ETAT ISLAMIQUE: Les Etats-Unis annoncent des «progrès» avec la Turquie

 

Les Etats-Unis ont fait état vendredi 10 octobre d’avancées avec la Turquie pour qu’elle s’implique davantage dans la lutte contre le groupe Etat islamique (EI) en Syrie, notamment grâce à l’appui d’Ankara pour former et équiper des rebelles syriens modérés.

Le patron de la coalition internationale, le général américain à la retraite John Allen, et son adjoint Brett McGurk, ont bouclé une visite sensible de deux jours en Turquie pour tenter de convaincre cet allié réticent à s’engager militairement contre l’EI, qui menace sa frontière à Kobané.

Des «progrès»

Interrogée pour savoir si ces entretiens américano-turcs –avec le Premier ministre Ahmet Davutoglu et des responsables militaires– avaient permis de faire des «progrès», la porte-parole du département d’Etat Marie Harf a répondu par l’affirmative.

«La Turquie est d’accord pour soutenir les efforts d’entraînement et d’équipement pour l’opposition syrienne modérée», l’un des volets de la stratégie américaine en Syrie dévoilée le 10 septembre par le président Barack Obama, a dit Marie Harf.

Les deux émissaires américains ont d’ailleurs rencontré des dirigeants de l’opposition syrienne à Ankara.

Crainte d’un «massacre» selon l’ONU

Le groupe Etat islamique a pris vendredi le QG des forces kurdes à Kobané et s’est rapproché de la frontière avec la Turquie, l’ONU mettant en garde contre un «massacre» si la ville syrienne tombait aux mains des djiahdistes.

Depuis son entrée lundi dans cette ville kurde stratégique du nord syrien, l’EI en a pris 40%, se frayant un chemin vers sa périphérie nord, à près d’un kilomètre de la frontière turque.

La progression du groupe radical n’a pu être freinée par les frappes de la coalition internationale dirigée par les Etats-Unis, insuffisantes pour sauver la ville de l’aveu même des responsables militaires américains.

Des Kurdes moins nombreux

Selon l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH), les djihadistes ont chassé vendredi de leur QG dans le nord de Kobané les combattants kurdes moins nombreux et moins bien armés.

«Ils ont pris le contrôle du ‘carré de sécurité’», qui abrite le complexe militaire des Unités de protection du peuple (YPG, principale milice kurde syrienne), le siège du conseil local et la base des Assayech (forces de sécurité kurde), d’après l’ONG, qui précise que des raids de la coalition ont frappé quatre positions dans ce secteur.

Des combats très violents

Toujours dans la même zone, l’EI a perpétré un attentat suicide, tuant deux combattants kurdes, selon la même source.

Les djihadistes se rapprochent de plus en plus du poste-frontière avec la Turquie, qu’ils cherchent à prendre pour assiéger totalement la ville, mais ils progressent aussi par le sud et l’ouest de Kobané. Des combats très violents ont eu lieu en outre dans l’est de la ville.

Un possible «massacre» semblable à celui de Srebrenica

Depuis le côté turc de la frontière, une journaliste de l’AFP a entendu des bruits d’armes automatiques et d’obus de mortier et vu d’épaisses fumées au-dessus de la ville.

A Genève, l’émissaire spécial de l’ONU pour la Syrie, Staffan De Mistura, a dit craindre un «massacre» semblable à celui de Srebrenica dans l’ex-Yougoslavie.

Selon lui, jusqu’à 700 civils se trouvent encore dans le centre-ville, dont une majorité de personnes âgées, et entre 10 à 13’000 autres sont rassemblées tout près de la frontière. Si la ville tombe, ces civils seront «très probablement massacrés», a-t-il averti. En prenant la ville, les djihadistes de l’EI contrôleraient près de 400 km des 900 km de frontière entre la Turquie et la Syrie, selon lui.

Autoriser les volontaires à rejoindre Kobané

Il a en outre appelé la Turquie, qui interdit aux Kurdes syriens réfugiés en Turquie de repasser la frontière, à «autoriser le flot de volontaires à entrer dans la ville pour soutenir son action d’autodéfense».

Mais le ministre turc des Affaire étrangères, Mevlut Cavusoglu, interrogé par la télévision France 24, a estimé que «renvoyer des civils vers la guerre est un crime».

Le chef du principal parti politique kurde de Syrie, qui fait état de 10’000 civils dans la ville, a lui pressé les autorités turques de laisser passer des armes.

«Nous avons désespérément besoin de l’aide de la Turquie», a déclaré Salih Muslim, président du Parti de l’union démocratique (PYD) dans un entretien téléphonique à l’AFP, «ce serait très bien qu’elle ouvre le plus vite possible sa frontière au passage d’armes».

Des drapeaux kurdes sur les véhicules des djihadistes

Mais dans une interview à la télévision Al-Mayadeen basée à Beyrouth, il s’est opposé catégoriquement à une entrée de l’armée turque à Kobané, qui s’apparenterait selon lui à une «occupation».

Selon Mustafa Ebdi, un militant kurde interrogé par l’AFP qui effectue des allers-retours entre la Turquie et Kobané, les forces kurdes, de plus en plus désespérées, voient leurs munitions diminuer et réclament plus de frappes contre le groupe extrémiste.

«Certains combattants m’appellent en pleurant», confie-t-il, en expliquant les djihadistes ont désormais recours à la ruse, en mettant notamment «des drapeaux kurdes sur leurs véhicules pour leurrer les avions».

La guerre continue dans le reste du pays

Profitant de la guerre civile qui ravage la Syrie depuis plus de trois ans, l’EI s’est emparé de larges pans de territoires dans le nord et l’est du pays.

Le groupe extrémiste, fort de dizaines de milliers d’hommes, contrôle en outre de grandes zones dans l’Irak voisin, où il est aussi la cible de raids aériens des Etats-Unis et d’alliés occidentaux.(ats/Newsnet)