Ferry naufragé: Les actes de l’équipage sont «équivalents à un meurtre»

La présidente de la Corée du Sud Park Geun-Hye a lourdement chargé le capitaine et l’équipage du ferry naufragé. “Les actes du capitaine et de certains membres de l’équipage sont totalement incompréhensibles, inacceptables et équivalents à un meurtre”, a déclaré la chef d’État. “Non seulement moi, mais tous les Sud-Coréens, avons le cœur brisé, sous le choc, et rempli de colère”. Trois officiers et un mécanicien ont été interpellés et placés en garde à vue. Samedi avaient été arrêtés le capitaine Lee Joon-Seok et deux membres de l’équipage, dont l’officier subalterne et sans grande expérience qui se trouvait à la barre au moment du drame.

Ils doivent répondre des accusations de négligence et de carence dans la sécurité des passagers, en violation du code maritime. Les quatre personnes arrêtés lundi pourraient être poursuivis pour les mêmes chefs d’accusation, selon les déclarations de la justice.

Un équipage paniqué
Les échanges, rendus publics, avec les autorités maritimes lors de l’accident dépeignent un équipage paniqué, incapable de prendre une décision, alors que le Sewol, immobilisé suite à un choc, s’apprête à sombrer. Les autorités ordonnent à l’équipage de s’assurer que tout le monde porte un gilet de sauvetage, tandis qu’à bord, l’équipage demande, de plus en plus affolé, quand vont arriver les bateaux de secours.

“Faites-leur au moins porter une bouée de sauvetage et laissez-les flotter! Tout de suite!”, crie un responsable des secours à terre. Il est de plus en plus évident que le capitaine, Lee Joon-Seok, 59 ans et des années d’expérience, a retardé bien trop longtemps l’évacuation du ferry, et qu’il a ensuite “abandonné” les passagers en quittant le bateau, alors que des centaines étaient encore à bord, piégés, a estimé la présidente.

64 morts et 238 disparus
Le dernier bilan, qui date de lundi matin, fait état de 64 morts et de 238 disparus, sur les 476 personnes à bord du Sewol, dont 352 lycéens en voyage scolaire. “Ça dépasse complètement l’imagination, d’un point de vue légal et moral”, a déclaré Park Geun-Hye. L’enquête se penchera sur toutes les parties impliquées, des inspecteurs chargés de la sécurité à l’équipage, en passant par les propriétaires du ferry, a-t-elle précisé. Selon les témoignages des rescapés, après que le ferry s’est immobilisé, les passagers ont reçu la consigne de ne pas bouger, pendant plus de 40 minutes. Lorsque le bateau a commencé à piquer du nez, il était trop tard pour sortir du bateau, les passagers ne parvenant pas à remonter le long de couloirs glissants, en oblique, alors que l’eau s’engouffrait. “Des minutes précieuses bêtement gaspillées”, écrit en Une le quotidien Dong-A Ilbo lundi.

Messages envoyés par les passagers récupérés
Pour reconstituer le déroulé des événements, les enquêteurs récupèrent des centaines de messages envoyés par les passagers –la plupart des adolescents–, notamment via Kakao Talk, un service de messagerie instantanée très populaire en Corée. “Nous voulons utiliser les conversations sur Kakao Talk (…) pour notre enquête”, a déclaré un responsable à la presse.

Un de ces messages rendu public peu après la catastrophe a été envoyé par une lycéenne à son père, identifiée sous le nom de Shin. “Papa, ne t’en fais pas. Je porte mon gilet de sauvetage et je suis avec les autres filles. Nous sommes dans le bateau, dans le couloir”. Son père lui ordonne de sortir à tout prix mais il était trop tard. “Papa, je ne peux pas. Le bateau penche trop. Le couloir est plein de gens”, dit-elle dans son dernier message. Le capitaine et deux membres d’équipage, dont un officier subalterne peu expérimenté qui se trouvait à la barre lors de l’accident, ont été arrêtés par la police samedi, pour négligence et carence dans la sécurité des passagers.

Gouvernement et autorités lourdement critiqués
Les familles des morts et des disparus critiquent vertement la réaction du gouvernement et des autorités depuis le naufrage, estimant notamment que les secours ont été trop lents à entrer dans le ferry, entièrement submergé. La chef de l’État avait elle-même affronté l’exaspération et la colère des proches des disparus, lors d’une rencontre tendue la semaine dernière à Jindo, l’île voisine du lieu de l’accident, devenu quartier général des opérations de secours et de soutien aux familles. Les opérations se poursuivaient lundi à l’intérieur de ferry, où les plongeurs ont mis longtemps à entrer en raison de violents courants et d’une visibilité quasi nulle. Vingt-quatre corps ont été récupérés à l’intérieur.

“Nous pensons que beaucoup se trouvent sur les 3e et 4e ponts, où étaient situées les cabines et nous allons nous concentrer sur cette zone”, a indiqué un porte-parole des garde-côtes. Les cadavres, enveloppés d’un linge blanc, sont débarqués au petit port de Jindo, qui retentit des larmes et des cris des familles, avant d’être amenés sous une tente pour être identifiés. (afp/Newsnet)