Kidira : Dégâts collatéraux de la guerre au Mali, peur et galère sur la ville

Au cinquième jour d’offensive franco-malienne contre les Jihadistes qui ont conquis le nord Mali, à Kidira, dernière ville du Sénégal et porte d’entrée vers le territoire malien, les populations sont partagées entre inquiétudes et préoccupations par la situation.

Trait d’union entre le Sénégal et le Mali, Kidira vit un véritable calvaire, ces derniers jours, à cause de l’offensive franco-malienne contre les Jihadistes. Pour ceux qui le connaissent, Kidira est la dernière ville du Sénégal dans la frontière avec le Mali. Kidira se situe dans la région de Tambacounda (193 km de Tamba) et dans le département de Bakel (40 km de Bakel), le nouveau découpage administratif de la région avec Kédougou qui est devenu une région a fait de Kidira une commune.

Du matin au soir, la Route nationale grouille de gros porteurs au grand dam des riverains Kidirois. Des kilomètres d’embouteillages plombent l’atmosphère. Pour atteindre la ville malienne de Diboli, les camions attendent de nombreuses heures, avant de traverser la frontière, créant un bouchon monstre sur la Nationale n°1 reliant Tambacounda à Bakel. Malgré les efforts fournis par la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (Cedeao) pour la circulation des biens et des personnes, Kidira constitue ce jour un calvaire pour les transporteurs, obligés d’attendre des heures interminables pour des opérations de dédouanement ou autres contrôles routiers. Tous les matins, c’est le même décor qui s’offre à la population de Kidira. La Mairie de Kidira étudie actuellement des solutions de sortie de crise pour apaiser l’atmosphère. Pendant ce temps, l’Etat amuse les populations et feint d’ignorer cet enfer. Kidira, l’échec de la coopération sous-régionale.

Les maliens inquiets pour leur famille restée au pays

Les nombreux ressortissants maliens établis à Kidira n’ont plus le cœur à la fête. Ils sont inquiets pour leurs familles respectives restées au bercail. La raison est justifiée. «Je suis vraiment préoccupée par ma famille qui est à Sévari. Chaque jour, je paie 10 000 FCfa de crédits pour appeler ma famille et s’enquérir de leur situation», avance Maïmouna Diarra commerçante établie à Kidira, qui affirme que l’implication des forces françaises dans cette guerre était indispensable. A l’en croire, seules les forces françaises peuvent régler le problème. Toutefois, Maïmouna est formelle : «Nous lançons un appel afin que les autorités n’acceptent plus de négocier avec ces soi-disant musulmans de rebelles.»  Selon Aliou Traoré, cette guerre a pénalisé tout le monde. «Présentement, rien ne marche à cause de la guerre. Notre chiffre d’affaires a complètement baissé. A cela, s’ajoutent les inquiétudes. On ne dort plus la nuit et à chaque fois, on appelle nos familles restées au pays», souligne-t-il.  Scénario similaire chez les transporteurs.

Le transport connaît ces derniers jours un énorme coup de frein économique au grand malheur des chauffeurs au niveau de la gare routière de Kidira. «Les chauffeurs de ‘’sept places’’ ont du mal à trouver des clients pour le Mali, pour cause de guerre. Les chauffeurs manifestent leur mécontentement, mais la réalité est dure à accepter. Des dizaines de véhicules sont là, mais peine à trouver des clients pour se rendre au Mali», peste Modou Ndao, chauffeur qui assure la navette Kidira-Bamako, deux fois par semaine.

Quant aux Kidirois, ils sont préoccupés par la situation qui prévaut au Mali, car ces deux pays frontaliers entretiennent depuis longtemps de très bonnes relations. «Nous sommes concernés par la situation qui prévaut au Mali en tant que Sénégalais. Le Mali est un pays voisin, ami avec le Sénégal entretient d’excellentes relations. Nous devons nous solidariser avec eux», déclare Abdoul Khadre, un commerçant. Mais s’inquiète pour la sécurité des Sénégalaises, raison pour quelle, il encourage des mesures fortes pour stopper le danger qui guette le Sénégal. «Avec les frontières qui sont poreuses, personne n’est à l’abri. Vous voyez comment les gens traversent le Pont pour se rendre au Mali à pied. On se sent vraiment menacés, car ce qui est arrivé au Mali peut arriver au Sénégal. Donc, il faut dés à présent rayer le mal à la racine. L’envoi des Diambars est une solidarité agissante», ajoute-t-il, avant de relever que si le Mali s’embrase, la sous-région sera déstabilisé, particulièrement le Sénégal. Cependant, les Sénégalais comptent sur le professionnalisme et le courage de ses forces de sécurité pour maintenir la paix.

En tout cas, même si les ressortissants maliens se réjouissent à l’unanimité de l’intervention des forces françaises au nord Mali, il convient de souligner que ces Maliens souhaitent  le retour définitif de la paix au nord Mali où l’insécurité commence à freiner l’essor du pays longtemps soumis au feu des jihadistes.

 

Ousseynou Diallo / Tambacounda.info /