La reine fait comme si elle était neutre sur le sort de l’Ecosse

 

 

Dans un geste exceptionnel, Buckingham Palace a cru bon de rappeler la semaine dernière le devoir de réserve de Sa Majesté.

«L’impartialité constitutionnelle de la souveraineté est un principe établi de notre démocratie, et la reine s’y est pliée tout au long de son règne. Selon ce principe, le monarque est au-dessus de la politique et les responsables au gouvernement ont pour devoir de faire en sorte que cela reste le cas”, a souligné un porte-parole du palais royal.

Une mise au point jugée nécessaire après des informations de presse selon lesquelles des responsables politiques, dont le premier ministre David Cameron, sous le choc de la progression récente des intentions de vote en faveur de l’indépendance, lui aurait demandé d’intervenir dans la campagne.

Mais à un an de battre le record de longévité de la reine Victoria sur le trône britannique, la souveraine de 88 ans, qui règne sur le Royaume-Uni depuis 1952, ne peut qu’être préoccupée à la perspective d’une sécession éventuelle de l’Ecosse.

«Les liens de longue date qui lient Elizabeth II à cette région de son royaume qu’elle affectionne particulièrement seront irrévocablement dénoués dans le cas d’un vote pour le oui. Cela lui briserait certainement le coeur”, estimait mercredi le quotidien Daily Telegraph.

La mère de la reine était écossaise et Elizabeth II passe tous les ans plusieurs mois dans sa résidence d’été de Balmoral, dans le nord-ouest de l’Ecosse.

Déclaration de nature très politique

Face à son impassibilité affichée, les spécialistes de la couronne britannique se remémorent une déclaration de nature très politique, sur l’intégrité du Royaume-Uni. C’était en 1977 devant le Parlement de Westminster, à l’occasion de son jubilé d’argent. Et cela concernait l’Ecosse ainsi que le Pays de Galles, qui réclamaient des transferts de pouvoirs.

«Je ne peux pas oublier que j’ai été couronnée reine du Royaume-Uni de Grande Bretagne et d’Irlande du Nord», avait-elle dit, insistant sur «les bénéfices que l’union a apporté sur le plan intérieur et à l’international, à tous les habitants de toutes les parties du Royaume-Uni»«Si tout se passe mal la semaine prochaine, combien elle regrettera de ne pas en avoir fait plus», a jugé le Daily Telegraph.

«Le vote est extrêmement serré et son intervention pourrait faire la différence», a quant à lui déclaré un député au quotidien The Independent.

La promesse du leader indépendantiste

Alex Salmond, leader des indépendantistes, a promis qu’une Ecosse indépendante conserverait la reine pour chef d’Etat, comme elle l’est pour le Royaume-Uni et 15 autres Etats du Commonwealth, dont le Canada. Mais pour combien de temps alors que nombre de nationalistes ne cachent pas leurs penchants républicains, interroge entre autres leGuardian.

Ce quotidien, citant des experts constitutionnels, explique par ailleurs que la reine aura besoin de nommer un gouverneur général pour la représenter en Ecosse en cas d’indépendance. «La reine ne peut pas avoir deux sources conflictuelles de conseil provenant de deux gouvernements différents», remarque Vernon Bogdanor, professeur de sciences politiques au King’s College.

Certains soulignent toutefois qu’Elizabeth II a su parfaitement laisser transparaître son opinion, à travers la presse. Ainsi, selon le Times entre autres la semaine dernière, elle se serait montrée «inquiète» de la situation. «J’espère que les gens vont soigneusement réfléchir à l’avenir”, aurait-elle par ailleurs déclaré dimanche après avoir assisté à un service religieux près de son château de Balmoral, se faisaient l’écho plusieurs journaux. Malgré les démentis de Buckingham, le message est passé.

(afp/Newsnet)