être accessible aux personnes les moins démunis. Cette caisse pourrait engranger des milliards, assurer une couverture médicale à la population et financer d’autres activités avec les bénéfices.

 

C’EST POSSIBLE, C’EST VITAL

L’émergence se fera avec une élite politique, économique, intellectuelle et associative engagés et des citoyens vigilants. Rien n’est possible sans le génie de l’homme, sans une vision et une volonté politique.

Il faut remettre tout à plat et convoquer des assisses régionales à Tambacounda et dans la Diaspora. Cette cadre de concertation et d’échanges devraient déboucher sur un plan d’action.
Bénéficier d’infrastructures adaptées, mettre en place des projets de développement économique et solidaire à travers des coopératives et des mutuelles seront des réalités si nous adoptons un esprit d’engagement, de dépassement et d’échange entre tambacoundois et amis de Tambacounda. C’est à ce niveau que nous devons d’abord nous remettre en mouvement pour construire le développement économique et durable de demain.

Oui, nous devons avoir des projets plein la tête et une saine ambition pour la région de Tambacounda.

 

Contribution de Djimo Souaré / Responsable politique A.P.R/ YAAKAAR / Département de Goudiry /