GUERRE EN SYRIE: Les USA vont dépêcher une équipe militaire en Turquie

 

Les Etats-Unis vont envoyer une équipe militaire à Ankara la semaine prochaine pour des discussions avec la Turquie, qui rechigne à s’engager dans la lutte contre le groupe Etat islamique (EI), a annoncé le département d’Etat vendredi 10 octobre.

Deux envoyés spéciaux américains ont déjà discuté jeudi dans la capitale turque des «mesures urgentes et rapides» à prendre conjointement avec la Turquie pour enrayer l’avancée de l’organisation EI. Ils ont précisé qu’une «équipe militaire américaine allait se rendre à Ankara la semaine prochaine pour assurer le suivi de ces discussions» au niveau militaire, a précisé la porte-parole du département d’Etat, Jennifer Psaki.

Un tiers de la ville aux mains des djihadistes

Les djihadistes de l’Etat islamique (EI) avançaient jeudi dans Kobané, après avoir pris le contrôle d’un tiers de cette ville kurde du nord de la Syrie, malgré une intensification des frappes de la coalition internationale.

Dans l’immédiat, les combattants kurdes qui défendent la ville stratégique de Kobané, tout près de la frontière turque, savent désormais qu’ils ne devront compter que sur leurs propres forces.

«Malgré une résistance acharnée des forces kurdes, l’EI a avancé vers le centre et s’est rendu maître de plus d’un tiers de Kobané», a dit à l’AFP le chef de l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH), Rami Abdel Rahmane.

Le rapport de force défavorable aux Kurdes

«Les djihadistes se sont emparés de l’immeuble des Assayech (forces de sécurité kurdes) dans le nord-est de la ville» et se rapprochent du «carré de sécurité», secteur abritant le commandement des Unités de protection du peuple (YPG), la principale milice kurde, selon l’ONG.

En soirée, les combats de rue se poursuivaient aux abords sud, est et ouest de la ville où les djihadistes ont réussi à entrer lundi, a ajouté l’OSDH en faisant état d’une nouvelle frappe de la coalition dirigée par les Etats-Unis sur des positions de l’EI dans l’est de Kobané.

Le rapport de force est cependant défavorable aux Kurdes, l’EI possédant véhicules blindés et armes sophistiquées.

Intensification des raids

Du côté turc de la frontière, une journaliste de l’AFP a vu quatre frappes dans la région de Kobané (Aïn al-Arab en langue arabe). D’épaisses fumées étaient visibles au-dessus de la ville et de violents échanges de tirs audibles.

L’armée américaine a confirmé cinq frappes contre des positions de l’EI au sud de Kobané, qui continue d’être, selon elle, en grande partie sous contrôle des YPG.

Néanmoins, le Pentagone a reconnu que «les frappes à elles seules ne vont pas sauver» la ville, soulignant la nécessité d’avoir des troupes «compétentes» sur le terrain.

Pas de QG de l’EI visibles

Les djihadistes ont changé de tactique pour s’adapter aux frappes lancées le 23 septembre en Syrie par les Etats-Unis et leurs alliés arabes, selon le plus haut gradé américain, le général Martin Dempsey. «Ils ne se déplacent plus dans de longs convois (…) Ils n’établissent pas de QG qui sont visibles».

S’ils réussissaient à conquérir Kobané, les djihadistes s’assureraient la maîtrise sans discontinuité d’une longue bande de territoire à la frontière syro-turque.

70 villages tombés aux mains de l’EI

Depuis le début de l’offensive djihadiste, le 16 septembre, près de 500 personnes en majorité des combattants ont péri selon l’OSDH, et quelque 70 villages sont tombés aux mains de l’EI. En outre 300’000 habitants de la région ont pris la fuite, dont plus de 200’000 en Turquie.

Profitant de la guerre civile qui ravage la Syrie depuis plus de trois ans, le puissant groupe ultra-radical, fort de dizaines de milliers d’hommes et responsable d’atrocités, a réussi à s’emparer de larges pans de territoires dans le nord et l’est du pays.

Il contrôle en outre de grandes zones dans l’Irak voisin, où il a lancé une offensive fulgurante il y a quatre mois, entraînant des raids aériens des Etats-Unis et de leurs alliés occidentaux depuis le 8 août.

Symbole de la résistance à l’EI

La bataille de Kobané, devenue le symbole de la résistance à l’EI, a suscité des violences depuis lundi en Turquie notamment dans les provinces à majorité kurde, faisant plus de 20 morts, après le refus d’Ankara d’intervenir en Syrie. Le président Recep Tayyip Erdogan a promis de réprimer les fauteurs de troubles.

A travers le monde, les Kurdes manifestent leur frustration:

Malgré le feu vert du Parlement turc pour une opération militaire contre l’EI, le ministre des Affaires étrangères Mevlut Cavusoglu a jugé «non réaliste» que son pays envoie seul des troupes combattre les djihadistes .

Les Etats-Unis ont exprimé leur frustration devant les réticences de la Turquie. «Des mesures urgentes et rapides sont nécessaires pour stopper les capacités militaires de l’EI et le général John Allen» qui coordonne la coalition, va «le dire clairement» aux responsables turcs, a dit le département d’Etat.

Une zone-tampon, condition sine qua non

Ankara a fait de la création d’une zone tampon, visant à protéger les secteurs tenus par la rébellion modérée contre le régime syrien et les populations fuyant la guerre, une condition de sa participation aux opérations antijihadistes.

Mais cette proposition, soutenue par la France, ne suscite guère l’enthousiasme de la Maison Blanche et de l’Otan. Et pour Moscou, toute création d’une «zone tampon» nécessite un feu vert du Conseil de sécurité de l’ONU.

Ailleurs en Syrie, au moins 25 personnes, dont quatre enfants, ont été tuées dans des raids aériens de l’armée sur une localité contrôlée par les rebelles syriens près de Damas, selon l’OSDH.(afp/Newsnet)