IRAN: L’accord sur le nucléaire suscite espoir et méfiance

Réunis à Vienne depuis ce mardi, les grandes puissances et l’Iran ont entamé la dernière session de négociations sur le nucléaire afin de parvenir à un accord final avant le 24 novembre. Au même moment, en Iran, la presse mélange marques de soutien et mises en garde.

D’habitude très critique à l’encontre de la politique du président modéré Hassan Rohani, le quotidien ultraconservateur Kayhan – dont le directeur est directement nommé par le guide suprême Ali Khamenei – blâme les Etats-Unis pour leur «refus de supprimer toutes les sanctions» imposées à l’Iran. Dans un article non signé, le journal estime qu’un accord à long terme ne «servira pas les intérêts de l’Iran» puisque l’«objectif des Occidentaux est d’obtenir de notre pays qu’il cesse ses activités d’enrichissement d’uranium sans rien nous donner en retour».

Du côté des réformateurs, le quotidien Shargh publie une interview de Mohammad Reza Naghdi, le commandant en chef des Bassiji – l’armée d’élite du régime, elle aussi sous contrôle de l’ayatollah Khamenei. «Les diplomates iraniens en charge de ces négociations font l’honneur de l’Iran (…) Nous savons qu’ils défendront le droit de notre peuple au nucléaire», dit-il. Avant de poursuivre en guise d’avertissement: «Même si l’équipe de négociateurs ne parvient pas à signer un accord, nous la soutiendrons car elle aura défendu les intérêts du pays.»

«Cet accord, ça fait longtemps qu’on l’espère mais je pense qu’il faudra encore attendre un peu.» À l’instar de beaucoup d’Iraniens, Sara, employée à la Mairie de Téhéran, reste confiante mais sceptique sur l’imminence d’un compromis historique dont les enjeux sont colossaux. À commencer par la fin des sanctions économiques et financières. Avec une économie principalement basée sur la rente pétrolière, l’Iran n’exporte plus que la moitié de son or noir. Le pays a donc besoin d’investissements étrangers pour satisfaire son besoin en liquidités. Et c’est précisément là que ça coince. Tandis que le privé ne représente que 17% du marché iranien, les secteurs les plus stratégiques du pays sont détenus par les gardiens de la Révolution. Proches des éléments «durs» du régime, ils refusent de céder le monopole qu’ils exercent sur le juteux marché iranien.

«Un accord est nécessaire mais je pense que les négociations iront au-delà de la date initialement prévue», explique Mohammad Sabzalipour, directeur du World Trade Centre à Téhéran, une ONG chargée de fournir services et expertises aux entreprises commerciales iraniennes. «L’économie iranienne a surtout besoin d’un véritable plan de gestion à long terme. Lequel passe aussi par la confiance retrouvée des citoyens dans leur gouvernement», conclut-il.

S’il parvient à négocier la fin des sanctions, Hassan Rohani prendra l’avantage sur ses adversaires politiques. Le président pourra initier ses réformes économiques ainsi que l’ouverture politique qu’il a promise aux millions d’Iraniens en soif d’avenir et qui l’ont porté à la tête de la présidence en juin 2013.

(TDG)