
Pour la première fois depuis 2009, date de sa création, la case des tous-petits de Colibantan n’a pas fait sa rentrée. Les locaux sont vides et risquent de le rester. Au grand désespoir de la communauté éducative. Avec plus de 150 enfants sur le carreau.
Ecole primaire : 0% de réussite
Les habitants de Colibantan se sentent abandonnés. Loin de Tambacounda et plus encore de la capitale, ils constatent avec amertume et résignation que l’Etat les a abandonnés. Dans le domaine de l’Education en tous les cas, l’année 2014 est celle des grandes déceptions. L’école primaire a obtenu de piètres résultats, les pires du département : 0% de réussite au CEFE. La communauté n’est pas contente. Comment une école qui en 2003 avait obtenu 100% au CEFE peut elle 10 ans plus tard obtenir le score totalement inverse. L’année passée, le village – constatant l’incapacité du Directeur a gérer son équipe correctement – et après plusieurs jours de grève et plusieurs délégations à l’Inspection Académique – avait demandé le départ du Directeur. Le Directeur est toujours là en cette rentrée 2014-2015, pour le meilleur et pour le pire. Et ne comptez-plus sur les populations pour se mobiliser. Résignation et impuissance sont les maitres-mots ou maitres-maux plutôt. Car le silence tue, lentement mais sûrement. « Certains enseignants sont natifs du village » ose s’exprimer mais sans accepter qu’on cite son nom, un parent d’élèves. « Si on commence à critiquer un enseignant parent du village, cela va diviser le village ». Ne rien dire donc et accepter résigné que l’école ne remplisse pas son rôle. « Une nouvelle génération d’élèves va être sacrifiée », témoignent résignés d’autres responsables associatifs locaux et les étudiants. « Dans les années 2000 à 2003, notre école a pourtant produit 40 bacheliers », confirme son Président. Ils sont aujourd’hui tous étudiants à Dakar. Et se désolent comme le reste de la communauté des résultats de cette école primaire. Se rappelant avec nostalgie de l’équipe enseignante motivée qui oeuvrait à cette époque dans le village avec une directeur qui tenait bien la barre.
150 petits enfants sans classe
Que dire de la case des tous-petits. Sans aucune aide, mais avec beaucoup de volonté et l’implication de 3 jeunes bénévoles du village, les populations avaient aménagé dés 2009 la case des tous-petits dans un bâtiment désaffecté du village à proximité de l’école primaire. Deux classes pas vraiment adaptées à l’accueil de tous-petits, mais 2 classes quand même. Avec de 2009 à 2014 : plus de 150 élèves en moyenne par an. Et plus encore, sans aucun doute, si la case des tous-petits avait disposé de davantage de locaux. Mais faute de moyens et d’aides de l’Etat, notamment dans la gestion des ressources humaines, les jeunes bénévoles de Colibantan, pourtant très motivés à l’instar de Sidi Ly, se sont essoufflés, puis complètement découragés : comment peut-on demander à des personnes en difficulté économique de s’investir pendant plus de 5 ans à plein temps et bénévolement ? La case des tous-petits représentait pourtant une chance formidable et un levier pour la réussite des élèves dans une zone marquée par l’échec et l’abandon scolaire précoce.
Un collège apprécié mais précaire
Une petite satisfaction quand même (à nuancer) pour les populations de Colibantan et les écoles polarisées : l’érection du collège de Colibantan à la rentrée 2012. L’Etat a mis les moyens en ressources humaines : une équipe de jeunes enseignants formés et motivés, un principal du même acabit. Et une satisfaction générale de la communauté pour le travail mené depuis 2 ans par l’équipe éducative. Mais malgré la mobilisation du village pour la construction d’un bâtiment administratif, la construction de latrines, l’adduction d’eau, la situation matérielle du collège est précaire : 5 classes provisoires qu’il faut reconstruire chaque année. « L’Etat ne peut pas tout faire certes. Et elle fait avec ses moyens », admettent les populations. « Mais on ne peut pas tout demander non plus à des populations qui ont déjà du mal à résoudre leurs propres problèmes économiques et à faire manger leurs enfants tous les jours », témoigne Lamine un responsable associatif. « Nous demandons que l’Etat nous aide à construire un collège digne de nos enfants et digne des objectifs que s’appliquent l’Education Nationale », clame la communauté éducative.
Des doléances que le chef du village Famara Ly et des responsables associatifs ont essayé de faire entendre à l’adjoint du Gouverneur et à sa délégation venus mi-octobre dans la commune pour célébrer la journée internationale sur le Droit à l’Alimentation. Mais pas sûr que le message ait été bien entendu. La caravane est passée rapidement. Les enfants de Colibantan restent sur le carreau.