Controverse: Le malaise enfle autour de la libération du sergent Bergdahl

Le président Barack Obama a défendu mardi bec et ongles l’accord d’échange de prisonniers avec les talibans en Afghanistan pour pouvoir récupérer le soldat américain Bowe Bergdahl après cinq ans de captivité, espérant faire taire une polémique qui enfle aux Etats-Unis.

Depuis ce règlement spectaculaire annoncé samedi par le président américain, les républicains tirent à boulets rouges sur l’administration démocrate, coupable à leurs yeux d’avoir enfreint la loi et de mettre en danger les militaires et civils américains dans les zones de conflits.

«Point. Point final»

Mais le président Obama, en visite à Varsovie, a tenté de couper court à toute controverse. «Les Etats-Unis ont toujours eu une règle sacrée: nous ne laissons pas derrière nous nos hommes et femmes en uniforme», a-t-il martelé lors d’une conférence de presse. «Si un Américain est en captivité, nous devons le ramener. Point. Point final», a insisté le président des Etats-Unis, commandant en chef des forces armées.

Comme l’avaient répété ses ministres et conseillers tout au long du week-end, il a aussi affirmé que Washington était «inquiet de la santé du sergent Bergdahl» pendant sa détention et qu’il était urgent d’agir. «Nous avons vu une occasion (…) Nous l’avons saisie», a justifié M. Obama.

Le sergent Bowe Bergdahl, le seul soldat américain qui était détenu par les talibans, a été libéré samedi aux termes d’un accord pour élargir en échange cinq cadres talibans détenus à Guantanamo. Ce règlement a fait l’objet de longues négociations depuis des années, sous l’égide du Qatar qui a servi d’intermédiaire.

Bowe Bergdahl était toujours hospitalisé mardi au centre médical américain de Landstuhl (Allemagne) où son état restait «stationnaire» selon l’hôpital.

Les Etats-Unis en danger

Très critiques contre cette décision, des élus républicains au Congrès s’insurgent de ne pas avoir été mis au courant officiellement 30 jours avant l’opération, comme la procédure constitutionnelle l’exige.

«Le processus a été écourté parce que nous voulions être sûrs de ne pas rater cette occasion», s’est encore justifié le président américain. Il a aussi fait dire à son cabinet de politique étrangère, le Conseil de sécurité nationale de la Maison Blanche, que le chef du Pentagone Chuck Hagel avait eu l’autorité réglementaire pour ordonner cet échange de prisonniers.

En outre, les républicains et des associations sont vent debout depuis trois jours, déplorant que le gouvernement américain ait «traité avec des terroristes» et redoutant des risques accrus d’enlèvements pour les Américains, civils ou militaires, dans des zones dangereuses.

Des élus ont même prédit que les cinq cadres talibans libérés de Guantanamo pourraient reprendre du service dans l’insurrection en Afghanistan. Là encore, le président Obama a assuré que les Etats-Unis «garderaient un œil sur eux», sachant que les cinq hommes doivent rester au moins un an au Qatar. «Je ne le ferais pas si je pensais que c’était contraire à la sécurité nationale de l’Amérique», a affirmé le chef de l’exécutif.

«Ne reviens pas»

La rébellion islamiste afghane a de son côté publié mercredi sur son site internet la vidéo de la libération de Bergdahl, remis en pleine campagne afghane aux forces américaines arrivées en hélicoptère.

Dans cette vidéo de 17 minutes intitulée «Cérémonie d’échange du soldat américain», le sergent Bergdahl, crâne et barbe rasés et filmé de près entouré de plusieurs hommes enturbannés.

Américains et rebelles se serrent la main et, quelques secondes plus tard, Bergdahl est conduit dans l’hélicoptère. Une légende apparaît alors en incrustation sur la vidéo: «Ne reviens pas en Afghanistan».

La vidéo publiée mercredi par le commandement des rebelles afghans montre également des images de l’arrivée des cinq talibans dimanche au Qatar, accueillis triomphalement par leurs proches.

«L’armée de fermera pas les yeux»

La libération du sergent a alimenté une autre polémique sur les circonstances exactes de sa disparition le 30 juin 2009 alors qu’il était sur un poste avancé de la province de Paktika, dans l’Est de l’Afghanistan.

L’armée américaine «ne fermera pas les yeux» s’il s’avère que le sergent Bowe Bergdahl a déserté ou abandonné son poste avant sa capture, a affirmé mardi le numéro un de l’US Army, tout en rappelant son droit à la présomption d’innocence.

Le général Martin Dempsey, chef d’état-major interarmées, rappelle dans un communiqué que «les questions sur la conduite de ce soldat en particulier sont distinctes des efforts déployés pour récupérer tout soldat américain prisonnier de l’ennemi».

(ats/afp/Newsnet)