CONFRONTATION AU SOMMET: Obama, affaibli, de retour en Asie

Sa tournée asiatique le mènera aussi en Birmanie et en Australie.

M. Obama, qui entame ses deux dernières années à la Maison-Blanche dans une position inconfortable après la prise du Sénat par les républicains, tentera de dissiper l’impression qu’une cascade de crises internationales – Etat islamique en Irak et en Syrie, conflit dans l’Est de l’Ukraine, virus Ebola – l’ont détourné de la région.

Au fil des sommets (APEC à Pékin, ASEAN à Naypyidaw, G20 à Brisbane), des rencontres bilatérales et d’un discours-phare sur le rôle des Etats-Unis dans cette partie du monde, le président américain devra convaincre que le «rééquilibrage» diplomatique de son pays vers l’Asie-Pacifique, pièce maîtresse de sa politique étrangère, n’est pas qu’une formule.

«Cela va être un voyage difficile pour le président», prédit Ernest Bower du Center for Strategic and International Studies (CSIS), à Washington. «Quand les pays de l’Asie du Sud-Est le voient venir, ils se demandent: ‘Qui est Barack Obama après ces élections?’ Ils tenteront de discerner s’il a la volonté et le capital politique pour donner suite à ses engagements».

«Des conversations franches»

Cette semaine, un quotidien officiel chinois ironisait sur le maigre bilan et la «rhétorique vide» du président américain. «Obama lance toujours ‘Yes, we can’, suscitant de grandes attentes dans la population. Mais il a fait un travail insipide et n’a presque rien à offrir à ses partisans», estimait dans un éditorial le «Global Times», proche du parti communiste chinois (PCC).

Absent l’an dernier du sommet du Forum de coopération économique pour l’Asie-Pacifique (APEC) à Bali en raison de la crise budgétaire aux Etats-Unis, M. Obama, qui s’est rendu en avril au Japon et en Corée du Sud pour rassurer ses alliés, entend cette fois y laisser sa marque.

En marge de ce sommet, il rencontrera pour la première fois le nouveau président indonésien Joko Widodo avant de consacrer une journée et demie à des échanges avec son homologue chinois. La Maison-Blanche promet «des conversations franches et approfondies», les dossiers épineux ne manquent pas.

Tensions élevées avec la Chine

Le piratage informatique et les différends territoriaux de la Chine avec ses voisins asiatiques en mer de Chine méridionale restent sources de vifs désaccords. Susan Rice, conseillère de Barack Obama à la sécurité nationale, s’est déclarée «très inquiète du sort réservé aux défenseurs des droits de l’homme».

«La relation Etats-Unis-Chine n’est pas dans une mauvaise spirale, mais c’est une relation dans laquelle un niveau de tension élevé est devenu la norme», résume Michael Green du CSIS.

M. Obama peut tabler sur des discussions potentiellement plus constructives sur le climat où une initiative commune pourrait être annoncée à Pékin. Et il pourra s’appuyer, tout au long de sa tournée, sur ses deux plus solides alliés : les premiers ministres australien Tony Abbott et japonais Shinzo Abe.

Lors de sa deuxième visite en Birmanie, sortie en 2011 d’un demi-siècle de pouvoir militaire, le président américain rencontrera le président Thein Sein à Naypyidaw, puis l’opposante Aung San Suu Kyi à Rangoun. A l’approche des élections législatives de 2015, cette dernière a appelé les Etats-Unis, «trop optimistes» à ses yeux sur les réformes en cours, à la vigilance.

TTP en point de mire

Paradoxalement, le résultat des élections législatives de mi-mandat aux Etats-Unis pourrait faciliter la tâche du président américain sur un sujet central: les négociations sur le partenariat transpacifique (TPP), accord de libre-échange qui comprendrait douze pays (dont les Etats-Unis et le Japon mais pas la Chine).

«C’est une priorité absolue des Etats-Unis», a assuré Susan Rice. Elle a toutefois souligné qu’il ne fallait pas s’attendre à une annonce sur un accord à l’occasion de ce voyage.

L’administration Obama cherche depuis longtemps à réactiver la «procédure accélérée», une législation qui lui permet de négocier des accords commerciaux en détail avant de demander au Congrès de les avaliser en bloc.

Mais ce mécanisme se heurte à une véritable opposition dans le camp démocrate, qui redoute que cet accord n’aboutisse à des délocalisations, alors que les républicains, traditionnellement plus favorables au libre-échange, y sont plus ouverts.

La nouvelle donne au Congrès pourrait offrir une fenêtre de tir à Barack Obama et lui permettre d’accrocher cet accord de libre-échange – qui représenterait 40% du PIB mondial – à son bilan avant de quitter la Maison-Blanche en janvier 2017.

(ats/Newsnet)