
Des étudiants ont veillé tout la nuit de samedi dans la faculté occupée des Mines de l’Université technique d’Istanbul d’Istanbul en réaction à la catastrophe minière de Soma, qui a fait 301 morts, alors que la police a procédé au premières arrestations des possibles responsables de l’accident.
«Cette faculté est occupée», peut-on lire sur une énorme banderole à l’université. Partant d’une simple protestation contre les liens de la prestigieuses Université avec la compagnie qui exploite la mine de Soma, l’action s’est transformée vendredi en occupation des lieux, après que des élèves ingénieur se sont enchaînés aux portes de la faculté.
L’action a déjà porté ses fruits. L’université a annoncé qu’elle avait coupé ses liens avec les propriétaires de la Soma Komur qui siégeaient au conseil d’administration de la faculté.
«La faculté est complice de la mort des mineurs. L’entreprise minière a organisé un séminaire ici deux semaines avant la catastrophe. Nous ne quitterons pas ce bâtiment tant que les responsables n’auront rendu des comptes», a déclaré Orkun, un étudiant de 21 ans.
Dirigeants arrêtés
Un voeu qui commence déjà à se réaliser. La police turque a arrêté dimanche 18 personnes, y compris les dirigeants soupçonnés de négligence de la société d’exploitation de la mine de Soma.
Des dizaines de procureurs ont été assignés vendredi pour enquêter sur l’incendie et l’explosion – qui aurait été provoqué par un défaut électrique. L’exploitant accusé d’avoir privilégié la rentabilité au détriment de la sécurité de ses salariés, nie avec force toute négligence.
«Nous avons tous travaillé très dur. Je n’ai pas vu un tel incident en 20 ans», a déclaré son directeur général Akin Celik. Il n’était pas clair si Celik figurait parmi les personnes arrêtées.
Un rapport d’expertise préliminaire sur l’accident, obtenu par le journal Milliyet, a mis en exergue plusieurs graves manquements aux mesures de sécurité, dont un manque de détecteurs de monoxyde de carbone.
Une «belle mort»
Les étudiants ont d’autres exigences, y compris la démission de Orhan Kural, un professeur de l’exploitation minière à l’université, pour avoir déclaré que ceux qui meurent d’une intoxication au monoxyde de carbone ont une «belle mort».
Kural s’est ensuite excusé, affirmant qu’il essayait juste d’expliquer scientifiquement l’effet du monoxyde de carbone, qui a causé la mort des mineurs lors de l’accident industriel le plus meurtrier de l’histoire de la Turquie.
Régime visé
L’action des étudiants vise également le régime islamo-conservateur, soupçonné d’avoir couvert la course au profit au détriment de la sécurité dans les mines privatisées. «Le feu de Soma va brûler le parti AKP» du Premier ministre, avertit un slogan inscrit sur les murs de la faculté.
Le Premier ministre, Recep Tayyip Erdogan, tout comme l’entreprise Soma Kömür Isletmeleri, ont nié tout négligence. Tout en promettant de faire «toute la lumière» sur les causes de l’accident, M. Erdogan a imputé cette catastrophe d’un autre âge à la seule fatalité.
Le fait que les inspecteurs qui évaluent les risques dans les mines sont payés par les entreprises minières qu’ils contrôlent, jette le doute sur la fiabilité de leurs rapports.
«Certains des experts d’inspection de la mine à Soma étaient probablement diplômés de notre école. Mais avoir un diplôme ne fait pas automatiquement de vous un bon ingénieur», a regretté Begum, une étudiante.
(afp/ats/Newsnet)