Irak: Combats à Tikrit après la proclamation du califat

L’armée irakienne poursuit lundi son offensive sur Tikrit pour tenter d’en déloger les djihadiste sunnites, menés par l’Etat islamique en Irak et au Levant (EIIL). Forts de leurs succès, ceux-ci ont proclamé la veille la restauration d’un califat englobant les territoires qu’ils contrôlent en Syrie et en Irak.

L’EIIL a annoncé dimanche l’élévation de son chef Abou Bakr al Baghdadi au rang de calife du monde musulman. Cette déclaration est intervenue trois semaines après le déclenchement d’une offensive qui a permis à l’organisation et à ses alliés sunnites de s’emparer d’une grande partie du nord-ouest de l’Irak.

Aidées par des milices chiites, les forces irakiennes sont parvenues à stopper l’EIIL à une centaine de kilomètres au nord de Bagdad. Elles ont toutefois été incapables de reprendre des villes.

C’est notamment le cas de Tikrit, ancien fief de Saddam Hussein à 160 km au nord de la capitale, sur laquelle l’armée concentre ses efforts depuis plusieurs jours. Des hélicoptères ont bombardé des positions de l’EIIL au cours de la nuit et une bataille faisait rage lundi dans les faubourgs sud de la ville, ont rapporté des habitants.

«Menace pour tous les pays»

Le califat ou «Etat islamique» abolirait les frontières tracées par les accords franco-britanniques de Sykes-Picot en 1916 sur le démantèlement de l’Empire ottoman. La proclamation du califat est considérée comme un défi lancé aux autorités irakiennes, qui en appellent ouvertement maintenant à la communauté internationale.

«Cette proclamation est un message adressé par l’Etat islamique non seulement à l’Irak ou à la Syrie, mais à toute la région et au monde entier. Un message signifiant que l’Etat islamique est devenu une menace pour tous les pays», a déclaré le porte-parole de l’armée irakienne, Kassim Atta.

Les Etats-Unis ont déployé des conseillers militaires à Bagdad et font voler des appareils armés et non-armés dans l’espace aérien irakien. Mais ils ne prennent pas part directement aux combats.

La Russie a envoyé, elle, ses premiers avions militaires en Irak, honorant une commande de cinq avions de chasse Sukhoi Su-25 de seconde main. Ces appareils seront opérationnels dans quelques jours.

Affirmation risquée

Annoncée au début du ramadan, l’élévation d’Abou Bakr al Baghdadi au rang de calife en fait le successeur du prophète Mahomet dans l’exercice du pouvoir politique. Elle représente aussi un défi à la direction d’al-Qaïda, dont il s’est affranchi.

L’EIIL, qui s’est rebaptisé simplement Etat islamique (EI), conteste désormais à al-Qaïda le statut d’autorité morale des djihadiste à travers le monde. L’affirmation de cette ambition est toutefois risquée.

L’EI pourrait ainsi perdre des alliés, notamment les groupes sunnites moins radicaux et les nostalgiques de l’ancien régime baassiste, pense Fawaz Gerges, de la London School of Economics. Ces formations l’ont aidé dans son offensive contre le pouvoir dominé par la majorité chiite en place à Bagdad.

«L’objectif stratégique des baassistes est la prise de Bagdad, pas l’instauration d’un califat», estime cet expert du Proche-Orient. «Le plus probable est que l’annonce de l’EIIL va intensifier la lutte entre djihadiste et creuser le fossé entre l’EIIL et ses alliés rebelles sunnites en Irak», ajoute-t-il.

Combats fratricides

En Syrie, près de la frontière irakienne, des combats fratricides ont eu lieu à nouveau lundi entre djihadiste de l’EI et les rebelles du Front al-Nosra, la branche syrienne d’al-Qaïda. L’Observatoire syrien des droits de l’Homme a signalé de violents combats à Boukamal.

Les combattants de l’EI (Etat islamique) ont été d’abord bien accueillis par certains rebelles syriens cherchant à renverser le régime de Bachar al-Assad. Mais la volonté d’hégémonie et les abus de ces combattants ont poussé les rebelles à retourner leurs armes.

(ats/Newsnet)