FRANCE: 12 ans de prison pour avoir sciemment transmis le VIH

 

La cour d’assises des Bouches-du-Rhône a prononcé, jeudi 2 octobre, une peine de 12 années de réclusion criminelle contre Christophe Morat, jugé depuis lundi pour avoir transmis le VIH, sciemment et en récidive. Il a été reconnu coupable d’avoir contaminé une femme et d’en avoir exposé cinq autres à ce risque.

L’avocate générale avait requis 15 ans de réclusion criminelle contre cet homme de 40 ans, qui avait déjà été définitivement condamné en 2005 à six ans d’emprisonnement pour des faits similaires.

Une peine «très, très lourde»

C’est une peine «très, très lourde, que je ne comprends pas au moment où je vous parle», a réagi après le verdict Me Christophe Bass, un des avocats de Christophe Morat. «Non seulement c’est une peine lourde, mais il a été répondu ‘oui’ à toutes les questions, y compris celle de la préméditation, et je continue a penser qu’il n’y avait ni préméditation, ni intention de contaminer», a-t-il ajouté, précisant ne pas encore savoir si son client souhaitait faire appel.

Me Eric Morain, avocat de plusieurs parties civiles, a de son côté évoqué un «soulagement»: «La cour vient de retirer pour 12 ans le permis que Morat s’était autorisé à avoir de contaminer. Pendant 12 ans, Christophe Morat va pouvoir faire ce chemin qu’il appelle de ses vœux, afin que lorsqu’il sortira, il ne réitère pas ces faits.»

Un homme «théâtral, comédien»

Christophe Morat était jugé pour «administration volontaire de substances nuisibles» à plusieurs femmes, ayant entraîné pour l’une d’entre elles, contaminée, «une mutilation ou une infirmité permanente» et pour cinq d’entre elles, séronégatives, une atteinte à l’intégrité psychique, le tout «avec préméditation et en état de récidive légale».

L’avocate générale Martine Assonion l’avait dépeint jeudi comme un homme «théâtral, comédien», «charmeur, séducteur», mais qui possède «deux personnalités», le «tendre» et le personnage «abject, qui parle de manière dure».

Multiples aventures sexuelles

Dans son réquisitoire, elle est longuement revenue sur les multiples aventures sexuelles de l’accusé dès sa sortie de prison, entre 2008 et 2011 . «Christophe Morat est en chasse», et va «continuer son œuvre destructrice».

L’avocate générale a aussi affirmé que Christophe Morat «connaissait tous les modes de transmission» du VIH, alors que certaines partenaires ont raconté comment il prétendait qu’il n’y avait «pas de risques» puisque il n’éjaculait pas en elles.

Une «infirmité permanente»?

Les avocats de la défense ont contesté pied à pied le raisonnement juridique de l’accusation. La contamination au VIH, une «infirmité permanente»? «Vous devez la caractériser», a demandé Me Bass aux jurés. «Est-ce que le traitement à vie est une infirmité?» a-t-il questionné, en référence aux progrès de la thérapeutique contre le VIH.

Dans le cas de l’administration de substance nuisible, «la tentative n’est pas punissable», a argué un autre de ses avocats, Me François Mazon, pour tenter de faire tomber les charges concernant les cinq femmes non contaminées.

«J’ai pas menti… J’ai pas dit la vérité»

Me Mazon s’est surtout attaché à démontrer l’absence de préméditation, qui a justifié son renvoi devant une cour d’assises, et non devant un tribunal correctionnel. «Si l’on veut maximiser ses chances (de contamination), c’est un rapport sexuel avec éjaculation», a-t-il souligné. «Le sida, c’est le cumul de trois grands tabous: le sexe, le sang, la mort», a-t-il également lancé pour expliquer l’incapacité de son client à avouer sa séropositivité à ses partenaires.

«J’ai pas menti… J’ai pas dit la vérité, c’est tout», s’était défendu mercredi, l’accusé, les traits émaciés, exprimant toutefois de profonds regrets.

Sous «l’influence» de l’accusé

La femme contaminée, âgée de 43 ans, avait, elle, longuement raconté comment elle était tombée sous «l’influence» de l’accusé, avec qui elle avait eu des rapports non protégés même après avoir découvert son ancienne condamnation et sa séropositivité.

A la fin de l’audience de jeudi, Christophe Morat a de nouveau demandé pardon aux femmes assises en face de lui sur le banc des parties civiles, avant que le jury ne se retire pour délibérer.(afp/Newsnet)