JUSTICE AMÉRICAINE: L’avocat de Raoul Weil met en évidence des tensions à la tête de l’UBS

Aaron Marcu, l’avocat de Raoul Weil, s’est efforcé mardi à présenter l’ex-numéro 3 de l’UBS comme la victime de ses subalternes souhaitant se protéger face à la justice américaine. Il a insisté sur les tensions entre Raoul Weil et Martin Liechti, son ancien bras droit et l’un des témoins clés du gouvernement américain. Liechti a conclu un deal avec le Département américain de la Justice en 2008 et accepté de témoigner sur les pratiques de l’UBS aux Etats-Unis. En échange, Washington ne l’a pas poursuivi en justice. «La relation entre Raoul Weil et Martin Liechti était compliquée», a affirmé Aaron Marcu dans sa plaidoirie en ouverture du procès. «Mr Weil avait eu des promotions que M. Liechti n’appréciait pas.»

Sur le fond, Aaron Marcu a multiplié les attaques contre Martin Liechti, Michel Guignard et Hansruedi Schumacher, les anciens collaborateurs de Raoul Weil qui témoigneront contre lui lors du procès. Selon lui, Martin Liechti et Michel Guignard, les deux hommes qui dirigeaient la branche américaine de l’UBS sous les ordres de Raoul Weil, lui avaient caché les malversations de leur division aux Etats-Unis. «On ne peut pas faire payer à M. Weil le prix de leurs activités criminelles», a martelé Aaron Marcu.

Méthodes «à la James Bond»

Au cours de de son long plaidoyer, l’avocat a aussi tenté de contrer contrer le procureur Mark Daly, lorsque celui-ci a souligné les 3800 visites à des clients américains effectuées en 1 année par des banquiers de l’UBS et les méthodes «à la James Bond» pour cacher leurs démarches. «Tout cela semble sinistre», a admis Aaron Marcu avant d’affirmer: «Mais il y a une autre facette à cette histoire. La banque voulait s’assurer que ses employés n’offraient pas de services pour lesquels la banque n’avait pas de licence. Et quand des choses ont été cachées, elles l’ont été par les témoins que le gouvernement appellera à la barre. Ces hommes avaient mis sur pied un stratagème pour faire ce genre de pratiques à la James Bond.»

Aaron Marcu a aussi affirmé pêle-mêle que Raoul Weil n’avait jamais rencontré les 20 000 clients qu’il est accusé d’avoir aidé à frauder le fisc américain. Que le financier gérait une division tentaculaire au sein de laquelle les activités américaines qui lui sont reprochées ne représentaient que 1% de son service. Et qu’il n’avait cessé d’oeuvrer pour que l’UBS suivent les règles dictées par les Etats-Unis.

Le sort de Raoul Weil dans ce remake de l’affaire UBS, est désormais entre les mains de 6 femmes et 6 hommes. Avant la plaidoirie de son avocat, l’ancien numéro 3 de l’UBS qui risque 5 ans de prison dans cette affaire d’évasion fisacle, a assisté hier matin à la sélection du jury au tribunal fédéral de Fort Lauderdale. Les avocats du financier suisse de 54 ans, qui est arrivé au tribunal en tenant son épouse par la main, devront notamment convaincre un gérant de supermarché, un pompier à la retraite et une femme dont le nom de famille, Jolie, a fait frémir un juge Cohn jamais avare d’un bon mot. «Dommage qu’elle ne s’appelle pas Angelina», a d’ailleurs lâché le magistrat sur un ton lancinant.

15 témoins pour le gouvernement

En ouverture du procès, Mark Daly, le procureur, a soumis une liste de 15 témoins potentiels dont Martin Liechti et Hansruedi Schumacher, l’ancien directeur de la division américaine de l’UBS. Celui-ci avait été poursuivi en 2009 pour fraude fiscale, mais ne s’est finalement rendu aux autorités américaines que la semaine dernière. Autres témoins clé: Marten Hoekstra et Michel Guignard, des anciens cadres de l’UBS, et Renzo Gadola, un ex banquier de l’UBS condamné en 2011 à 5 ans de prison avec sursis. L’accusation va également s’appuyer sur des anciens clients de l’UBS tels que Juergen Homann. Cet homme d’affaire avait plaidé coupable d’évasion fiscale en 2009 dans le New Jersey et avait été condamné à 5 ans de prison avec sursis. Les avocats de Raoul Weil n’ont pas encore indiqué qui ils comptaient appeler à la barre.

Le juge Cohn a rejeté hier une motion du camp Weil demandant l’annulation du procès en raison de la décision du gouvernement américain de ne pas garantir l’immunité aux Etats-Unis aux témoins de la défense. Les avocats du financier suisse ont déposé hier une nouvelle motion demandant que l’affaire soit classée pour vice de procédure dans l’acte d’accusation dressé en 2008. A la sortie du tribunal, Aaron Marcu a affirmé que son client était «heureux de pouvoir comparaître à son procès».