Tambacounda : Fermeture annoncée des sites d’orpaillage « une catastrophe pourtant évitable » selon les populations

Au terme du conseil des ministres délocalisé de Kédougou, quand Macky Sall martelait que d’ici la fin du mois de mai, un terme sera mis à l’insécurité par endroits favorisé par la floraison des sites d’orpaillage, et que l’activité d’orpaillage allait être mieux réglementée, personne ne pouvait soupçonner qu’il fait allusion à « la fermeture de tous les sites », sous quelque prétexte que ce soit. Même si aucune source officielle n’a confirmé ou infirmé cette information, tout porte à y croire avec l’allure que prennent les opérations en cours dans la région de Kédougou et qui devront s’étendre à celle de Tambacounda.

Dans l’agenda concocté à la gouvernance de Kédougou au cours des différentes réunions, il a été question de remblayer les parties du site de Kharakhéna qui ne sont pas dans le couloir d’orpaillage officiel. Le village de Kolya devait être investi parce qu’une colonie d’ouest africains y avaient installé ses quartiers pour traiter au cyanure la roche afin qu’elle puisse libérer le métal précieux. Les mêmes sources de renseigner que les villages de Diakhaly et de Sambrambougou étaient aussi inscrits sur les tablettes des autorités administratives.

Quand les forces de sécurité et de défense ont lancé les opérations, avec des bulldozers qui remblayaient des puits d’orpaillage à Kharakhéna, tous ont pensé que c’est le discours de Macky Sall qui prenait corps. De folles rumeurs, d’ailleurs persistantes, ont fusé de partout pour dire que tous les sites d’orpaillage traditionnels de la région naturelle du Sénégal Oriental vont être fermés, et comme argument avancé, le président de la république voudrait que le secteur soit réorganisé, de façon à ce que l’activité d’orpaillage soit saisonnière (fermer les sites durant la saison hivernale pour éloigner les risques d’insécurité alimentaire car Kédougou a aussi une vocation agropastorale). Il s’y ajoute que la puissance publique cherche à sécuriser les cartes d’orpailleur qui font office de permis d’exploitation artisanale, et elles ne seront délivrées qu’aux nationaux remplissant certaines conditions.

QUE VONT DEVENIR LES POPULATIONS DE KEDOUGOU SANS L’ORPAILLAGE ?

La question est sur toutes les lèvres et elle demeure pour l’heure sans réponse. « Ce n’est pas encore l’exploitation industrielle qui impacte de façon positive sur l’économie de la région de Kédougou. Toutes les mutations que vous avez vues ici sont le fait de l’orpaillage. Les bâtiments en dur sortent partout de terre, le commerce connait un essor inestimable, les femmes s’activent davantage dans la restauration, les biens et services se développent, l’argent circule au grand bonheur de tous », raconte un septuagénaire que nous avons accroché au téléphone, et qui connait parfaitement bien ce secteur de l’orpaillage. Notre interlocuteur reconnaitra tout de même que l’activité engendre d’énormes dégâts sur l’environnement, avec comme corollaire la prolifération de certaines maladies tout comme la dépravation des mœurs et l’accroissement de l’insécurité. « Je suis d’avis qu’il faut organiser l’activité, mais qu’il fallait prendre le temps de procéder à une bonne campagne d’information et de sensibilisation. Mais tomber comme ça sur des gens qui ont pour la plupart contracté des prêts pour dire de tout arrêter sans pour autant prévoir des mesures appropriées d’accompagnement, cela va nécessairement poser des problèmes plus que ça n’en résout ».

Du côté de Diyabougou dans la région de Tambacounda, des pas de géant sont pourtant posés allant dans le sens de la réorganisation. Près d’un millier de cartes d’orpailleurs y sont délivrés, les puits distribués aux détenteurs de cartes. Là bas, les orpailleurs ont même compris que l’or du Sénégal ne doit pouvoir échapper aussi facilement au pays et ils tiennent à avoir toutes les informations nécessaires pour l’établissement de comptoirs d’achat. A Diyabougou, les orpailleurs s’organisent pour construire le poste de gendarmerie de la localité car tous ont pris conscience que sans la sécurité, leur activité ne saurait prospérer. L’on s’active aussi au tour de la mise en place de puits à pompes à défaut de forage pour éviter l’utilisation de l’eau de la Falémé ainsi que l’organisation d’une grande journée de reboisement courant août. « Ce formidable élan risque d’être brisé et il va être difficile de leur faire croire quoique ce soit » a lancé, visiblement dépité un jeune orpailleur de Tambacounda qui y a fait fortune. Tous se posent là bas la question de savoir à quelle sauce ils vont être mangés, eux qui avaient bavé quand le site était fermé après les évènements douloureux de la nuit du 4 au 5 mars 2013 qui avaient fait plusieurs morts.

Les sites vont-ils effectivement tous fermer boutique ou seuls ceux qui ne sont point autorisés qui vont le faire, seul Macky Sall et ses ministres concernés peuvent répondre de façon précise à cette question. Une chose est et demeure indubitable, si cette fermeture annoncée pour le 31 mai prochain s’avérait vraie, il y aura du grabuge, car les uns et les autres ne sont point préparés à cela et l’économie de la région de Kédougou en prendrait un sacré coup.

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